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Pas de corrélation observée

Santé mentale des ados : le temps passé sur les réseaux sociaux n’a pas d’importance

Par Raphaëlle de Tappie

D'après une nouvelle étude, le temps passé sur les réseaux sociaux n'augmente pas directement l'anxiété ou la dépression chez les ados, c'est la façon d'utiliser ces médias qui peut avoir une influence sur leur mental.  

dragana991/iStock

Depuis 2012, le temps passé par les adolescents sur les réseaux sociaux a augmenté de 62,5% et continue de grimper. A tel point que l’année dernière, le temps par jour moyen qu’ils passaient sur ces sites était estimé à 2,6 heures par jour. Inquiets de l’ampleur de ce phénomène, de nombreux chercheurs ont étudié son influence sur les jeunes et plusieurs études ont fait le lien entre temps consacré aux réseaux sociaux (ou sur les écrans en général) et anxiété ou dépression. Toutefois, une nouvelle étude vient démontrer le contraire. D’après des recherches menées par l’université Brigham Young (Etats-Unis) dont les résultats sont parus le 10 octobre dans la revue Computers in Human Behavior, le temps passé sur les réseaux sociaux n’augmente pas directement l’anxiété ou la dépression chez les ados.

Afin de comprendre la santé mentale des adolescents et leur utilisation des médias sociaux, les chercheurs suivi 500 jeunes de 13 à 20 ans pendant huit ans. Chaque année, ils demandaient aux participants combien de temps ils passaient sur les réseaux sociaux au cours d’une journée normale et de mesurer leurs niveaux dépressifs et d’anxiété à l’aide de différentes échelles.

Résultats : si les scientifiques ont remarqué que les niveaux moyens d’utilisation des réseaux augmentaient régulièrement au fur et à mesure qu’un jeune vieillissait, cela ne permettait en rien d’anticiper l’avenir de sa santé mentale, note l’étude.

Tout dépend de la façon dont on utilise les réseaux sociaux

“Nous avons passé huit ans à essayer de vraiment comprendre la relation entre le temps passé sur les médias sociaux et la dépression chez les adolescents en développement. S'ils augmentaient leur temps d'utilisation des médias sociaux, est-ce que cela les rendrait encore plus déprimés ? De plus, s'ils réduisaient leur temps d'utilisation des médias sociaux, étaient-ils moins déprimés ? La réponse est non. Nous avons constaté que le temps passé sur les médias sociaux n'avait pas d'incidence sur l'anxiété ou la dépression”, tranche Sarah Coyne qui a mené l’étude.

Alors que de nombreux adultes s’inquiètent du temps passé par les jeunes sur les réseaux sociaux, les chercheurs veulent déplacer le débat vers le contexte et le contenu autour de cette utilisation. “Ce n'est pas seulement le temps qui est important pour la plupart des enfants. Par exemple, deux adolescents pourraient utiliser les médias sociaux pendant exactement la même période de temps, mais les résultats pourraient être très différents en raison de la façon dont ils les utilisent”, explique Sarah Coyne.

Pour utiliser les réseaux sociaux de façon saine, la chercheuse a quelques conseils. Tout d’abord, soyez un utilisateur actif plutôt que passif : au lieu de simplement faire défiler votre fil d’actualité et de passer votre vie à regarder les photos des autres, commentez, postez et aimez des contenus. Soyez sûr de vos motivations afin de vous lancer dans les réseaux sociaux, intime-t-elle également. Il ne faut pas créer un compte pour de mauvaises raisons. “Si vous vous y aller pour chercher de l'information ou pour communiquer avec d'autres personnes, cela peut avoir un effet plus positif que de vous y rendre simplement parce que vous vous ennuyez”, explique-t-elle. Enfin, limitez l’utilisation des réseaux sociaux au moins une heure avant de vous endormir. Car c’est bien connu, les écrans excitent. Or, dormir suffisamment est indispensable pour conserver une bonne santé mentale. 

L’éternel débat 

En janvier, une étude britannique parue dans The Lancet avait au contraire associé l’utilisation des réseaux sociaux à un risque accru de dépression chez les ados, surtout chez les filles. D’après leurs recherches, 40% des jeunes filles qui passaient plus de 5 heures par jour sur Facebook ou Instagram présentaient des signes de dépression, contre 15% des garçons. Lorsque les adolescents passent beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, ils augmentent le risque d’avoir un sommeil de mauvaise qualité, une mauvaise estime d’eux-mêmes et de leur corps, assuraient les chercheurs, qui mettaient également en garde contre les risques de cyber-harcèlement. Or, d’après leur étude, les filles dépressives en sont plus souvent victimes que les autres.

Mais si de nombreuses études ont déjà fait le lien entre réseaux sociaux et dépression, il semble impossible de démontrer si c’est parce que quelqu’un passe trop de temps sur les écrans qu’il tombe en dépression ou si c’est parce qu’il va mal qu’il est greffé à son smartphone.

Qui plus est, plusieurs recherches encouragent les professionnels de la santé à se servir des réseaux sociaux pour repérer les troubles mentaux chez leurs patients. Les utilisateurs de Twitter déprimés auraient ainsi tendance à poster des photos plus sombres que les autres tandis que de nombreux marqueurs de langage permettraient d'identifier la dépression sur Facebook.