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Découverte

Obésité : l'asthme serait provoqué par une accumulation de graisse dans les voies respiratoires

Par Raphaëlle de Tappie

D'après une nouvelle étude, le tissu adipeux qui s'accumule dans les parois respiratoires des personnes obèses pourrait expliquer pourquoi ces dernières ont plus de problèmes d'asthme. 

AaronAmat/iStock

A échelle mondiale, le nombre de cas d’obésité a presque triplé depuis 1975. D’après l’OMS, en 2016, plus de 1,9 milliard d’adultes étaient en surpoids (IMC égal ou supérieur à 25). Sur ce total, plus de 650 millions étaient obèses (IMC égal ou supérieur à 30). On sait que la surcharge pondérale peut entraîner des maladies cardiovasculaires ou encore du diabète de type 2. Il a également été prouvé que l’obésité pouvait conduire à des problèmes de respiration sifflante et d’asthme, sans que l'on sache pourquoi. Toutefois, d’après une nouvelle étude parue dans l’European Respiratory Journal, cela pourrait s’expliquer car le tissu adipeux s’accumule plus dans les parois respiratoires des personnes en surpoids et obèses, modifiant leur structure. 

Les chercheurs ont examiné les échantillons post-mortem de poumons de 52 personnes conservés à la biobanque de tissus par voies respiratoires. Parmi ces personnes, 15 n’avaient pas d’asthme déclaré, 21 souffraient d’asthme mais sont mortes d’autres causes et 16 sont mortes d’asthme. Grâce à des colorants pour visualiser les structures des voies respiratoires par microscope, ils ont pu identifier et quantifier tous les tissus graisseux présents et ont comparé ces données avec l’IMC de chaque personne.

Ils ont alors constaté que des tissus graisseux s’accumulaient dans les parois respiratoires et que cette quantité de graisse augmentait en fonction de l’IMC. Autre observation intéressante : il semblerait que cette augmentation de graisse modifie la structure normale des voies respiratoires et entraîne une inflammation des poumons.

Inverser le phénomène grâce à une perte de poids ?  

“Le surpoids ou l'obésité ont déjà été associés à l'asthme ou à des symptômes d'asthme plus graves. Les chercheurs ont émis l'hypothèse que le lien pourrait s'expliquer par la pression directe de l'excès de poids sur les poumons, ou par une augmentation générale de l'inflammation créée par l'excès de poids. Cette étude suggère qu'un autre mécanisme est également en jeu. Nous avons constaté qu'un excès de graisse s'accumule dans les parois des voies respiratoires où il prend de l'espace et semble augmenter l'inflammation dans les poumons. Nous pensons que cela cause un épaississement des voies respiratoires qui limite la circulation de l'air à l'entrée et à la sortie des poumons, ce qui pourrait expliquer, au moins en partie, une augmentation des symptômes de l'asthme”, explique le Dr Peter Noble, co-auteur de l’étude et professeur agrégé à l'université d'Australie occidentale de Perth.

Les chercheurs cherchent désormais de nouvelles manières d’étudier et de mesurer les tissus adipeux dans les poumons. Ils veulent confirmer le lien avec les maladies respiratoires et voir si l’effet peut s’inverser grâce à une perte de poids.

“Il s'agit d'une découverte importante sur la relation entre le poids corporel et les maladies respiratoires, car elle montre comment l'embonpoint ou l'obésité peuvent aggraver les symptômes chez les personnes asthmatiques. Cela va au-delà de la simple observation selon laquelle les patients obèses ont besoin de respirer davantage en faisant de l'activité et de l'exercice, ce qui augmente leur charge ventilatoire. L'observation montre les changements réels des voies respiratoires associés à l'obésité. Nous devons étudier ce résultat plus en détail, et en particulier déterminer si ce phénomène peut être inversé par une perte de poids. En attendant, nous devrions soutenir les patients asthmatiques pour les aider à atteindre ou maintenir un poids santé”, commente le professeur Thierry Troosters, président de l'European Respiratory Society, en marge de cette étude.

Un enjeu de santé publique

A l’heure actuelle, l’obésité est un enjeu de santé publique. Selon un rapport de l’OCDE paru le 10 octobre, cette maladie ferait peser un coût total de 425 milliards de dollars par an aux 52 pays étudiés. Une politique efficace de prévention pourrait réduire efficacement les coût de santé et augmenter le PIB des Etats concernés, assurent les experts.

C’est pourquoi, en France, où 6,5 millions de personnes sont considérées comme obèses, soit 14,5% de la population adulte, le ministère de la Santé a mis la lutte contre cette maladie au cœur de son 4ème Programme national nutrition santé (PNNS) lancé le 20 octobre. A travers 55 actions, ce dernier a pour objectif de permettre aux Français de rester en bonne santé tout au long de leur vie grâce à de bons réflexes pour mieux manger et bouger.