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Espoir

Crise des opioïdes : un appareil pour détecter les overdoses

Par Raphaëlle de Tappie

Des chercheurs américains sont en train de mettre au point un appareil capable de détecter les overdoses et de délivrer automatiquement un médicament laissant le temps aux secours d'emmener le toxicomane à l'hôpital.

Capture d'écran/YouTube@Purdue Engineering

Aux Etats-Unis, pays ravagé par la crise des opioïdes, 130 personnes meurent d’une surdose tous les jours. Au total, depuis le début des années 2000, 300 000 Américains sont décédés des suites d'une overdose. Car quand cette dernière survient, les toxicomanes sont souvent seuls et dans l’incapacité de réagir. C’est pourquoi, des chercheurs de l’Université Purdue dans l'Indiana (Etats-Unis) sont en train de développer un appareil qui détecterait l’overdose immédiatement et relâcherait de la naloxone, un médicament connu pour contrer les effets mortels de la drogue, de façon autonome. Leurs travaux sont expliqués ce mois-ci dans le Journal of Controlled Release.

L’overdose survient quand l’opiacé s’attache aux récepteurs du cerveau régulant la respiration, entraînant une hyperventilation et la mort. Hyowon Lee et ses collègues ont donc décidé de mettre au point un appareil capable de détecter quand la fréquence respiratoire d’une personne diminue à un certain niveau et d’alors relâcher la naxolone, qui bloque l’action de l’opioïde sur les récepteurs cérébraux. Dans le détail, le port de l’appareil serait similaire à celui d’une pompe à insuline : il s’agit pour l’heure d’un brassard se fixant sur un générateur de champ magnétique, relié à une pile portable attachée à la hanche. Un électrode sur la poitrine permet de mesurer la fréquence respiratoire. Quand celle-ci est trop faible, le dispositif active le générateur de champ magnétique pour chauffer une capsule de médicament dans le corps, libérant de la naloxone en 10 secondes.

"L’antidote va toujours être avec vous", explique Hyowon Lee, qui a conduit l’étude. "L’appareil n’aura pas besoin que vous compreniez que vous êtes en train de faire une overdose ou que vous vous injectiez la naloxone vous-même, il vous gardera stable assez longtemps pour attendre l’arrivée des secours", se félicite-t-il. 

Une heure pour laisser aux secours le temps d’arriver 

Les chercheurs envisagent de pré-injecter la capsule de médicament sous la peau en consultation. De cette façon, le système délivrerait automatiquement de la naloxone au patient pendant l’overdose, lui faisant gagner une heure. D’après Lee, ce laps de temps supplémentaire permettrait aux secours d’amener le patient à l’hôpital. La capsule délivre par ailleurs une dose plus importante de naloxone que les produits actuellement disponibles sur le marché, ce qui permet de gagner plus de temps avant la prochaine rechute et serait donc moins cher à fabriquer. 

Depuis qu’ils ont soumis leur étude à publication, les chercheurs ont réduit la taille du générateur de champ magnétique et de la batterie afin que l’appareil soit moins encombrant.

"L'objectif est de rendre l'ensemble du système discret, afin que vous ne sentiez pas que vous devez porter quelque chose de gros tout le temps", explique Lee. Les scientifiques prévoient également de le doter d’un système de communication qui alerterait automatiquement les urgences en cas d’overdose. 

A terme, cette technologie pourrait éventuellement délivrer des médicaments autres que la naloxone. "Les personnes allergiques ont immédiatement besoin d'épinéphrine. Cette configuration pourrait supprimer le besoin d'un stylo épi (qui délivre de l’épinéphrine, NDLR)", avance Lee. 

En France, le le nombre d’hospitalisations pour addiction a augmenté de 167% en 15 ans 

Mais les Etats-Unis ne sont pas le seul pays affecté par la crise des opioïdes. Si nous sommes encore loin des chiffres d’outre-Atlantique, en France, les autorités sanitaires s’inquiètent d’une consommation accrue des antidouleurs à base d’opiacés. 

Depuis les années 90, les prescriptions d’antalgiques opioïdes (tramadole, codéine…) ont explosé pour concerner 10 millions de personnes en 2015. En 2017, ces médicaments représentaient 22% de l’ensemble des antidouleurs consommés, surtout pour prendre en charge les douleurs cancéreuses mais aussi pour des douleurs chroniques dont souffrent 10 à 12 millions de Français. Quant aux opioïdes forts (oxycodone, morphine, fentanyl), leur prescription a augmenté de 150% en dix ans. 

Mais qu’ils soient "forts" ou "faibles", les antidouleurs à base d’opioïdes entraînent des risques graves d’addiction et de surdosage. Par conséquent, en 15 ans, le nombre d’hospitalisations pour addiction a augmenté de 167% pour atteindre 40 hospitalisations par million d’habitants en 2017. Quant au nombre de mort par overdose à cause de ces médicaments, il est lui aussi en forte croissance. "Ce sont quelques centaines de décès par an, au minimum 200, peut-être entre 500 et un millier. Mais c’est probablement déjà trop", explique Nicolas Luthier, directeur de l’Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA), à Libération.

Voir ci-dessous la vidéo explicative des chercheurs de l’Université Purdue : 

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