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Antibiorésistance

E. coli : des souches de superbactéries persistent dans l’intestin de femmes en bonne santé

Par Charlotte Arce

Une récente étude portant sur 1 000 femmes a montré que 9% d’entre elles portaient des souches multirésistantes d’E. coli dans leurs intestins et ce, sans présenter aucun symptôme.

spukkato/iStock

Alors que la résistance bactérienne aux antibiotiques constituera un défi majeur pour la recherche scientifique dans les années à venir, de nouveaux travaux portant sur des souches de superbactéries E. coli présentent des conclusions préoccupantes.

Publiée dans la revue Clinical Infectious Diseases de l'Oxford University Press et portant sur 1 000 femmes, l'étude montre que près de 9% d’entre elles portaient des souches d’E. coli multirésistantes aux antibiotiques dans leurs intestins.

Des bactéries virulentes mais asymptomatiques

Les bactéries Escherichia coli (E. coli) sont des agents pathogènes responsables d'infections des voies urinaires, de pneumonies et de gastro-entérites. Elles peuvent se transmettre du tube digestif à l'appareil urinaire féminin par l'urètre, et infecter la vessie.

La plupart des E. coli pathogènes trouvés dans les échantillons d’urine appartenaient à des groupes clonaux pandémiques multirésistants ST131-H30R ou ST1193, connus pour causer la majorité des infections des voies urinaires et de la circulation sanguine. Ces deux groupes multirésistants ont été détectés deux fois plus souvent dans l'urine de personnes qui avaient ces souches spécifiques dans l'intestin, comparativement à d'autres souches d'E. coli en général.

Trois mois après ces premiers résultats, les participantes ont à nouveau fourni des échantillons d’urine. Il s’est avéré que parmi les 45 porteuses des souches multirésistantes et jusqu’ici asymptomatiques, 7% avaient développé des infections urinaires.

"Les deux souches pathogènes d'E. coli résistantes aux fluoroquinolones (des antibiotiques prescrits contre les infections urinaires, ndlr) qui se trouvent dans les échantillons cliniques sont des colonisateurs intestinaux supérieurs et ont tendance à y persister", notent les chercheurs. "Ils peuvent aussi se manifester, à un taux anormalement élevé, dans l'urine de femmes en bonne santé qui n'avaient pas de diagnostic d'infection des voies urinaires au moment de l'analyse des échantillons. Les deux phénomènes semblent liés."

Mieux détecter les souches multirésistantes

Selon Evgeni V. Sokurenko, professeur de microbiologie à la faculté de médecine de l'Université de Washington, ces résultats pourraient avoir plusieurs implications sur les soins cliniques et le contrôle des infections car ils suggèrent que ces souches spécifiques multirésistantes peuvent avoir une durée de vie dans l’intestin plus longue que d’autres souches. Ces "super bactéries" peuvent aussi être détectées dans l’urine de femmes sans causer de brûlure ou d’autre signe d’infection bactérienne. 

Pour le Pr Sokurenko, ces résultats montrent donc la nécessité de mieux détecter les souches pharmacorésistantes dans l’urine et ce, même en l’absence de symptômes cliniques afin d’éviter tout risque de maladie bactérienne difficile à traiter.