C’est une nouvelle prometteuse pour les enfants atteints d’une tumeur rare du tronc cérébral qu’offrent les scientifiques de l’Institute of Cancer Research de Londres. Aidés d’une équipe internationale de chercheurs, ces derniers viennent de découvrir une nouvelle classe de médicaments capables de tuer les cellules cancéreuses du cerveau dues à une mutation génétique : le gliome pontique intrinsèque diffus. Leurs travaux viennent d’être publiés dans la revue Communications Biology.
Une mutation du gène ACVR1 en cause
Touchant majoritairement les enfants, ce gliome pontique intrinsèque diffus, aussi appelé gliome infiltrant du tronc cérébral (GITC), est une tumeur maligne se trouvant au niveau du tronc cérébral. Infiltrant, inopérable, dangereusement localisé et agressif, il est aujourd’hui fatal dans l'immense majorité des cas.
En cause : une mutation du gène ACVR1, également responsable de la fibrodysplasie ossifiante progressive (FOP). Plus connue sous l’appellation "syndrome de l’homme de pierre", il s’agit d’une maladie génétique orpheline très rare. Les personnes qui en souffrent voient leurs muscles et tendons s’ossifier progressivement.
Mais cela pourrait bientôt changer. En effet, les chercheurs sont parvenus à développer des médicaments inhibiteurs de l’ACVR1. Ces derniers ciblent la molécule de protéine produite par des versions mutées du gène ACVR1 que l'on trouve dans le gliome pontique intrinsèque diffus.
En 2014, des scientifiques de l'Institute of Cancer (IC) ont découvert que des mutations ACVR1 se produisent dans un quart des tumeurs GITC et ont depuis travaillé sur des médicaments qui les ciblent. À la suite de cette découverte, les équipes du Consortium de génomique structurelle d'Oxford et de l'IC ont créé une nouvelle série de molécules qui ciblent les formes mutantes de l'ACVR1.
Une réduction des tumeurs chez les souris
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont testé 11 médicaments prototypes ayant une activité anti-ACVR1. Deux d’entre eux se sont avérés particulièrement efficaces pour bloquer les signaux envoyés par l'ACVR1 et tuer les cellules mutantes de l'ACVR1, tout en ayant très peu d'effet sur les cellules saines du cerveau.
Pour les tester, les chercheurs ont transplanté des tumeurs GITC humaines chez des souris et ont découvert qu’ils avaient mis fin à l'activité de l'ACVR1, réduit les tumeurs et augmenté la survie de 25 % (soit de 67 à 82 jours).
En examinant les cellules en laboratoire, ils ont aussi constaté que les cellules mutantes de l'ACVR1 répondent de façon inappropriée à une molécule appelée activine A - qui est présente à des niveaux élevés pendant le développement du cerveau - provoquant une cascade d'événements qui déclenche la croissance tumorale. Cette situation est similaire à celle qui se produit pour le syndrome de l’homme de pierre : les niveaux élevés d'activine A entraînent une inflammation des muscles et la formation de tissu osseux chez les personnes nées avec une mutation ACVR1.
Les premiers essais cliniques sur des enfants dès 2021
Pour les chercheurs à l’origine de cette découverte, c’est un pas gigantesque qui vient d’être franchi. En effet, aucun nouveau médicament n’a été homologué pour traiter le cancer du cerveau chez les adultes et les enfants depuis 20 ans. "Il s'agit d'une étude importante qui illustre parfaitement comment l'acquisition d'une compréhension détaillée de la biologie des cancers peut nous permettre de passer très rapidement à la découverte de nouveaux traitements - dans ce cas-ci à un type rare et dévastateur de cancer du cerveau chez les enfants", a déclaré professeur Paul Workman, directeur général de l'Institute of Cancer Research de Londres.
La société pharmaceutique M4K (Medicines for Kids) vient de lancer le développement de ces médicaments inhibiteurs de l’ACVR1. Quant aux essais cliniques, ils devraient commencer dès 2021 chez les enfants atteints de cancer du cerveau.