Les effets néfastes du tabac sur les poumons sont connus de tous depuis bien longtemps. Mais les gros fumeurs ne sont pas les seuls à courir des risques. D’après une récente étude parue le 9 octobre dans The Lancet Respiratory Medecine, cinq cigarettes par jour suffiraient à affecter la santé pulmonaire sur le long terme. Les petits fumeurs présentent par ailleurs un risque très augmenté de développer une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).
Pour en arriver à cette conclusion, les chercheurs du Columbia University Vagelos College of Physicians and Surgeons aux Etats-Unis ont suivi 25 352 participants âgés de 17 à 93 ans, fumeurs, anciens fumeurs ou n’ayant jamais fumé de leur vie et leur ont fait passer des tests pour mesurer leurs fonctions pulmonaires.
Ils ont ainsi pu constater que celles des petits fumeurs déclinaient à un rythme bien plus proche de celle des gros fumeurs que de celle de personnes qui n’avaient jamais fumé. Dans le détail, les personnes fumant peu pouvaient perdre environ le même taux de fonctions pulmonaires en un an que les gros fumeurs en neuf mois.
"Des différences anatomiques dans le poumon qui persistent des années après l’arrêt de la cigarette"
Autre constatation inquiétante : si la capacité pulmonaire des ex-fumeurs déclinait moins vite que les personnes fumant encore, le taux de déclin ne se normalisait pas avant au moins 30 ans.
Ces résultats rejoignent ceux de nombreuses autres études, assurent les chercheurs. "Il y a des différences anatomiques dans le poumon qui persistent pendant des années après l'arrêt de la cigarette et l'activité au niveau des gènes reste altérée", explique Elizabeth Oelsner qui a dirigé les recherches.
"Nombreuses sont les personnes qui partent du principe que fumer quelques cigarettes par jour n'est pas si mauvais. Mais la différence de perte de fonction pulmonaire entre les personnes qui fument cinq cigarettes par jour contre deux paquets par jour est relativement faible", poursuit-elle.
Un risque accru de bronchopneumopathie chronique obstructive
Aussi, "ne fumer que quelques cigarettes par jour est bien plus risqué que ce que l'on pense", met-elle en garde. "Tout le monde devrait être fortement encouragé à arrêter de fumer, peu importe le nombre de cigarettes que l'on fume", insiste-t-elle.
Bien qu’il soit normal que les capacités pulmonaires déclinent avec l’âge, dès qu’on atteint la vingtaine, fumer accélère cette baisse, rappellent les chercheurs. Les fumeurs sont ainsi plus susceptibles de développer une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Cette maladie qui se caractérise par une baisse persistante de l’écoulement des gaz inspirés est diagnostiquée quand les fonctions pulmonaires passent sous un certain seuil.
Et d’après cette étude, les personnes qui fument peu présentent un risque de bronchopneumopathie chronique obstructive bien plus important que ce que l'on pensait précédemment. "Il serait probablement nécessaire d'étendre nos notions de qui est touché par ce risque", explique Oelsner. Et de conclure : "A l'avenir, si nous trouvons des thérapies qui réduisent le risque de BPCO, toutes les personnes affichant un risque accru devraient en bénéficier".
Une maladie actuellement incurable
En France, où 11,5 millions de de personnes fumaient quotidiennement en 2018, près de trois millions d’individus sont touchés par cette maladie. D’après l’OMS, les symptômes s’aggravent progressivement avec un essoufflement de l’effort même au repos. La maladie "tend à être sous diagnostiquée et elle peut engager le pronostic vital", alerte l’organisation.
Elle est actuellement incurable et les traitements proposés pour soulager la douleur ou ralentir sa progression sont souvent insuffisants. C’est pourquoi, une société américaine du nom de Nuvaira a mis au point un nouveau procédé non-médicamenteux qu’elle souhaite tester, entre autres, au service de pneumologie du CHU de Toulouse en France. Ce dernier a commencé au moins de septembre un essai international suivant des ex-consommateurs de tabac atteints de la maladie.
"Le principe de cette nouvelle thérapeutique consiste à introduire une sonde via un vidéo-endoscope par la bouche du patient et de pratiquer une thermolyse (destruction par la chaleur) par radiofréquence dans les deux poumons. L’objectif est de détruire approximativement 50 % des nerfs bronchiques qui contrôlent notamment la contraction des muscles bronchiques, anormale dans la BPCO", explique l’hôpital sur son site.