Longtemps considérées comme de la "poussière cellulaire", libérées par nos cellules mais sans aucun bénéfice propre, les vésicules extracellulaires sont peut-être l’avenir de l’immunothérapie dans la lutte contre le cancer.
C’est ce que laisse espérer une nouvelle étude portant sur des souris menée par des chercheurs de l'Université de l'État du Michigan et de l'Université Stanford, et publiée dans la revue Molecular Cancer Therapeutics. Selon ses auteurs, ces particules pourraient devenir des "mini-transporteurs" de traitement anti-cancer, c’est-à-dire une combinaison de médicaments thérapeutiques et de gènes qui auraient pour cible les tumeurs cancéreuses.
Le rôle-clé des vésicules extracellulaires
Il faut d’abord comprendre ce que sont ces vésicules extracellulaires. Il s’agit de "bulles nanométriques" libérées par les cellules saines de notre corps et qui, comme leurs cellules mères, transfèrent à d’autres cellules notre matériel génétique comme l’ADN et l’ARN.
Une étude publiée en octobre 2018 par le CNRS explique ainsi que les grands atouts des vésicules extracellulaires sont qu’ils ne peuvent pas se diviser, "limitant le risque de développer un cancer, ne se différencient pas, empêchant qu’elles développent une mauvaise fonction et semblent pouvoir être produites par un seul donneur pour plusieurs patients".
Ayant déjà montré leur potentiel thérapeutique chez l’animal, "dans la régénération de lésions cardiaques, hépatiques, ou encore rénales", les vésicules extracellulaires se sont ici avérées précieuses dans le ciblage des cellules cancéreuses en transportant une combinaison de médicament et de gènes. "Ce que nous avons fait, c'est d'améliorer une approche thérapeutique pour livrer des gènes producteurs d'enzymes qui peuvent convertir certains médicaments en agents toxiques et cibler les tumeur", explique ainsi Masamitsu Kanada, auteur principal et professeur adjoint de pharmacologie et toxicologie à l'Institute for Quantitative Health Science and Engineering du MSU.
Initialement des composés inactifs, ces promédicaments s’activent pour lutter contre le cancer quand ils se métabolisent dans le corps. Les chercheurs ont utilisé les vésicules extracellulaires pour délivrer les gènes producteurs d'enzymes qui pourraient activer une association médicamenteuse dans les cellules du cancer du sein.
Un traitement ciblé plus efficace que la chimiothérapie
Un vecteur de gènes a particulièrement retenu leur attention : les minicercles d’ADN qui, une fois chargé de vésicules extracellulaires, ont été plus de 14 fois plus efficaces pour cibler et tuer les tumeurs cancéreuses que la chimiothérapie. "La thérapie à base de minicercles d’ADN a tué plus de la moitié des cellules cancéreuses du sein chez la souris", note le Pr Kanada.
Selon lui, cette nouvelle approche thérapeutique pourrait devenir la meilleure option de traitement de cancer, devant la chimiothérapie. "La chimiothérapie conventionnelle n'est pas capable de faire la différence entre les tumeurs et les tissus normaux, alors elle s'attaque à tout. Cette non-spécificité peut causer de graves effets secondaires et une concentration insuffisante dans les tumeurs."
Selon lui, utiliser les vésicules extracellulaires permettrait non seulement d’offrir un traitement ciblé, mais aussi de réduire au minimum le risque de réponses immunitaires non désirées qui peuvent découler d’autres thérapies géniques. "Si les VE s'avèrent efficaces chez les humains, ce serait une plateforme idéale pour l'administration de gènes et ils pourraient être utilisés chez les humains plus tôt que prévu", conclut-il.
Un essai clinique de phase I qui utilisera les vésicules extracellulaires devrait commencer bientôt aux États-Unis pour le traitement du cancer du pancréas métastatique.