Touchant près de 900 000 personnes en France, la maladie d’Alzheimer est la forme la plus courante de démence liée à l’âge. Encore incurable à l’heure actuelle, cette maladie neurodégénérative entraîne de manière lente, progressive et irréversible un dysfonctionnement, puis la mort des cellules nerveuses du cerveau.
De fait, le cerveau d’une personne touchée par la maladie d’Alzheimer est différent de celui du cerveau "sain" d’une personne âgée, non-touchée par la maladie. Mais à partir de quand peut-on observer une évolution différente entre le cerveau d’une personne malade et un cerveau ayant un vieillissement normal ?
C’est tout l’objet de l’étude menée conjointement par des chercheurs du CNRS, de l’École pratique des hautes études (EPHE) et de l’université de Valence (Espagne), et publiée dans la revue Scientific Reports.
Une atrophie de l’hippocampe avant 40 ans
Pour mieux comprendre comment et quand un cerveau touché par la maladie d’Alzheimer évolue différemment d’un cerveau au vieillissement normal, les chercheurs ont analysé plus de 4 000 IRM cérébrales. 2944 IRM étaient celles de témoins sains, âgés de quelques mois à 94 ans : leur analyse leur a permis d’établir un modèle "normal" de l’évolution cérébrale moyenne.
Ils ont ensuite comparé ce modèle à un modèle pathologique moyen, établir à partir des IRM de 1385 personnes âgées de plus de 55 ans et touchées par la maladie d’Alzheimer, et de 1 877 témoins jeunes.
Cette analyse leur a permis de mettre en évidence une divergence précoce des modèles pathologiques par rapport à la trajectoire normale de vieillissement. En effet, deux zones du cerveau semblent s’atrophier avant même l’apparition des premiers symptômes de la maladie : l’hippocampe, impliqué dans le processus de mémoire, et l’amygdale, qui est le centre où sont régies les émotions. La modification de l’hippocampe est constatée avant l’âge de 40 ans chez les sujets malades, et vers 40 ans pour l’amygdale.
Par ailleurs, les chercheurs ont découvert que des cavités du cerveau appelées ventricules latéraux avaient tendance à s’élargir de manière précoce chez les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer, par rapport aux sujets sains dont le cerveau vieillit normalement. Ces ventricules participent à la sécrétion et à la circulation du liquide céphalorachidien dans lequel baigne le système nerveux central. Toutefois, reconnaissent les chercheurs, cette découverte présente un intérêt plus limité que l’atrophie de l’hippocampe et de l’amygdale, car elle a aussi été observée chez les sujets sains plus âgés. Leur élargissement serait donc lié au vieillissement du cerveau, et non spécifiquement à la maladie d’Alzheimer.