Le Sidaction 2019 s'est déroulé le week-end dernier, l’occasion de rappeler que le combat n’est pas fini. En France, plus de 150 000 personnes vivent avec le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et ce nombre grimpe à 1,1 million aux États-Unis. Alors que l’épidémie ne faiblit plus, il devient urgent de trouver un moyen de "guérir" du VIH. En effet aujourd’hui, on ne sait que "endormir" le virus et non l’éradiquer. La thérapie antirétrovirale permet de rendre la charge virale indétectable dans le sang – cela signifie qu’on ne peut plus contaminer personne.
Mais si la thérapie antirétrovirale est, avec la PrEP, une avancée majeure dans la lutte contre le Sida, elle n’élimine pas complètement le virus et nécessite la prise quotidienne de lourds traitements. De plus, la thérapie antirétrovirale peut induire beaucoup d’effets secondaires : des problèmes gastro-intestinaux, cardiovasculaires, une résistance à l'insuline et des saignements, ainsi que des effets sur les os, la santé du foie, la santé neurologique et psychiatrique. Les scientifiques cherchent donc aujourd’hui un moyen de supprimer définitivement le virus chez ces personnes à la charge virale indétectable.
De nouvelles recherches pourraient faire avancer cela : des chercheurs ont réussi, grâce à des cellules immunitaires, à supprimer le virus latent du VIH dans le sang de personnes sous thérapie antivirale. Les résultats pourraient aider à développer un vaccin contre le VIH et sont publiés dans la revue EBioMedicine.
La difficulté de trouver un vaccin contre le VIH
Si nous n'avons pas encore trouvé de vaccin contre le VIH, c’est les scientifiques se heurtent à deux problèmes majeurs : le virus se décline en plusieurs formes différentes et n’engendre pas assez d’anticorps. Pour mener cette nouvelle recherche, ils se sont donc concentrés sur le virus VIH1 (de type 1). Première étape : réussir à identifier les cellules infectées par le virus. "De nombreux scientifiques tentent de développer un traitement curatif contre le VIH, généralement basé sur le principe du 'kick and kill' – soit sortez le virus de sa cachette, puis éliminez-le", explique Robbie Mailliard, professeure en maladies infectieuses et microbiologie en Pennsylvanie. "Des traitements prometteurs sont en cours de développement, mais le plus compliqué est de trouver quelles cellules contiennent le VIH, pour ainsi trouver lesquelles éliminer." Dans le cas du VIH, le virus devient latent en se cachant dans l'ADN des cellules lymphocyte T.
Pour savoir précisément quelles cellules hébergent le VIH, l’équipe a donc décidé d’examiner un autre virus présentant un comportement similaire, qui affecte 95% des personnes vivant avec le VIH : le cytomégalovirus (CMV). "Le système immunitaire passe beaucoup de temps à contrôler le CMV", explique Charles Rinaldo, co-auteur de l'étude, président du département des maladies infectieuses et de la microbiologie de l'Université de Pittsburgh. "Chez certaines personnes, un lymphocyte T sur cinq est spécifique à ce virus", ajoute-il. "Cela nous a fait réfléchir. Peut-être que ces cellules spécifiques à la lutte contre le CMV (cytomégalovirus) constituent également une grande partie du réservoir latent de VIH", estime le scientifique. "Nous avons donc conçu notre immunothérapie pour non seulement cibler le VIH, mais également pour activer les cellules T auxiliaires spécifiques du CMV."
Inciter les cellules à dévoiler le virus avant de le détruire
Ainsi, les chercheurs ont prélevé du sang chez une vingtaine de participants séropositifs sous traitement antirétroviral, afin de trouver des cellules T infectées de manière latente par le VIH. Ils ont également isolé un autre type de cellules immunitaires appelées cellules dendritiques : ce sont elles qui indiquent aux autres cellules immunitaires où aller et quoi combattre. Dans les précédentes études, ils avaient utilisé ces cellules pour "forcer" le système immunitaire à tuer le VIH. Dans celle-ci, Robbie Mailliard et son équipe les ont utilisées pour faire sortir le VIH latent de sa cachette (les lymphocyte T).
Des prochaines recherches menées sur l'homme
Et les résultats sont très encourageants : le virus a effectivement dû se dévoiler, se rendant vulnérable et facile à tuer. "Sans ajouter aucun autre médicament ou traitement," explique Robbie Mailliard. "Les MDC1 ont ensuite été en mesure de recruter des lymphocytes T tueurs pour éliminer les cellules infectées par le virus. À notre connaissance, il s'agit de la première étude à programmer les cellules dendritiques pour qu'elles intègrent le CMV afin de trouver les cellules touchées par le VIH, de faire sortir le virus et de le tuer". La chercheuse et ses collègues essaient maintenant de tester l'efficacité de MDC1 sur l'homme.