Les cas de maladie de Crohn sont chaque année plus nombreux dans les pays européens. Actuellement, on dénombre 120 000 personnes officiellement concernées en France. Cette maladie auto-immune à l’origine d’une inflammation chronique de l’intestin affecte les deux sexes et est généralement découverte entre 15 et 30 ans. Très handicapante, elle se caractérise par les symptômes suivants : une diarrhée parfois abondante et liquide, avec éventuellement une perte de sang et du mucus ou du pus dans les selles. Cette diarrhée s’accompagne le plus souvent de terribles douleurs abdominales. Quand l'anus est atteint, des fissures, des abcès et des fistules peuvent survenir. Le malade peut aussi se plaindre de fièvre, d’un amaigrissement et d’une grande fatigue.
Toutefois, les symptômes étant assez vagues et se rapprochant de ceux de nombreuses autres maladies, le diagnostic prend souvent beaucoup de temps. Une fois établi, le malade se voit prescrire des médicaments pour réduire l’inflammation parfois accompagnés de recommandations alimentaires spécifiques pour tenter de réduire les douleurs et de remplacer les nutriments perdus. Mais ces traitements sont rarement complètement efficaces : à l’heure actuelle, seuls 10% des patients suivis pour Crohn guérissent complètement. C’est pourquoi les scientifiques cherchent toujours un traitement ciblé.
Une nouvelle étude parue récemment dans le journal Cellular and Molecular Gastroenterology and Hepatology pourrait désormais changer la donne. En effet, des chercheurs du Centre Médical de l’Université de Cleveland aux Etats-Unis ont découvert qu’inhiber des récepteurs à la surface de l’intestin pourrait largement réduire l’inflammation des malades.
Une étude sur des souris génétiquement modifiées
La protéine facteur de nécrose tumorale - ou facteur de nécrose tumorale faible inducteur d'apoptose (TWEAK) - interagit avec des récepteurs appelés Fn14 à la surface de l'intestin. Les chercheurs ont utilisé des souris génétiquement modifiées avec la maladie de Crohn pour étudier les interactions entre les deux. Ils ont supprimé les récepteurs Fn14 chez certains des rongeurs et ont alors pu constater que ceux-ci souffraient de douleurs moins graves tandis que les autres continuaient de subir des inflammations chroniques.
"Pendant l'inflammation précoce, TWEAK/Fn14 s'active pour guérir les lésions tissulaires", explique le Dr Cominelli qui a mené l’étude. "Cependant, plus tard, une inflammation chronique ainsi que des niveaux accrus et persistants de Fn14 peuvent entraîner une inflammation pathologique et une fibrose", poursuit-il.
Forts de ces résultats, les chercheurs ont voulu tester leur théorie sur des humains. Ils ont alors utilisé des diagnostics moléculaires pour examiner les tissus intestinaux de gens atteints de Crohn et d’autres. Ils ont ainsi découvert que l’interaction entre TWEAK et Fn14 était plus forte chez les malades.
Un impact sur le cancer colorectal
Ainsi, si on trouvait un moyen de bloquer Fn14 avec des médicaments, cela pourrait entraîner une différence majeure dans l’impact de la maladie sur le corps humain, améliorant l’inflammation et réduisant les douleurs qui l’accompagnent.
A terme, cette découverte pourrait également avoir un impact sur le cancer colorectal. En effet, les patients atteints de Crohn ou souffrant d’inflammations chroniques sont plus susceptibles de développer cette maladie (45 000 nouveaux cas par an en France). "Cette recherche établit la raison d'être des thérapies innovantes qui peuvent améliorer et sauver des vies", se félicite donc Cominelli.
En juin, des chercheurs avaient déjà annoncé avoir trouvé une solution pour faire soigner les personnes atteintes de Crohn. D’après leur étude parue dans la revue Nutrients, un régime à base de plantes pourrait conduire à une disparition totale des symptômes de la maladie. "Cette étude de cas supporte l’idée selon laquelle l’alimentation est un traitement en soi. Non seulement cela prouve qu’un régime alimentaire riche en fibre et basé sur les plantes pourrait aider à guérir de la maladie de Crohn mais on remarque que tous les effets secondaires sont positifs. Parmi eux, des risques réduits de développer des maladies de cœur, du diabète de type 2 et certains types de cancers", écrivaient-ils alors.