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Cercle vicieux

Facebook : le stress engendré par le réseau social augmenterait l'addiction à la plateforme

Par Raphaëlle de Tappie

C'est le serpent qui se mord la queue : plus un internaute sera stressé par Facebook, plus il aura tendance à passer du temps sur la plateforme, passant d'une activité à l'autre, ont remarqué les chercheurs. 

tommaso79/iStock

On parle régulièrement des effets néfastes des réseaux sociaux. En comparant leur vie à celles des autres utilisateurs, les internautes seraient plus susceptibles de développer des dépressions tandis que suivre avidement l’actualité de dizaines de mannequins sur Instagram pourraient affecter la façon dont les jeunes filles voient leur propre corps. On sait également que les réseaux sociaux sont une grande source de stress. Un mot a même été inventé pour décrire ce phénomène : "technostress". Mais bizarrement, plus ce dernier est présent, plus les gens ont tendance à devenir accros à Facebook, déplorent des chercheurs dans une nouvelle étude parue mardi 27 août dans le Information Systems Journal.

Les habitudes de 444 utilisateurs de Facebook analysées

Pour en arriver à cette conclusion, des scientifiques de l'Université de Lancaster (Royaume-Uni), de l'Université de Bamberg (Allemagne) et de l'Université Friedrich-Alexander Erlangen-Nürnberg (Allemagne) ont analysé les habitudes de 444 utilisateurs de Facebook. Ils ont examiné différentes sortes de stress causés par les réseaux sociaux : comment ces derniers envahissent la vie personnelle des internautes, les exigences sociales trop fortes auxquelles ces derniers sont confrontés ou encore les constants changements et mises à jour de la plateforme.

Pour échapper à ce stress, les chercheurs ont élaboré deux méthodes possibles. La première consistait à faire diversion en s’éloignant des réseaux sociaux et en passant plus de temps en compagnie de ses proches. La seconde au contraire proposait de passer encore plus de temps sur Facebook. Les scientifiques ont alors pu observer que plus les internautes se sentaient stressés par la plateforme, plus ils passaient du temps dessus, sautant d’une activité à l’autre en parlant avec des gens sur Messenger, en balayant le fil d’actualité de leurs contacts ou en actualisant leur statut !

"Un flou entre le stress causé et l’utilisation compulsive"

"Bien que cela puisse sembler contre-intuitif, les utilisateurs de médias sociaux continuent d'utiliser les mêmes plates-formes qui leur causent du stress plutôt que de s'en détourner, créant un flou entre le stress causé et l'utilisation compulsive", analyse donc le professeur Monideepa Tarafdar, co-auteur de l’étude. 

"Parce que les réseaux sociaux offrent une telle gamme de caractéristiques, les utilisateurs peuvent penser qu'ils agissent à la fois comme des facteurs de stress et comme une distraction de ce stress. Même lorsque les utilisateurs sont stressés par l'utilisation du réseau social, ils utilisent les mêmes plates-formes pour faire face à ce stress, se divertissant par d'autres activités sur le réseau social et, en fin de compte, adoptant un comportement compulsif et excessif. En conséquence, ils s'incrustent dans l'environnement du réseau social plutôt que de s'en éloigner, et une dépendance se forme", renchérit les professeurs Christian Maier qui a également participé à l’étude.

"Les utilisateurs se rendent dans différentes zones de la plate-forme qu'ils considèrent comme distinctes et qu'ils utilisent de différentes manières. Avec Facebook, il existe des fonctionnalités qui vous emmènent dans des mondes différents au sein d'une même plateforme. Vous pouvez être dans de nombreux endroits différents à partir d'une même application, par exemple en suivant les activités de vos amis, en publiant des photos sur vos activités quotidiennes, en passant à une fonction de chat ou en jouant à des jeux", commente son collègue le professeur Sven Laumer.

Un phénomène propre au technostress des médias sociaux

Et Tarafdar de conclure : "L'idée d'utiliser le même environnement qui cause le stress comme moyen de faire face à ce stress est nouvelle. C'est un phénomène intéressant qui semble propre au technostress des médias sociaux".  

Si les réseaux sociaux sont souvent épinglés comme des facteurs de stress et de dépression, ils sont en contrepartie d’utiles outils de diagnostics pour les médecins. En effet, les experts se servent de plus en plus de Facebook, Twitter ou autre pour dépister notamment les signes de dépression.

"Ce que les gens écrivent sur les réseaux sociaux et en ligne représente un aspect de la vie auquel il est très difficile d'accéder en médecine et en recherche", constate ainsi le chercheur H. Andrew Schwartz. En 2018, ses collègues et lui ont donc mis au point un algorithme permettant de déceler les comportements dépressifs sur Facebook. Plus récemment, d’autres scientifiques ont conçu une machine capable de repérer les utilisateurs de Twitter dépressifs grâce aux couleurs de leurs photos.