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Vigilance

Cancer du sein : les traitements hormonaux pourraient augmenter le risque chez les femmes ménopausées

Par Raphaëlle de Tappie

Les traitements hormonaux prescrits aux femmes pendant la ménopause seraient associés à un risque accru de cancer du sein, selon des chercheurs britanniques. 

KatarzynaBialasiewicz/iStock

A l’arrivée de la ménopause, les femmes souffrent de nombreux bouleversements hormonaux désagréables. Les ovaires cessent progressivement de fonctionner, entraînant une diminution du niveau d’oestrogène et une quasi-disparition de la progestérone. Cela peut entraîner des bouffées de chaleur, des troubles de sommeil, une sécheresse vaginale, des troubles génito-urinaires, ou encore une prise de poids. Pour soulager ces symptômes, de nombreuses patientes se voient prescrire un traitement hormonal.

Mais, selon une étude parue le 29 août dans la revue médicale The Lancet, les traitements hormonaux substitutifs de la ménopause (THS) sont associés à un risque accru de développer un cancer du sein, à l’exception des gels aux oestrogènes à appliquer localement. Les chercheurs ont réussi à quantifier le risque pour chaque type de traitement.

58 études sur plus de 100 000 femmes

Au total, les chercheurs britanniques ont analysé 58 études épidémiologiques portant sur plus de 100 000 femmes. Résultat : une femme de cinquante ans traitée pendant cinq ans avec un THS associant des oestrogènes et de la progestérone en continu a 8,3% de probabilité de développer un cancer du sein dans les vingt ans suivant le début du traitement contre 6,3% pour une femme du même âge sans médicaments. La proportion serait de 7,7% pour celles ayant suivant un traitement pendant la même durée avec des oestrogènes et de la progestérone par intermittence, c’est à dire pas tous les jours, et de 6,8% pour celles traitées par oestrogènes seulement. Et plus le traitement dure, plus le risque augmente, remarquent les chercheurs.

"L’utilisation d’un THM pendant 10 ans entraîne un risque de cancer du sein environ deux fois plus élevé que celui associé avec un traitement de cinq ans. Mais, il apparaît que l’utilisation d’un THS pendant moins d’un an entraîne peu de risque", explique Gillian Reeves, de l’université d’Oxford, co-auteure de l’étude.

"Les femmes devraient au courant de cette nouvelle information"

"Les médecins doivent tenir compte du message de cette étude mais aussi (prendre en considération) les symptômes de la ménopause, en envisageant soigneusement les risques et les bénéfices d’un traitement pour chaque femme (…) Cela peut dépendre de la sévérité des symptômes, des contre-indications au THS, de l’IMC (indice de masse corporelle, NDLR) et peut prendre en compte les préférences de la patiente", note Joanne Kotsopoulos, du Women’s College Hospital de Toronto (Canada), spécialisée dans le cancer du sein, dans un commentaire sur l’étude.

Pour la Medicines and Healthcare Products Regulatory Authority (MHRA), les femmes qui prennent ou ont déjà pris un THS devraient être vigilantes et en parler à leur médecin lors de leur prochaine consultation, en demandant au passage un dépistage du cancer du sein. "Les femmes devraient être au courant de cette nouvelle information, afin qu'elle puisse être considérée avec les autres risques et avantages de l'utilisation de l'hormonothérapie substitutive", commente Sarah Branch, directrice adjointe de la Division de la vigilance et de la gestion des risques des médicaments de la MHRA, au regard des résultats de cette étude.

"La ménopause peut avoir des effets secondaires désagréables et les produits THS peuvent être efficaces pour aider à soulager les symptômes. Aucun médicament n'est totalement sans risque, mais il est important pour les femmes de pouvoir prendre une décision éclairée sur les risques et les avantages qui leur conviennent", poursuit-elle, citée par The Guardian.

De nombreux autres facteurs peuvent jouer dans le développement d’un cancer du sein

Cette étude n’est pas la première à montrer une association entre THS et cancer du sein. En 2002, des chercheurs américains avaient fait beaucoup de bruit en établissant ce lien. A la suite de quoi, les médecins avaient moins prescrit ces traitements. En France, où au moins un quart des femmes de 50 à 60 ans étaient traitées de la sorte en 2000 et 2001, les THS ont diminué de 62% entre 2002 et 2006. Dans le même temps, l’incidence des cancers du sein a baissé de 6,6% chez les femmes de 50 à 69 ans, un phénomène que de nombreux spécialistes ont attribué à la baisse des THS. 

Toutefois, de nombreux autres facteurs sont susceptibles de jouer dans l’arrivée d’un cancer du sein : la consommation d’alcool, le poids ou l’âge du premier enfant, la génétique ou encore la couleur de la peau.

Suite aux nombreuses polémiques sur les traitements hormonaux, de nombreux chercheurs se sont penchés sur le sujet. Il y a quelques mois, une recherche canadienne parue dans la revue Acta Physiologica, avançait que ces traitements pourraient protéger efficacement le cœur si les femmes les prenaient avant la ménopause et non pas après, comme c’est toujours le cas. Car, son arrivée s’accompagne également d’un risque accru de maladies cardiovasculaires.