Les probiotiques sont dans l’ère du temps. Dans un rapport conjoint, l'OMS et la FAO les définissent comme “des micro-organismes vivants qui, ingérés en quantité suffisante, peuvent avoir un effet bénéfique sur la santé en améliorant la flore intestinale.” Ils auraient ainsi le pouvoir d’améliorer le transit, de lutter contre les colopathies ou encore les ulcères de l’estomac. La tendance est telle que selon les experts du secteur, le marché des probiotiques devrait atteindre l’ordre des 50 milliards de dollars de chiffres d’affaires mondial d’ici quatre ans. Pourtant, d’après Que Choisir, le mensuel de l’association Union fédérale des consommateurs, “notre microbiote peut s’en passer”. Dans son dernier numéro paru le 21 novembre, l’organisme attaque la commercialisation de probiotiques sous forme de simples compléments alimentaires.
“Pour certaines infections intestinales récalcitrantes aux antibiotiques en transplantant le microbiote d’une personne saine à un malade, on parvient à le guérir quasi instantanément”, écrit Que Choisir, qui rappelle que le microbiote peut également avoir une influence sur des maladies auto-immunes telles que des cancers ou des maladies neurologiques.
Pourtant, depuis quelques années, on n'évoque plus que les probiotiques pour prendre soin du microbiote. En 2015, des scientifiques ont réussi à manipuler des bactéries présentes dans notre système digestif pour faire baisser de 30% le taux de glucose chez des rats diabétiques, tandis que d’autres ont montré que l’absorption de probiotiques pourrait limiter la prise de poids chez les personnes obèses en réduisant l’absorption des graisses. Leurs bienfaits iraient même au-delà de problèmes liés à l’intestin, selon certains chercheurs. D'après une étude présentée dans la revue International Forum of Allergy & Rhinology, les probiotiques seraient par exemple une voie thérapeutique à envisager pour les personnes souffrant de rhinite allergique.
A chacun son microbiote intestinal
Si la science s’intéresse aux capacités des micro-organismes vivants, les probiotiques vendus en pharmacie ne sont pas forcément bénéfiques pour tout le monde, rappelle Que Choisir. Dans un rapport, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), épingle “l’usage d’allégations de santé portant sur les micro-organismes (telles que le terme ‘probiotiques’)”. “Ces affirmations visent les fonctions immunitaires, la digestion et sont quelquefois associées aux enfants. Or, aucune allégation de santé n’est à ce jour autorisée pour ces bactéries”, écrit-elle. Aussi, les souches microbiotiques commercialisées n’ont pas le droit de porter le nom de “probiotiques” ni de vanter leurs effets sur la santé, alerte la DGCCRF.
Le monde du micro-organisme est particulièrement complexe, et le microbiote intestinal propre à chacun. Par conséquent, “les données issues de décennies de recherches sur l’efficacité des probiotiques dans la prévention et le traitement des maladies demeurent contradictoires, controversées et déroutantes”, explique le Pr Philippe Marteau, gastro-entérologue à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris. D’après le spécialiste, il convient de “raisonner au cas par cas”. Certaines personnes seraient par exemple “hospitalières” par rapport à certaines bactéries probiotiques, tandis que d’autres non.
Or, “comme ce sont des compléments alimentaires, les fabricants n'ont pas à faire la preuve de l'efficacité avant la mise sur le marché, contrairement aux médicaments (…) En fait, les fabricants ne prennent pas souvent la peine de mener ces études parce qu'elles sont très chères et ce n'est pas nécessaire puisque finalement ça se vend sans qu'il y ait besoin de ces preuves”, explique à BFMTV Fabienne Maleysson, journaliste autrice de l'étude pour Que Choisir.
Cataloguer les probiotiques comme des médicaments ?
Par conséquent, les chercheurs suggèrent que les probiotiques soient catalogués comme des médicaments et non comme des compléments alimentaires. Ainsi, leur efficacité pourrait être testée avant la mise sur le marché.
D’après le Syndicat national des compléments alimentaires, en 2017, le marché des compléments alimentaires représentait 2,3 milliards de dollars de chiffres d’affaires en France, ce qui nous classe parmi les plus gros consommateurs européens. Intéressant quand on sait que récemment, l'association 60 Millions de consommateurs mettait quant à elle en cause l'efficacité de nombreux compléments alimentaires dans un numéro spécialement dédié au sujet.