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Accident médical

Grenoble : suspension de 18 mois pour un chirurgien mis en cause dans 54 dossiers

Spécialisé dans les opérations du dos, un chirurgien de Grenoble va être suspendu durant 18 mois sur décision de l'Ordre des médecins. L'Assurance maladie a recensé 54 dossiers dans lesquels il pourrait être mis en cause. L'avocat du praticien évoque un "acharnement". 

Grenoble : suspension de 18 mois pour un chirurgien mis en cause dans 54 dossiers ShutterOK/iStock




Opéré il y a une dizaine d'années pour un problème de douleur dorsale, Christophe Fuselier, ancien chauffeur routier, se déplace aujourd'hui en chaise roulante. Sa veine iliaque, qui draine les jambes et le petit bassin, a été sectionnée accidentellement durant l'intervention. Résultat, une hémorragie importante, un manque d'irrigation de sa jambe et des opérations répétées suite à une multiplication d'infections post-chirurgicales. "Pendant 10 ans, cela m'obligeait à retourner pratiquement tous les mois à l'hôpital", raconte-t-il. Finalement, il a dû être amputé d'une jambe.

En janvier 2019, le conseil de l'Ordre des médecins a décidé de suspendre de ses fonctions le chirurgien mis en cause à compter du 1er mai, rapporte 20 Minutes. Une décision qui fait suite, au-delà de la plainte déposée par Christophe Fuselier, à une enquête diligentée par l'Assurance Maladie qui a permis de recenser 54 dossiers portant sur les années 2013 et 2014 dans lesquels des patients auraient été opérés "sans justification médicale".

"On ne peut pas opérer des gens en faisant n'importe quoi"

"Au départ, je pensais que j'étais le seul. Mais après 53 autres cas, on n'est plus dans l'erreur humaine. Ce n'est pas normal, on ne peut pas opérer des gens en faisant n'importe quoi", accuse aujourd'hui la victime. Une autre patiente pointe la responsabilité du chirurgien grenoblois. "En 2015, on m'a diagnostiqué aux urgences une fracture spontanée d'une vertèbre. J'ai été opérée dès le lendemain sans avoir signé aucune décharge, raconte Gracieuse Masciave. Pourtant, je souffre d'ostéoporose et je n'étais donc pas opérable". Elle est aujourd'hui obligée de porter un corset quatre heures par jour à la suite d'une autre fracture liée à la première intervention. "Je suis handicapée pour le restant de mes jours", affirme-t-elle.

"On fait passer mon client pour le boucher de Grenoble"

"On fait passer mon client pour le boucher de Grenoble et on foule des deux pieds la présomption d'innocence", réplique Bernard Boulloud, l'avocat du chirurgien visé par la suspension décidée par le conseil de l'Ordre. "Le rapport de la CPAM reproche à mon client un manque de qualité des soins, un manque d'information préalable suffisante, une absence de qualité dans le suivi opératoire, mais on ne parle pas d'erreur médicale", ajoute-t-il en dénonçant un "acharnement" dont serait victime le praticien. Il compte saisir le conseil d'Etat pour contester la décision de suspension visant son client et porter plainte contre X pour dénoncer un "lynchage médiatique".

Risque plus élevé de mise en cause pour les chirurgiens orthopédiques 

Selon les chiffres dont dispose la MACSF, mutuelle d'assurance des professionnels de santé qui compte 145 000 sociétaires, les chirurgiens orthopédiques et les neurochirurgiens sont deux spécialités pour lesquelles le risque de mise en cause à la suite de ce que la profession nomme des "événements indésirables" est le plus élevé. "C'est toujours un drame pour le patient, mais aussi pour le médecin qui aime autant se retrouver à la barre d'un tribunal qu'un magistrat dans un lit d'hôpital !", déclarait Nicolas Gombault, directeur général de la MACSF, lors de l'émission Univers Médecins du syndicat CSMF, diffusée sur son site le 21 octobre 2018. 

La prévention de ces événements et des éventuelles suites judiciaires a été l'objet de plusieurs textes législatifs visant à éviter une "dérive à l'américaine" en matière de judiciarisation de l'exercice médical. Le patient peut saisir un juge civil, un juge pénal, le conseil de l'Ordre des médecins, ou l'Assurance Maladie. Depuis la loi dite "Kouchner" (du nom du ministre de la Santé de l'époque) adoptée en 2002, des Commissions de conciliation et d'indemnisation ont été créées pour éviter les contentieux.

"Les trois quarts des dossiers sont aujourd'hui réglés avant le juge", précise Laure Soulier, avocate spécialiste des affaires liées à la santé au cabinet parisien Auber. 

"Expliquer avant l'acte et gérer les suites avec humanité"

"Ce qui relève de la bonne pratique médicale, c'est d'expliquer avant l'acte, d'en exposer les risques et, si un accident se produit, de rester en contact avec le patient pour gérer les suites avec humanité", rappelait Nicolas Gombault dans l'émission de la CSMF du 21 octobre 2018. C'est le non-respect de cette obligation d'information et de suivi que pointe le rapport de l'Assurance Maladie dans le cas du chirurgien de Grenoble.

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