Le cancer de la prostate est le plus diagnostiqué chez les hommes dans le monde. Mais dans la plupart des cas, la maladie se développe lentement et ne nécessitera pas de traitement. Toutefois, à l’heure actuelle, les médecins peinent à prédire quelles tumeurs deviendront agressives, ce qui complique le choix d’un traitement pour de nombreux hommes. Aujourd’hui, des chercheurs sont en train de mettre au point un outil qui pourrait "révolutionner" le diagnostic de ce cancer : un test urinaire utilisable à la maison. Cette étude a été présentée le 29 novembre dans la revue BioTechniques, les patients n’auront donc pas besoin de se déplacer pour fournir un échantillon d’urine ou de subir un examen rectal inconfortable.
Les scientifiques de l'Université d'East Anglia et du Norfolk and Norwich University Hospital (Grande-Bretagne) avait déjà créé un test capable de diagnostiquer le cancer agressif de la prostate et de prédire si les patients nécessiteront un traitement ou pas jusqu’à cinq ans avant les méthodes cliniques traditionnelles. Cette fois-ci, ils ont montré que le test 'PUR' (Prostate Urine Risk) peut être effectué sur des échantillons prélevés à domicile.
Les chercheurs ont fourni à 14 participants une trousse de prélèvement à domicile et des instructions. Les volontaires ont ensuite envoyé leur urine par la poste et les chercheurs ont comparé les échantillons prélevés le matin à domicile à ceux prélevés lors d’un examen rectal numérique.
Les biomarqueurs identifiés beaucoup plus précisément
Il s’avère que la première miction de la journée fournit des niveaux de biomarqueurs de la prostate beaucoup plus élevés et constants. "Nous avons mis au point le test PUR, qui examine l'expression des gènes dans les échantillons d'urine et fournit des informations vitales sur le caractère agressif ou le "faible risque" d'un cancer (…) Parce que la prostate est constamment sécrétée, la collecte d'urine de la première miction des hommes de la journée signifie que les niveaux de biomarqueurs de la prostate sont beaucoup plus élevés et plus constants, ce qui représente une grande amélioration", expliquent les chercheurs.
Ainsi, "nous avons constaté que les échantillons d'urine prélevés à domicile montraient les biomarqueurs du cancer de la prostate beaucoup plus clairement qu'après un examen rectal. Et les commentaires des participants ont montré que le test à domicile était préférable", se félicitent-ils.
"L'utilisation de notre test At Home pourrait à l'avenir révolutionner la surveillance active de la progression de la maladie, les hommes n'ayant plus qu'à se rendre à la clinique pour un résultat urinaire positif. Cela contraste avec la situation actuelle où les hommes sont rappelés à la clinique tous les six à douze mois pour des biopsies douloureuses et coûteuses (…) Cela signifie que les hommes n'auraient pas à subir un examen rectal numérique, donc ce serait beaucoup moins stressant et devrait entraîner beaucoup plus de patients à subir un test", poursuivent-ils.
Moins de stress pour le patient, moins de travail à l’hôpital
Et de développer : "parce que le test PUR prédit avec précision le cancer de la prostate agressif et si les patients auront besoin d'un traitement jusqu'à cinq ans plus tôt que les méthodes cliniques standard - cela signifie qu'un test négatif pourrait permettre aux hommes de ne subir un nouveau test que tous les deux ou trois ans, réduisant le stress pour le patient et la charge de travail à l'hôpital".
"C'est un développement très excitant car ce test nous donne la possibilité de différencier ceux qui le font de ceux qui n'ont pas le cancer de la prostate, évitant ainsi de soumettre beaucoup d'hommes à des examens inutiles. Lorsque nous diagnostiquons un cancer de la prostate, le test d'urine a le potentiel de différencier ceux qui ont besoin d'un traitement de ceux qui n'en ont pas besoin, ce qui serait d'une aide précieuse. Ces patients passent ensuite à un programme de surveillance active à la suite du diagnostic, qui peut comporter des biopsies répétées et des examens IRM, ce qui est assez intrusif. Ce test urinaire a le potentiel de nous dire si nous devions intervenir auprès de ces patients", commente Robert Mills, chirurgien consultant en urologie au Norfolk and Norwich University Hospital. A terme, ces résultats pourraient également permettre de mettre au point des tests de dépistage à domicile pour le cancer de la vessie ou du rein.
Le cancer de la prostate touche l’homme dans la deuxième partie de sa vie, à partir de la cinquantaine. En France, pour 50 000 nouveaux cas chaque année, il y a environ 8 000 décès par an. "Quand on le diagnostique, ce cancer est le plus souvent localisé à la prostate et donc guérissable. On proposera alors soit la radiothérapie, soit la curiethérapie ou éventuellement, une ablation de la prostate", expliquait Karim Fizazi oncologue médical spécialiste de la prise en charge du cancer de la prostate, professeur d’université et chef de service à l’institut Gustave Roussy, à Pourquoi Docteur dans un papier sur le sujet.