Alors que les naissances par fécondation in vitro (FIV) sont de plus en plus courantes, de nombreux travaux avaient jusqu’ici mis en lumière le risque supplémentaire qu’ont les enfants nés par cette procédure de développer un cancer.
Cette nouvelle étude – la plus vaste jamais menée – publiée dans JAMA Pediatrics se veut donc rassurante : selon ses auteurs, les enfants conçus par FIV présentent bien un risque légèrement supérieur de développer un cancer infantile. Toutefois, "pour les quelques cancers qui semblaient associés à la FIV, le risque absolu était encore extrêmement rare", rassure l'auteur principal de l'étude, Logan Spector de l'Université du Minnesota à Minneapolis.
Selon lui et ses collègues, ce risque accru de cancer est au moins en partie lié à l’âge maternel avancé, ainsi qu’à d’autres facteurs de santé qui poussent les femmes à essayer la FIV en premier lieu. Et s’il trouve judicieux d’être vigilants dans la surveillance des cancers chez les enfants nés par FIV, rien n’indique que cette méthode de conception doit être abandonnée. "Dans l'ensemble, ces résultats devraient être rassurants pour les parents qui ont utilisé la FIV", précise le Dr Spector.
17% de risque supplémentaire de développer un cancer
Pour analyser le lien entre FIV et cancer infantile, les chercheurs ont d’abord examiné les données portant sur 275 686 enfants conçus avec FIV et 2,27 millions d'enfants conçus naturellement entre 2004 et 2013. Ils ont suivi les enfants pendant en moyenne quatre ans et demi. Durant cette période, 321 cancers ont été détectés chez les enfants conçus par FIV et 2 042 cancers chez les autres enfants. Cela se traduit par un taux de 0,1 % chez les enfants en FIV et de 0,09 % chez les enfants de conception naturelle.
En d'autres termes, si les chercheurs suivaient un million d'enfants pendant un an, ils s'attendraient à voir un de ces rares cancers se développer chez environ 252 enfants conçus par FIV et environ 193 enfants conçus naturellement. Dans l'ensemble, les enfants conçus par FIV étaient 17 % plus susceptibles de développer un cancer que ceux conçus naturellement.
De manière plus précise, les enfants conçus à l'aide d’une FIV étaient 28 % plus susceptibles que les autres enfants de recevoir un diagnostic de tumeurs embryonnaires, qui se développent à partir de cellules embryonnaires qui restent dans le corps après la naissance. Selon les auteurs de l’étude, l’augmentation du risque de tumeurs embryonnaires s'explique principalement par un taux deux fois plus élevé de tumeurs du foie chez les enfants conçus par FIV.
Les enfants conçus par FIV étaient également 41 % plus susceptibles de développer des tumeurs embryonnaires du système nerveux central, qui surviennent lorsque des cellules embryonnaires restent dans le cerveau après la naissance. Les tumeurs dites germinales, ou tumeurs malignes des tissus reproducteurs comme les testicules ou les ovaires, étaient plus de deux fois plus fréquentes chez les enfants nés par FIV.
Une étude avec des limites
Les chercheurs rappellent qu’il s’agit d’une étude d’observation et que rien ne peut prouver dans leurs résultats que la FIV peut causer directement le cancer. Ils n’ont pas non plus comparé les résultats des couples infertiles qui ont eu recours à une FIV à ceux d'autres couples infertiles : cela rend donc difficile de voir comment les causes de l'infertilité pourraient influencer le potentiel des cancers infantiles rares.
Une piste est toutefois possible : celle selon laquelle le cancer puisse être causé par des anomalies chromosomiques. "Au fur et à mesure que les œufs vieillissent, l'instabilité chromosomique augmente", explique à l’agence Reuteurs le Dr Norbert Gleicher, directeur médical du Center for Human Reproduction à New York, et qui n’a pas participé à l’étude. Selon lui comme pour les auteurs de l’étude, les couples qui envisagent d’avoir recours à une FIV ne doivent pas s’inquiéter outre mesure et laisser ce léger risque de cancer infantile influencer leur décision.