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Big Data

Diagnostiquer des maladies en observant les profils Facebook de certaines personnes

Par Raphaëlle de Tappie

En analysant les publications Facebook des milliers de personnes qui participaient à leur étude, des chercheurs ont réussi à diagnostiquer 21 catégories de conditions médicales différentes. 

hocus-focus/iStock

Les scientifiques s’intéressent de plus en plus à nos réseaux sociaux. En effet, nos comptes Twitter, Facebook et Instagram en disent bien plus sur notre état mental et physique que l’on pourrait le penser de prime abord. Preuve en est, d’après une nouvelle étude américaine parue lundi 17 juin dans la revue PLOS Onedes chercheurs ont réussi à prédire 21 catégories de conditions médicales rien qu’en analysant des profils Facebook.

Dans le détail, les chercheurs ont analysé 949 530 actualisations de statuts Facebook chez 900 volontaires dont les publications dépassaient les 500 mots. Ils ont identifié le langage susceptible d’indiquer des comportements symptomatiques de certaines conditions médicales. Par exemple, les publications contenant les mots "verres", "saoul" ou "bouteille" étaient associées à un abus d’alcool.

Toutefois, certains liens n’étaient pas aussi évidents. Ainsi, les gens qui mentionnaient la religion le plus souvent dans leurs posts avaient 15 fois plus de risque de développer du diabète que les autres. Autre observation intéressante : les mots exprimant de l’hostilité étaient souvent des indicateurs d’abus de drogues, indiquent les chercheurs. 

Un langage digital très puissant

"La personnalité des gens, leur état mental et leur hygiène de vie se reflètent dans leurs réseaux sociaux et ont un impact très important sur la santé", note l’étude. "Notre langage digital capture des aspects puissants de nos vies dans des formes très différentes de ce qui est reflété dans les données médicales classiques", précise Andrew Schwartz, l’un des auteurs du papier.  

L’année dernière, grâce à des analyses de posts Facebook, cette même équipe de chercheurs avait déjà réussi à diagnostiquer des dépressions jusqu’à trois mois avant le diagnostic de médecins en clinique. 

Il y a quelques semaines, une étude similaire a été publiée. Dans cette dernière, les chercheurs s’étaient cette fois intéressés aux images publiées sur Twitter pour repérer des signes de dépression. D’après eux, les utilisateurs dépressifs auraient tendance à poster plus de photos d’eux seuls et des images aux couleurs moins vives que les autres. 

Se servir des données informatiques des patients pour mieux les suivre médicalement ?

Ainsi, à terme, les réseaux sociaux pourraient aider les professionnels de santé à mieux suivre leurs patients. "Par exemple, si quelqu’un essaye de perdre du poids et a besoin d’aide pour comprendre l’impact de ses choix alimentaires, avoir un nutritionniste qui passe au crible ses comptes internet pourrait lui permettre d’avoir plus d’informations sur sa vie quotidienne afin de mieux l’aider", explique Raina Merchant qui a mené l’étude publiée lundi sur les publications Facebook.  

Plus tard dans l’année, son équipe devrait conduire une étude plus large où elle demandera aux participants de partager directement leurs réseaux sociaux avec un professionnel de santé. Cela permettra de vérifier si l'usage de ces outils est bien efficace, mais aussi de constater combien de patients seront d’accord pour partager toutes leurs informations dans le cadre d’un suivi médical. Par ailleurs, "un des obstacles est qu’il y a énormément de données et que nous ne sommes pas entraînés pour les analyser ou prendre des décisions cliniques en résultant", concède Merchant.

Enfin, autre interrogation de taille sur l’utilisation de données informatiques dans la médecine : celle de l’intimité des utilisateurs. En effet, "le pouvoir du langage des réseaux sociaux pour améliorer les diagnostics soulèvent des questions sur la sécurité des patients et l’appartenance des données", notent les chercheurs.

Rappelons que ces dernières années, Facebook s’est plusieurs fois fait épingler pour avoir divulgué les informations privées de ses utilisateurs. En 2018, le réseau social a gagné 56 milliards de dollars en se servant des données de ses internautes pour vendre des publicités ciblées.