Des douleurs de règles minimisées, des infarctus non-diagnostiqués, des violences gynécologiques et obstétricales récurrentes et pourtant rarement prises au sérieux… Pour l’association Osez le féminisme, cette prise en charge différente de la douleur et de la santé des femmes a un nom : le sexisme médical, qui parfois même se mue en maltraitance.
À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes le 8 mars prochain, l’association féministe a décidé de sensibiliser le grand public à cette problématique. Jeudi 28 février, elle a présenté sa nouvelle campagne intitulée "À notre santée ! Pour une santé féministe des filles et des femmes". Son objectif : lutter contre les discriminations ou les violences que rencontrent régulièrement les femmes qui franchissent la porte d’un cabinet médical ou d’un hôpital. "L'objectif est que nous ne soyons plus en danger quand nous avons besoin de soins, que nous soyons respectées dans notre dignité", affirme Cécile Werey, la coordinatrice de la campagne citée par le Huffington Post.
Infantilisation, humiliations, violences
Une enquête réalisée par Osez le féminisme entre mai et juillet 2018 auprès de 2 286 femmes âgées de 18 à 80 ans atteste que ces discriminations sexistes sont loin d’être un phénomène isolé. 88% des sondées affirment ainsi avoir été gênées au moins une fois par le comportement d’un(e) professionnel(le) de santé.
66 % disent par ailleurs avoir déjà eu le sentiment de ne pas être crues quand elles font part de leurs douleurs et 70 % d’avoir été culpabilisées, au moins une fois, par un(e) professionnel(le) de santé.
À ces maltraitantces et humiliations s’ajoutent les violences : un quart des sondées expliquent avoir subi au moins une fois des gestes ou des paroles à connotation sexuelle dans le cadre d’une consultation médicale. Plus d’une patiente sur dix dit avoir subi une pénétration sexuelle contre son gré lors d’une consultation médicale.
Osez le féminisme a aussi recueilli des témoignages de femmes maltraitées ou dont la douleur n’a pas été prise au sérieux. "Si un homme s'était présenté chez le médecin avec un dixième des douleurs que je ressens lors de mes règles, je suis convaincue qu'il aurait été hospitalisé immédiatement. Mais puisque 'les filles sont des chochottes' et que souffrir le martyr pendant ses règles 'c'est normal', on m'a renvoyée chez moi avec un doliprane des dizaines de fois", raconte une jeune femme. "Chaque fois que je pose des questions à mon généraliste, il me répond de manière infantilisante, comme si j’étais une hypocondriaque, comme si c’était farfelu de vouloir comprendre les maladies, les traitements", s’agace une autre.
Des conséquences sur la recherche médicale
Pour Osez le féminise, ce sexisme est non seulement préjudiciable pour la santé physique et psychologique des femmes qui le subissent, mais il a aussi des conséquences très nettes sur la recherche médicale.
Ainsi, rares sont les études à s’être penchées sur les effets indésirables de la ménopause ou sur le diagnostic, la prise en charge et l’accès aux soins des femmes souffrant d’endométriose. Les femmes sont aussi rarement intégrées dans les cohortes de patients pour tester de futurs médicaments. "Résultat : ces derniers sont d’abord conçus pour les hommes, sans considération des effets secondaires plus importants que pourraient subir les femmes", explique à L’Humanité la porte-parole d’Osez le féminisme Raphaëlle Rémy-Leleu.
L’association plaide donc pour une meilleure prise en charge médicale des femmes qui doit nécessairement passer par une meilleure formation des professionnels de santé, notamment à la détection et à la prévention des violences sexistes et sexuelles.