L’annonce par Angelina Jolie de sa mastectomie pourrait bien être l’une des meilleures campagnes de santé publique de ces dernières années sur le cancer du sein. La médiatisation de cette intervention devrait en effet aider à faire prendre conscience des risques que font peser les mutations BRCA1 et BRCA2 sur les femmes qui en sont porteuses. Et ce coup de pouce ne sera pas du luxe. Une étude française, présentée le 9 juin au congrès de la société européenne de génétique humaine qui se tient à Paris, révèle que des familles à risques de développer des cancers ne pratiquent les tests génétiques qu’ils devraient. Les données issues de l’Institut national du cancer montrent que le nombre de tests génétiques pour identifier les mutations BRCA1 et BRCA2 a été multiplié par 3,5 entre 2003 et 2011 mais « c’est loin d’être optimal », estime le Pr Pascal Pujol, oncogénéticien au CHU de Montpellier.
Et la situation est encore bien moins bonne concernant les mutations MMR. Les personnes qui en sont porteuses présentent un risque élevé de développer un cancer colorectal ou un cancer de l’endomètre. Or, pendant la même période – entre 2003 et 2011 -, le nombre de tests n’est lui passé que de 1144 à 1635. Pour le Pr Pujol, « la participation au dépistage de la mutation MMR – qui est responsable de 5% des cancers colorectaux – est franchement décevante ».
En fait, dans une famille porteuse d’une de ses deux mutations, seulement un tiers des membres de cette famille subissent les tests génétiques. « Il est extrêmement inquiétant de constater qu'un tel test simple, qui a le potentiel d'épargner des familles entières d'une maladie dévastatrice, soit si sous-utilisés », regrette l’auteur de cette étude. Se savoir porteur de telle mutation permet en effet de prévenir le risque de cancer. Une femme de plus de 40 ans porteuse d’une mutation BRCA et qui choisit de subir une ablation des ovaires fait chuter de 20% son taux de mortalité par cancer.
Cette sous-utilisation des tests génétiques est donc une perte de chance. Le Pr Pujol estime donc que « nous devons de toute urgence lancer un programme majeur de sensibilisation de tous les acteurs concernés, via la formation médicale, des programmes d'information pour les patients et leurs familles, des campagnes de santé publique et l'amélioration du conseil génétique ».