Fin juin, la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé (HAS) s'est officiellement prononcée en faveur du dérembourement de l’homéopathie.
Après avoir analysé plus de 1000 publications scientifiques, les contributions des parties-prenantes ainsi que les documents et dossiers déposés par les trois fabricants (le laboratoire français Boiron, leader mondial du marché, le suisse Weleda et l’allemand Lehning), elle a jugé l'efficacité de l'homéopathie "insuffisante pour justifier d'un remboursement". Bien que la décision finale revienne au ministère de la Santé, Agnès Buzyn qui avait affirmé qu'elle suivrait l'avis de la HAS, ne s'est pas encore exprimée sur le sujet, considérant la canicule comme une "priorité".
L'Ordre des médecins doit trancher
En octobre, ce sera au tour de l'Ordre des médecins (Cnom) de trancher sur la reconnaissance de la profession. En "séance pleinière", l'Ordre se réunira pour "délibérer et prendre une décision" sur le fait d'autoriser ou non les praticiens à conserver la mention de "spécialité" sur leur plaque, a annoncé son président le Dr Patrick Bouet. L'instance pourra "soit (le) prolonger, soit (le) supprimer", mais les médecins pourront continuer à pratiquer, les "droits acquis" étant protégés par la loi.
Pour être clair, "si le droit au titre était supprimé, ça voudrait dire que la mention homéopathie ne serait plus reconnue" par l’Ordre des médecins. Selon le Syndicat National des Médecins Homéopathes Français (SNMHF), la France compterait 5000 homéopathes parmi nos 60 000 médecins généralistes. L'Ordre veut également connaître "la position de l’université quant à la délivrance d’un enseignement et d’un diplôme", ce qui ne devrait pas être difficile à sonder.
La fin de son enseignement à la fac ?
En effet, le Collège national des généralistes enseignant (CNGE) à l'université, a publié une lettre ouverte adressée à la ministre de la Santé Agnès Buzyn ce vendredi pour demander à ce que l'homéopathie ne soit plus enseignée en fac de médecine. "L’absence de tout modèle théorique sur lequel pourrait reposer l’homéopathie, invention datant du 18e siècle, l’absurdité des contenus de la 'médecine homéopathique', des indications comme des thérapeutiques, devrait imposer de protéger les étudiants contre ces déviances pseudo scientifiques", fait-il valoir. Le Collège national estime ainsi que les enseignements dispensés véhiculent "des aberrations grossières aux antipodes de la démarche scientifique", qu'il faut "protéger" les étudiants et les patients.
L'avis des Français
Qu'en pensent les Français ? Selon un sondage Pourquoi Docteur, plus de 71,5% d'entre eux sont opposés à son déremboursement, estimant que les traitements homéopathiques sont "efficaces", "naturels", "peu couteux", "sans danger" ni "effets secondaires". L'homéopathie est "moins toxique" que les "produits issus de la pétrochimie-chimie et beaucoup moins onéreux, c'est un non sens de s'y attaquer", a déclaré l'un de nos répondants sous couvert d'anonymat.
L'homéopathie "coûte moins cher à la sécu que les spécialités des groupes pharmaceutiques". Mais combien coûte-t-elle précisément ? En 2016, 129 001 456 boîtes de granules, solutions liquides et autres produits homéopathiques ont été remboursés, soit un coût de 56 millions d’euros sur un total de 19 milliards de remboursements. L'homéopathie représente donc environ 0,29% des remboursements de médicaments effectués par la sécurité sociale chaque année.
"S'il n'y a plus d'homéopathie, on va tous se rabattre sur l'allopathie (médecine traditionnelle, NDLR) qui coûte bien plus cher et entraîne souvent des effets secondaires", nous explique un répondant. Et une autre de préciser : "je suis moi-même utilisatrice, je ne pourrais plus me le permettre si le médicament n'est plus remboursé". Pour la majorité de nos lecteurs, dérembourser l'homéopathie "serait une hérésie".