A l’heure de #Metoo, le consentement des femmes est au coeur de l’actualité mondiale. Dans un monde toujours dominé par le masculin, on parle de plus en plus du désir féminin, plus subtil, plus cérébral, disent les experts. Aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) vient d'autoriser un nouveau traitement pour booster la libido des femmes qui en auraient besoin, du nom de Vyleesi. Pourtant, bien que le sujet soit très peu abordé, les hommes non plus n’ont pas toujours envie. S’il s’agit de simples baisses de désir ponctuelles pour certains, d’autres ne sont pas du tout portés sur la chose, ce qui dépasse très souvent leur partenaire, élevée avec l’idée reçue que les hommes "n’ont que ça en tête".
Ainsi, selon une étude Ifop réalisée cette année, 47% des Français ont déjà manqué de désir sexuel, dont 18% au cours de l’année écoulée. Par ailleurs, 57% d’entre eux ont déjà connu des érections manquant de fermeté et 29% n’ont pas réussi à avoir d’érection du tout. "Parmi les variables lourdes jouant sur ce type de troubles, on retrouve naturellement l’âge, le stress ou le lieu de résidence : les hommes habitant en agglomération parisienne y sont nettement plus sujets (46%) que les ruraux (36%). Mais pour la première fois en France, l’étude montre aussi l’impact que la dépendance aux écrans peut avoir sur la libido masculine", note l’Ifop.
Ainsi, les jeunes ne sont pas les plus actifs sexuellement puisque la proportion de victimes du troubles du désir ou de l’érection est bien supérieure à la moyenne chez les moins de 35 ans. Sont surtout concernés ceux qui visionnent quotidiennement des vidéos pornographiques (55%), les réseaux sociaux (39%) ou des films et des séries en continu sur des plateformes telles que Netflix (38%).
Un homme sur trois a déjà inventé une excuse pour éviter un rapport sexuel
Et sans surprise, un homme aux dix est complexé par ces manquements physiques. Au lieu de dire à sa compagne qu’il n’avait pas envie de faire l’amour, un homme sur trois (33%) a déjà inventé une excuse, la fatigue en tête (78%). Très discrets sur le sujet, les hommes présentant une dysfonction érectile se refusent souvent à consulter un professionnel de santé (seuls 26% ont franchi le pas). Pour se motiver, ils préfèrent trouver des alternatives à court terme. Ainsi, 43% ont recours à la pornographie tandis que certains vont aller jusqu’à adopter des comportements à risque. Ainsi, 21% d’entre eux ont recours aux médicaments, 16% à l’alcool et 9% à la drogue.
Mais au-delà d’un trouble érectile ponctuel, 1 à 15% de la population masculine souffrirait d’un désir sexuel diminué, voir absent. Les scientifiques parlent alors de désir sexuel hypoactif. Et contrairement aux problèmes d’érection faciles à identifier et à traiter, ces pannes de libido à long terme ne répondent que partiellement aux administrations de testostérone et même aux psychothérapies. Afin d’y voir plus clair sur ce mal encore si méconnu, des chercheurs français ont mené une étude sur le sujet l’année dernière.
Reprenant des travaux précédents où ils avaient découvert que l'excitation sexuelle masculine était gouvernée par des zones cérébrales du nom de claustrum, putamen et cortex cingulaire antérieur, ils ont comparé l’activité cérébrale de sept hommes souffrant de désir sexuel hypoactif à celle de huit hommes "sains" face à des images coquines. Pour ce faire, ils ont utilisé une méthode mesurant le flux sanguin dans différentes régions du cerveau. Chez les hommes portés sur le sexe, les chercheurs ont observé une baisse d’activité d’une partie cortex orbito-frontal gauche tandis que les autres ne présentaient aucune différence : l’activité état maintenue tout du long dans cette zone.
Des femmes peu habituées à être rejetées physiquement
Le problème résiderait donc dans cette absence de levée d’inhibition exercée dans cette zone du cerveau, explique l’étude. A terme, la mise en évidence de ce bloquage pourrait donc "donner des pistes de travail avec ces patients pour mieux identifier et moduler le versant psychologique des inhibitions liées au désir sexuel hypoactif" aux psychothérapeutes, concluent les chercheurs.
En attendant, en l’absence de traitement ou de thérapies constructives sur le sujet, l’absence de libido d’un amant peut avoir des conséquences désastreuses sur son couple ou dans ses relations avec ses partenaires. Peu habituée au rejet, la femme, que l’on éduque dans l’idée que ce sera toujours à elle de se refuser, aura tendance à prendre ce manque de libido personnellement. "Tu n’as pas envie de moi car je ne suis pas désirable", "tu ne m’aimes plus", "tu n’es pas normal", pourra-t-elle alors lancer, vexée, à l’homme qui, sous pression, refusera encore moins d’adresser le problème et se renfermera à chaque fois un peu plus. Car outre l’égo féminin blessé, le mâle remis en cause dans sa sexualité n’a plus l’impression d’être un "homme, un vrai".
Mais si dans la grande majorité des cas, les vexations des femmes ne se manifestent que par des pics verbaux, il arrive que certaines aillent à l’encontre de la volonté de leur partenaire, en profitant par exemple d’états d’ivresse. Malgré la difficulté de porter plainte, la loi votée en 2018 à l’initiative de la secrétaire d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, permet de qualifier de viol une fellation reçue de force ou une pénétration donnée sous la contrainte, l’érection et l’éjaculation n’étant pas des marqueurs de consentement. Rappelons qu’en France, d’après une enquête réalisée en 2006, un homme sur vingt a déjà subi un viol ou une tentative, la moitié avant leur 11 ans.