“Des moustaches, il en faut pour sauver des bros”. Qui n’a jamais entendu le célèbre slogan de Movember ? Depuis 2003, chaque mois de novembre, la fondation australienne Movember Foundation Charity invite les hommes du monde entier à se laisser pousser la moustache afin de sensibiliser l’opinion publique et de lever des fonds dans la recherche des maladies masculines telles que le cancer de la prostate ou des testicules. Ces dernières années, le mouvement Movember a pris de plus en plus d’ampleur, notamment grâce aux réseaux sociaux, et la Fondation aurait récolté environ 465 millions d'euros. Sur son site, elle se félicite d’avoir “financé plus de 1250 projets autour de la santé des hommes dans le monde, remettant en cause le statut quo, bouleversant les recherches sur ce sujet et transformant la façon dont les services de santé atteignent et soutiennent les hommes.”
Mais comment participer à la cause ? Concrètement, c’est très simple. “Le principe de récolte est mondial : il y a un site Movember en fonction des pays. Chaque individu doit créer son profil ou peut se mettre en équipe et faire cotiser sur sa moustache. Soit un attribut capillaire qui plait rarement aux compagnes et créer généralement une tension dans le couple”, s’amuse le porte-parole Movember France, Stéphane Beaumont, interrogé par Pourquoi Docteur. Après avoir vu circuler le profil moustachu sur les réseaux sociaux, les internautes, proches ou moins proches, font un don directement sur le site web. Ils reçoivent ensuite une attestation de dons par e-mail“"car c’est exonéré depuis que l’association est reconnue comme d’utilité publique”, précise-t-il.
Au-delà de la moustache, pour sensibiliser son entourage, on peut également se donner le défi de prendre plus soin de soi et encourager d’autres hommes à faire de même, en organisant des courses entre amis par exemple. On peut aussi se dire “je ne prends plus l’ascenseur mais l’escalier, je descends une station de métro plus tôt”, continue Stéphane Beaumont. Et bien sûr, “le troisième moyen de récolter des dons et de faire parler de l’association est d’organiser des moments spéciaux. J’organise actuellement des afterworks par exemple. C’est convivial, on passe une très bonne soirée ensemble et on peut discuter de ces problèmes de façon préventive”, explique le porte-parole de Movember France.
“Si j'avais su ce qu'était le cancer de testicules, j'aurais peut-être moins attendu”
Survivant du cancer des testicules, Stéphane Beaumont a découvert la fondation en 2010 à l’occasion d’un match de rugby organisé à l’ambassade d’Australie. “La plupart des joueurs participaient à Movember et avaient donc de sublimes moustaches. J’ai cru que c’était un pari entre sportifs mais un des joueurs m’a expliqué ce dont il s’agissait vraiment. Je me suis immédiatement inscrit sur le site web anglais. L’année suivante, le site français se lançait et j’ai été contacté par Movember car on n’était pas beaucoup à s’être inscrits à l’international et à avoir dit qu’on habitait en France. Puis, il y a trois ans, ils m’ont demandé de devenir leur porte-parole dans l’Hexagone : j’étais le seul Français à avoir participé à toutes les campagnes et à avoir récolté plus de 1 000€ de dons. C’est une cause qui me tient à cœur. Si j’avais su ce qu’était le cancer des testicules, j’aurais peut-être moins attendu et me serais évité quelques désagréments chimiothérapiques”, raconte-t-il.
Pour lui, la force de la fondation réside dans sa cohérence globale. “Movember a rapidement su devenir la loupe de contrôle des différents programmes de recherches un peu partout dans le monde. Nous avons parfois des demandes qui viennent d’Australie pour certaines recherches mais tel professeur français fait également le même type de travaux et nous allons alors les faire travailler ensemble. La fondation a vraiment une gouvernance mondiale au niveau des programmes de recherches et des dons pour essayer de les coordonner et de faire que tout le monde aille dans le même sens. Ce qu’ils appellent the True North”, analyse-t-il.
Leur mission : réduire la différence de vie entre les femmes et les hommes. Car au niveau mondial, “il y a un peu plus de cinq ans d’écart d'espérance de vie, ce qui n’a aucun sens d’un point de vue physiologique”, indique Stéphane Beaumont. Cela pourra donc s’accomplir au travers de la recherche médicale bien sûr mais également de la prévention contre le suicide.
Briser le tabou autour de ces maladies "liées à la virilité"
Car les hommes malades auraient beaucoup plus tendance à mettre fin à leurs jours que les femmes atteintes de cancer. “Depuis plusieurs années, je remarque que les hommes ne parlent pas de leurs problèmes, ils les absorbent et n’échangent pas dessus. Entre femmes, il y a une liberté de paroles, une solidarité et un échange sur ces problèmes médicaux alors que les hommes ont encore une certaine pudeur. Est-ce que ça vient de l’éducation ou du fait que les cancers masculins touchent l’appareil génital, ce qui peut écorner l’image de l’homme fort et viril ? Je l’ignore. Toujours est-il que les femmes communiquent beaucoup plus ouvertement sur le cancer du sein alors que, statistiquement en France, il y a plus de cas de cancer de la prostate (71 000 nouveaux cas estimés en 2011, NDLR) que de cancer du sein (53 000 nouveaux cas sur la même période, NDLR)”, constate le porte-parole.
Et d’insister sur l’importance de communiquer : “J’ai été malade d’un cancer et on s’en remet très bien. Mais au moment où ça m’est arrivé, je n’en ai pas parlé au travail. Quelques personnes dont j’étais très proche le savais mais je n’avais pas envie de me montrer malade. J’ai perdu mes cheveux à la première chimio et comme c’était la mode des crânes chauves, je l’ai gardé et tout le monde me disait que c’était un look qui m’allait bien. C’était un petit mensonge mais c’était stupide. Il faut oser en parler.”
Pour désormais communiquer au maximum sur les cancers mâles, Stéphane Beaumont est également impliqué dans l’association française Cerhom qui propose des “échanges, des écoutes et des contacts” avec les malades. Et, afin de briser les tabous liés aux maladies masculines, Cerhom et Movember ont uni leurs forces pour réaliser plusieurs courts métrages. En 2018, les deux associations ont diffusé une série de vidéos ayant pour nom “Un Vrai film de boules”. Cette année, la prévention est axée sur le cancer de la prostate. Le premier spot, “Coup de panne”, sera diffusé dès le 5 novembre. En attendant, à vos barbiers.
Voir ci-dessous "Un Vrai film de boules" :