Plus de 17 millions d’européens souffrent d’une allergie alimentaire. Autrement dit, c’est le cas de plus d’un enfant scolarisé sur quatre. Et ces chiffres sont en nette augmentation, si l’on en croit les experts présents au Congrès mondial sur les allergies qui se tient du 22 au 26 juin à Milan. En effet, selon des données collectées en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, le nombre des admissions pour cause d’anaphylaxie (grave, parfois réaction allergique mortelle) ont été multipliées par sept sur les dix dernières années. En outre, la France fait partie des pays européens les plus touchés, avec 3,5% de sa population concernée contre 2% seulement au Royaume-Uni ou 1,6% au Danemark. Bien sûr, les allergies alimentaires ne provoquent pas toujours cette réaction gravissime qu’est l’anaphylaxie. Bien souvent, les manifestations se limitent à de l’urticaire, un écoulement nasal ou encore de la diarrhée. Pour l’Académie Européenne d’Allergie et d’Immunologie Clinique (EAACI), organisatrice du congrès, la prévalence des allergies alimentaires est telle que cela justifie malgré tout pleinement la publication des premières recommandations européennes pour les personnes souffrant d’allergies alimentaires.
Allergique alimentaire avant la naissance
Pour prévenir l’apparition d’une allergie alimentaire, l’Académie Européenne d’Allergie et d’Immunologie Clinique (EAACI) recommande tout d’abord un allaitement maternel exclusif, au moins jusqu’aux 4 mois de l’enfant. « Voire même jusqu’à six mois, ajoute le Pr Antonella Muraro, secrétaire général de l’EAACI. Et c’est valable pour tous les enfants ». Quant à ceux qui sont à risques, les experts européens conseillent de recourir à des laits hypoallergéniques quand la mère ne peut pas allaiter. Une fois que le sevrage a commencé, l’éviction d’aliments potentiellement allergéniques n’a en revanche pas fait la preuve de son efficacité.
Malheureusement, les choses sont peut-être déjà jouées avant la grossesse. En effet, selon une étude menée par des chercheurs australiens présentée le 22 juin à Milan en Italie, des facteurs environnementaux prénataux peuvent provoquer une prédisposition aux allergies alimentaires, et non seulement les seuls facteurs génétiques. L'étude a montré que des nourrissons peuvent en effet naître avec une tendance à développer des allergies alimentaires en raison de facteurs environnementaux durant la grossesse.
Manque cruel d'allergologues
Les raisons précises de cette prédisposition restent encore mystérieuses. De même que l’explosion du nombre de personnes touchées par les allergies alimentaires. « C’est multifactoriel, lâche Antonella Muraro. On le doit probablement à des changements dans notre mode de vie : les mères qui fument, le manque d’antioxydants dans l’alimentation, le peu d’aération dans les logements… Mais, il faudrait vraiment développer la recherche pour le savoir », clame-t-elle. La recherche sur les traitements manque elle aussi un peu de carburant. Si l’immunothérapie a fait ses preuves dans l’allergie au pollen par exemple, ce n’est pas le cas dans les allergies alimentaires. Des essais sur un grand nombre de patients doivent être menés.
Lors de ce Congrès mondial sur les allergies, les experts ont aussi voulu montrer le fossé qu’il y avait entre le nombre de personnes touchées et le peu d’investissement dans cette discipline. « Nous manquons cruellement d’allergologues. Cette spécialité n’est pas valorisée. Du cop, les jeunes ne sont pas attirés, regrette la secrétaire générale de l’Académie Européenne d’Allergie et d’Immunologie Clinique. « En France, par exemple, ajoute-t-elle, l’allergologie n’est pas une spécialité à part entière, alors que c’est le cas en Espagne et en Italie ».