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Maladie neurodégénérative

Les personnes analphabètes ont trois fois plus de risque de développer une démence

Par Charlotte Arce

Les personnes n’ayant jamais appris à lire et à écrire encourent un risque trois fois supérieur de développer une démence.

Michail_Petrov-96/iStock

En France, selon les derniers chiffres de l’Insee datant de 2012, 7 % des 18-65 ans seraient illettrés, soit 2,5 millions de personnes ne sachant ni lire, ni écrire.

Selon une nouvelle étude menée par le Columbia University Vagelos College of Physicians and Surgeons, à New York, elles seraient particulièrement à risque de développer une démence. “Savoir lire et écrire permet aux gens de s'engager dans plus d'activités qui utilisent le cerveau, comme lire les journaux et aider les enfants et les petits-enfants à faire leurs devoirs, explique le Pr Jennifer J. Manly, autrice de l'étude publiée dans la revue Neurology. Des recherches antérieures ont montré que de telles activités peuvent réduire le risque de démence. Notre nouvelle étude démontre que la lecture et l'écriture peuvent être des facteurs importants pour aider à maintenir un cerveau en santé.”

Un risque de démence trois fois supérieur

Pour étudier le lien entre maladie neurodégénérative et analphabétisme, les chercheurs ont recruté 983 personnes ayant un faible niveau d’éducation et ayant grandi dans des zones rurales de République dominicaine où l’accès à l’éducation était limité. L’âge moyen des participants était de 77 ans. Deux groupes ont été constitués : un groupe de 237 personnes analphabètes, c’est-à-dire n’ayant jamais appris à lire et à écrire, et un groupe de 746 personnes alphabétisées.

Les participants ont subi des examens médicaux, des tests de mémoire et de réflexion au début de l'étude et lors des rendez-vous de suivi qui ont lieu tous les 18 mois à deux ans.

Les résultats sont éloquents : sur les 237 personnes analphabètes, 83 d'entre elles (35%) étaient atteintes de démence au début de l’étude. Parmi les personnes alphabétisées, 134 sur 746 étaient atteintes de démence, soit 18%. Après ajustement en fonction de l'âge, du statut socioéconomique et des maladies cardiovasculaires, les personnes qui ne savaient ni lire ni écrire présentaient presque trois fois plus de risque d'être atteintes de démence au début de l'étude.

Un renforcement du cerveau

Quatre ans après le début de l’étude, le risque de développer une démence s’est encore accru. Parmi les personnes non atteintes de démence et analphabètes, 114 sur 237 ont développé une démence, soit 48%. Parmi les personnes alphabétisées, 201 personnes sur 746, soit 27 %, ont aussi développé une démence. Après ajustement en fonction de l'âge, du statut socioéconomique et des maladies cardiovasculaires, les chercheurs ont constaté que les personnes qui ne savaient ni lire ni écrire étaient deux fois plus susceptibles de développer une démence pendant l'étude.

“Notre étude a également révélé que savoir lire et écrire était lié à des résultats plus élevés aux tests de mémoire et de raisonnement en général, et pas seulement à des résultats en lecture et en langue, poursuit le Pr Manly. Ces résultats suggèrent que la lecture peut aider à renforcer le cerveau de plusieurs façons qui peuvent aider à prévenir ou à retarder l'apparition de la démence.”

“Même s'ils n'ont que quelques années d'éducation, les gens qui apprennent à lire et à écrire peuvent avoir des avantages à vie par rapport à ceux qui n'apprennent jamais ces compétences”, affirme-t-elle.

Selon les chercheurs, de nouveaux travaux sont nécessaires pour connaître le potentiel de programmes de lecture et d’écriture dans la diminution du risque de démence.