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Médicaments

La chasse aux effets indésirables

Par Cécile Coumau

Erreur d'utilisation, automédication, les effets indésirables de médicaments engendrent 143 000 hospitalisations par an. L'Afssaps réagit en s'appuyant sur les médecins.

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Près de 1 480 000 journées d'hospitalisation par an sont dues aux effets indésirables de médicaments. Et 48 % d'entre elles seraient évitables. C'est ce qu'il ressort de la dernière enquête menée en 2007 par les centres régionaux de pharmacovigilivance (CRPV). Sous la houlette de l'Agence française de sécurité sanitaire (Afssaps), les CRPV se sont penchés sur les hospitalisations de 62 services de médecine, représentatifs de l'ensemble des hôpitaux publics. « Sur les 2692 malades, 97 cas ont été attribués à un problème de iatrogénie médicamenteuse, soit un taux d'incidence de 3,6 % », explique le Dr Françoise Haramburu qui a coordonnée l'étude transversale (EMIR) et responsable du CRPV de Bordeaux. Ce qui représente 143 000 hospitalisations par an si on extrapole ce chiffre à l'échelle nationale.

« Ces résultats sont très proches de la dernière étude réalisée en 1998, où le pourcentage d'hospitalisations s'élevait à 3,19 % », rappelle Jean Marimbert, le directeur général de l'Afssaps. D'après l'enquête, les effets indésirables sont en premier lieu des affections vasculaires (20,6 % des cas dont des hémorragies), des affections neurologiques (11,3 %), et des atteintes gastro-intestinales (9,3 %). Les hospitalisations ont duré en moyenne un peu plus de 10 jours. Quels sont les patients touchés ? Ce sont des personnes âgées. L'âge moyen des patients hospitalisés est de 62 ans, mais lorsque les malades dépassent les 75 ans, le taux d'incidence est de 5,5 %. « Les malades hospitalisés pour effets indésirables ont en moyenne dix ans de plus que ceux hospitalisés pour un autre motif », constate le Dr Haramburu. 167 médicaments ont été considérés comme la cause possible des 97 hospitalisations, certains par erreur d'emploi ou d'administration.
« Nous avons relevé comme le cas d'une femme de 32 ans qui prenait 3 benzodiazépines par jour, et qui a décidé d'arrêter brutalement, témoigne la coordinatrice de l'enquête EMIR. Le lendemain, elle est hospitalisée pour convulsions et syndrome de sevrage. Cet exemple fait partie des six erreurs d'automédication que nous avons constatées. Mais nous avons aussi relevé deux hospitalisations dues à une erreur de prescription. »

L'étude EMIR montre que les anticoagulants antivitamine K (AVK) sont à l'origine de 12 % des hospitalisations. Les diurétiques arrivent en deuxième position avec un taux d'incidence de 0,41 %. Les anticancéreux ont un taux d'incidence plus faible (0,33 %). Concernant les médicaments AVK, l'Afssaps se mobilise de nouveau. Ces médicaments étaient déjà les premiers responsables d'effets indésirables dans l'étude de 1998 (13 %). « Faut-il considérer que nos actions de prévention ont été vaines ? ", s'interroge Anne Castot, responsable de la surveillance du risque et de l'information sur les médicaments à l'Afssaps.
En effet, en 2001 et 2004, l'Afssaps avait mené une campagne d'information auprès des patients et des professionnels de santé. « Il ne faut pas aller trop vite dans les conclusions. Le nombre total de boîtes et de doses administrées a doublé entre 1996 et 2007, précise Anne Castot. Et le nombre de patients traités antivitamine K est passé de 500 000 à 900 000, ce qui représente 1 % de la population française ». L'Afssaps relance en 2008 une campagne d'information sur le bon usage des AVK, notamment auprès des généralistes. De nouveaux documents d'information leur seront envoyés prochainement. En outre, l'Afssaps veut renforcer l'utilisation d'un carnet qui permet au patient de surveiller l'action de l'AVK sur la fluidité de son sang (indice NIR). « Il a été mis au point en 2004, explique Bernard Delorme, responsable de l'unité information des patients à l'Afssaps. Actuellement, on estime que 250 000 carnets sont utilisés. Nous allons en envoyer de nouveaux qui seront distribués par les médecins prescripteurs ».  

Questions à Anne Castot, responsable de la surveillance des risques (AFSSAPS)

Une étude tous les 5 ans

 

 

Les résultats obtenus sont-ils les mêmes que ceux de 1998 ?
Anne Castot
. Les anticoagulants antivitamines K restent les premiers pourvoyeurs d'effets indésirables. C'était le cas en 1998. Mais cette année, les résultats font apparaître un petit nouveau dans le top 10 des médicaments responsables d'hospitalisations. Il s'agit des diurétiques.

Comment expliquer cela ?
A. C
. Un certain nombre de facteurs sont à prendre en compte. D'abord, le vieillissement global de la population française. Les diurétiques sont des médicaments essentiellement prescrits à des personnes plutôt âgées qui ont des problèmes cardiovasculaires. Ensuite, cela peut aussi s'expliquer par les modifications de pratiques et de prise en charge des patients. Il ne faut pas oublier que nous avons mis sur le marché des médicaments beaucoup plus puissants.

Quelles mesures allez-vous prendre ?
A. C.
Nous allons notamment lancer une campagne de bon usage des diurétiques. Mais d'une manière plus générale,  nous allons renforcer la surveillance en renouvelant plus fréquement l'étude sur les hospitalisations dues aux effets indésirables des médicaments. Au lieu d'attendre 10 ans, nous la renouvelerons d'ici 5 ans. Afin de suivre au mieux les évolutions.