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Agressions sexuelles

Les abus sexuels d'adolescents ont doublé aux États-Unis en six ans

Par Dr Reetika Sirhindi

Selon les données de l'échantillon national des services d'urgence, le nombre d'admissions aux urgences pour agression sexuelle d'adolescents a plus que doublé entre 2010 et 2016. 

NinaMalyna/iStock

Les agressions sexuelles sont un fléau monstrueux qui peut laisser des séquelles durables chez la victime. En France, selon les chiffres du ministère de la Justice, sur les 38 000 affaires de violences sexuelles répertoriés en 2016, près de 4 affaires sur 10 concernaient des mineurs (39%). Si au départ, les témoignages et les plaintes n’étaient pas monnaie courante, la parole s’est considérablement libérée, surtout du côté des femmes, depuis le scandale Harvey Weinstein et les mouvements Metoo et Balance ton porc, où les victimes n’hésitent plus à dénoncer leurs agresseurs. C’est par exemple le cas pour l’actrice Adele Haenel, qui a vu s’ouvrir une information judiciaire pour agression sexuelle par le parquet de Paris, après avoir révélé chez Médiapart le 3 novembre, les agressions sexuelles et les attouchements qu’elle a subi de la part du réalisateur Christophe Ruggia, entre ses 12 et ses 15 ans. 

Aux Etats-Unis, alors que les statistiques officielles des 20 dernières années prévoyaient une baisse du nombre de cas d'abus sexuels chez les adolescents, la dernière étude des données du Nationwide Emergency Department Sample of the Healthcare Cost and Utilization Project, indique que les admissions aux urgences pour abus sexuels chez les adolescents ont plus que doublé entre 2010 et 2016. Selon un document de recherche publié le 4 novembre dans la revue JAMA Pediatrics, les abus sur les enfants sont en baisse constante depuis des décennies, mais les chiffres sur les adolescents entre 2010 et 2016 racontent une tout autre histoire.

Meilleure coordination des services

L'auteur principal de l’étude, Jesse Helton, professeur adjoint de travail social au College for Public Health and Social Justice de l’université de Saint-Louis (Missouri), a été surpris par les résultats. En analysant les chiffres, il a constaté que le nombre d'admissions aux urgences pour les adolescents de 12 à 17 ans, dont 85 % sont des filles et 15 % des garçons, a doublé au cours de la période de six ans. Cependant, pour les autres groupes d'âge, ce taux n'a montré aucun changement.

Selon lui, même si les données ne permettent pas d'expliquer l’augmentation du taux d'admission aux urgences, elle offre néanmoins un certain nombre de possibilités et appelle à sensibiliser et encourager les jeunes à dénoncer les cas de violence.

En outre, ce chiffre inquiétant appelle également à une coordination accrue et améliorée entre les services de police et les équipes médico-légales. Elle dit qu'il n'y a pas d'autres options comme les centres de défense des droits des enfants et les pédiatres spécialement formés pour faire face aux abus sexuels. 

Manque de structures de soins

“Bien que les données n’expliquent pas cette hausse, nous savons qu'il y a eu une augmentation de la coordination entre la profession médicale, les tribunaux et les équipes médico-légales, souligne Jesse Helton. Des efforts accrus ont été déployés pour s'assurer que les kits pour recenser les viols soient correctement utilisés. On sait que dans le système judiciaire, si la preuve est présentée, les causes peuvent être traitées plus rapidement. Des changements dans les politiques de santé et de protection de l'enfance pourraient également jouer un rôle, si plus d'adolescents sont vus aux urgences qu’auparavant.”

Dans le document, l’auteur pointe également l'absence de centres de défense des droits de l'enfant dans de nombreuses régions des États-Unis, qui, selon lui, peuvent être une alternative aux urgences, car ils sont dotés de professionnels formés pour interroger les enfants. Dans ces circonstances, les enfants, en particulier dans les zones rurales, doivent compter sur le service des urgences pour obtenir une assistance.

Jesse Helton s'est également demandé si tous les services d'urgence étaient bien préparés à aider les adolescents victimes de violence sexuelle, s'il s'agissait de la meilleure option en matière de soins, s'ils étaient équipés pour traiter ces cas et s'il y avait des travailleurs sociaux pour les aider. Les autres questions qui trouvent leur pertinence dans le document de recherche sont les suivantes : les médecins des urgences peuvent-ils détecter la traite des personnes? Sont-ils bien formés pour identifier les victimes et sont-ils en mesure d'administrer des soins médicaux adéquats comme le dépistage des infections sexuellement transmissibles et une prise en charge psychologique? 

Bien que Jesse Helton n'ait pas été en mesure de trouver des réponses concluantes à ces questions, il est important de soulever ces problématiques selon lui.