Un jeûne consiste à arrêter de se nourrir, pendant une journée ou plusieurs semaines, et à vivre sur les réserves de l'organisme. A l’origine, il s’agit d’un rituel religieux, associé à la prière et l’aumône. Les musulmans le pratiquent pendant le Ramadan, les juifs pendant Yom Kippour et les catholiques pendant le Carême. Au cours de l’Antiquité, des philosophes comme Socrate et Platon choisissaient également de jeûner pour améliorer leurs performances intellectuelles. Puis, au fil des siècles, cette pratique a commencé à être associée aux grèves de la faim réalisées par des manifestants pacifiques, le plus connu étant bien sûr Gandhi. Mais depuis quelques années et la mode du détox, le jeûne revient sur le devant de la scène pour ses possibles vertus thérapeutiques. De plus en plus d'individus le pratiquent de manière intermittente pour “nettoyer leur organisme” et certains médecins le recommandent même à leurs patients atteints de cancers. Que se passe-t-il dans notre corps quand on jeûne ? Quels sont les avantages d'une telle méthode et quels effets secondaires peuvent survenir ? Pourquoi Docteur fait le point.
Qu’est-ce qui se passe dans notre corps quand on arrête de manger ?
Quand on arrête de manger, un processus métabolique se met rapidement en place pour mobiliser les réserves de graisse de l’organisme. Le cerveau, qui a besoin de glucose, utilise des réserves de graisse des tissus adipeux. Il transforme ensuite les tri-glycérides en glycérol qui devient à son tour du glucose. Si le jeûne dure trop longtemps, le corps se mettra à puiser dans les muscles pour le produire. Ce faisant, il utilisera des protéines qu'il transformera en acides aminés, puis en glucose. Il s'agit de la phase de néoglucogenèse (synthèse du glucose à partir de précurseurs non-glucidiques).
Quels sont les bienfaits du jeûne pour le corps ?
Tout d’abord, le jeûne nettoie l’organisme. Pendant des centaines de milliers d’années, les famines ont succédé aux périodes fastes pour les humains et l’organisme s’est adapté à ces changements. “Quand vous mangez trop, vous stockez l'excès en prévision de ces périodes de disette et de famine, explique Thierry de Lestrade, auteur du documentaire Le jeûne : une nouvelle thérapie ? à France Inter. Aujourd'hui, dans nos sociétés industrialisées, nous vivons avec un frigo plein. Nous n'avons plus besoin de stocker - or on stocke toujours du gras. Il faut déstocker, c’est un besoin physiologique : le jeûne correspond à ce besoin-là.”
D’après de nombreux experts, de par son action de grand nettoyage de l’intestin, le jeûne permettrait de permettre aux enzymes de digestion de mieux diviser les aliments en molécules. A terme, jeûner de façon intermittente (alterner les périodes on l’on mange et les périodes prolongées où l’on ne mange pas) aurait donc un effet bénéfique sur les allergies.
Le jeûne intermittent est également réputé pour diminuer les maladies inflammatoires chroniques et le cholestérol et pour aider à perdre du poids. En effet, selon une étude parue cet été dans la revue Cell Metabolism, des personnes ayant alterné 36 heures d’apport zéro calories et douze heures d’alimentation sans limite pendant une semaine avaient atteint une restriction calorique moyenne d’environ 35% et perdu en moyenne 3,5 km. “Des études antérieures ont suggéré que les régimes hypocaloriques peuvent entraîner de la malnutrition et une diminution de la fonction immunitaire, alors qu'après 6 mois de jeûne tous les deux jours, la fonction immunitaire chez les participants semblait être stable”, notaient les chercheurs. Par ailleurs, les 60 participants de l’étude présentaient des taux réduits de slCAM-1, un marqueur lié à une maladie et à une inflammation associée à l'âge, et présentaient des niveaux de cholestérol inférieurs à ceux affichés avant le début de l'expérience.
Le jeûne aurait aussi des effets positifs sur le vieillissement, le risque de cancers et les maladies cardiovasculaires. En 2015, des chercheurs de l’université de Caroline du Nord ont soumis les participants de leur étude à cinq jours de demi-jeûne par mois. Trois mois plus tard, la majorité d’entre eux présentaient des biomarqueurs liés aux cancers, à la vieillesse et aux maladies cardiovasculaires considérablement réduits, peu importe la façon dont ils s’alimentaient le reste du temps. Cela pourrait s’expliquer car le jeûne réduit la production d’une hormone à la base du développement du cancer. Mais de manière générale, un jeûne intermittent serait surtout efficace pour ralentir le vieillissement. “Un jeûne strict est très compliqué à suivre pour certaines personnes, et parfois, il peut s’avérer dangereux. C’est pourquoi nous avons mis au point ce régime qui arrive aux mêmes performances qu’un jeûne”, expliquait le chercheur à l’origine de l’étude. “J’ai personnellement testé les deux manières, et cette dernière est bien plus simple, et surtout, plut sûre”, concluait-il.
Bien préparer son jeûne
Bien évidemment, le jeûne n’est pas une pratique à effectuer à la légère. Si vous avez prévu de jeûner pendant plusieurs jours consécutifs, préparez votre corps en amont afin de ne pas le traumatiser. Commencez par bannir les aliments difficiles à digérer, comme la viande rouge par exemple. Oubliez les sodas, les boissons alcoolisées, le café, le sel et les desserts sucrés qui assoiffent et abaissent le taux de sucre dans le sang après quelques heures. Privilégiez de la nourriture bien cuite et buvez suffisamment d’eau pour rester suffisamment hydraté le premier jour de jeûne.
Une fois le jour J arrivé, vous pouvez effectuer une purge intestinale (parlez-en avec votre médecin au préalable). En pharmacie, vous pourrez acheter un sachet de chlorure de magnésium ou de sulfate de sodium pour vider votre système digestif. Vous entrerez ainsi plus rapidement en période de jeûne.
Quels effets secondaires possibles et comment les éviter ?
Un jeûne de quelques jours seulement ne représente pas de gros danger car c’est un processus physiologique normal. Il est toutefois contre indiqué aux femmes enceintes, aux personnes souffrant d’une insuffisance rénale ou à l’IMC inférieur à 18. Chez les individus atteints d’un ulcère de l’estomac, de diabète de type 1 ou d’un cancer, un suivi médical très strict est recommandé.
Mais même si vous êtes en bonne santé, vous n’êtes pas à l’abri de quelques petits désagréments, surtout les premiers jours. Au commencement, vous pourrez ressentir une sensation de froid. En effet, qui dit jeûne dit absence de chaleur dégagée par le travail digestif et production d’hormones thyroïdiennes réduite. N’hésitez pas à vous couvrir davantage et à boire de l’eau chaude sous forme de tisanes ou d’infusions.
Par ailleurs, jeûner sans compenser la perte de sels minéraux peut entraîner de l’hypotension. Ce qui peut conduire à des vertiges voire des chutes. Qui plus est, une carence en potassium peut présenter un risque sur le plan cardiaque. Pour vous protéger, privilégiez les sels minéraux. Grâce à leurs propriétés alcalinisantes, ces derniers vont lutter contre l’acidose (augmentation du pH sanguin) et ainsi limiter les effets de l’état induit par les diètes faibles en glucides comme les nausées, les migraines ou encore la mauvaise haleine.
Ces désagréments “sont liés à une acidose métabolique importante (baisse du pH du plasma sanguin qui devient plus acide) : en effet, dès la 36e heure de jeûne, des corps cétoniques sont fabriqués par l’organisme, à partir des réserves de graisse. C’est un processus de compensation qui se déclenche lorsque le corps ne peut plus puiser dans ses ressources de glucose comme source d’énergie”, explique le Dr Coudron, spécialiste du jeûne, au site Doctissimo.
Enfin, vous pouvez également vous supplémenter en poly-vitamines et en oligo-éléments principaux pour booster votre organisme pendant le jeûne.
Combien de temps faut-il jeûner ?
Si le jeûne intermittent semble avoir de nombreux effets positifs, trois jours consécutifs permettraient à l’organisme de faire peau neuve et une semaine entière de se nettoyer en profondeur. Si vous souhaitez aller encore plus loin, il vous est vivement recommandé de le faire sous la supervision d’un médecin expérimenté.