Principale cause de décès évitable dans le monde, le tabagisme est responsable de plus de 7 millions de morts chaque année. En France, ce sont 12,2 millions de personnes qui fument quotidiennement, altérant ainsi leur santé.
Outre l’augmentation des risques de développer un cancer, une maladie cardiovasculaire ou une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), le tabagisme peut aussi altérer le système immunitaire.
C’est ce que démontre une nouvelle étude menée par l’Université de Bath, en Angleterre, et publiée dans la revue Scientific Reports. Selon ses auteurs, la fumée de cigarette peut rendre les souches bactériennes de SARM plus résistantes aux antibiotiques.
Une modification de l’ADN bactérien
Le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) est un staphylocoque doré qui a développé une résistance à plusieurs antibiotiques, dont la méticilline. Ces bactéries sont présentes sur la peau, dans le nez et dans la gorge de la plupart d'entre nous, sans qu'ils causent d'infection.
Selon les chercheurs de ces travaux, cependant, l’exposition à la fumée de cigarette peut rendre certaines couches du SARM plus invasives et persistantes, ce qui les rend potentiellement mortelles chez les personnes à la santé dégradée.
En cause, selon eux : le stress que cause la fumée de cigarette sur la bactérie qui déclenche alors une réaction d’urgence. Pour se défendre face à ce qu’elle considère comme une attaque, elle augmente le taux de mutation de son ADN microbien. Résultat : cela crée des variantes invasives et persistantes capables de résister aux antibiotiques.
La pollution de l’air aussi concernée
Pour vérifier leur théorie, les chercheurs ont exposé six souches témoins de "superbactéries" de SARM à la fumée de cigarette.
Si toutes ces souches n’ont pas réagi de la même manière à la fumée de cigarette, la majorité a cependant montré une résistance accrue à l'antibiotique rifampicine et un caractère invasif et persistant accru. La résistance à d'autres antibiotiques est également susceptible d'être affectée.
"Nous nous attendions à certains effets, mais nous ne nous attendions pas à ce que la fumée affecte à ce point la résistance aux médicaments, explique le Dr Maisem Laabei, du Département de biologie et de biochimie de l'Université de Bath. Nous reconnaissons que l'exposition dans un laboratoire est différente de la fumée inhalée sur une longue période de temps, mais il semble raisonnable d'émettre l'hypothèse, sur la base de notre recherche et d'autres, que les conditions stressantes imposées par le tabagisme induisent des réactions dans les cellules microbiennes, entraînant une adaptation à des conditions difficiles, avec pour effet net une virulence croissante et/ou un risque d'infection."
Les chercheurs espèrent que leurs travaux fourniront "une autre raison aux gens de ne pas fumer et aux fumeurs actuels d’arrêter la cigarette". Ils travaillent désormais à comprendre la façon dont la pollution de l'air, en particulier celle émise par gaz d'échappement des moteurs diesel, pourrait affecter les microbes dans nos voies nasales, car plusieurs des composés polluants sont les mêmes que ceux de la fumée de cigarette.