ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Les grossesses tardives ont des conséquences sur la santé cardiaque et artérielle des garçons

Grossesse

Les grossesses tardives ont des conséquences sur la santé cardiaque et artérielle des garçons

Par Dr Reetika Sirhindi

La croissance fœtale des garçons est moins bien prise en charge par le placenta de la mère lorsqu’elle tombe enceinte au-delà de 35 ans. En revanche, l’âge n’a aucune incidence sur le fœtus si le bébé est une fille. 

KatarzynaBialasiewicz/iStock
MOTS-CLÉS :

Les grossesses au-delà de 35 ans sont considérés comme tardive pour le monde scientifique. Aux Etats-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et en Australie, les grossesses des femmes de plus de 35 ans représentent entre 14 et 22% des naissances totales chaque année. Une étude publiée à la fin du mois de novembre dans la revue Scientific Reports indique que l’âge maternel aurait des conséquences sur la santé du fœtus. Selon les résultats des chercheurs de l'université de Cambridge (Royaume-Uni), de l'université de l'Alberta (Canada) et du Robinson Research Institute de l'université d’Adélaïde (Australie), l’âge de la mère affecterait l'efficacité du placenta à transporter les nutriments au fœtus, ce qui entraînerait le développement de problèmes cardiaques et de tension artérielle chez les garçons, réduisant la croissance de ce dernier. 

Les fœtus mâles sont moins choyés que les autres

Pour leur étude, les chercheurs ont mené des tests sur des rats âgés de 3 à 4 mois (jeunes) et de 9 mois et demi à 10 mois (âgés), ce qui correspond à des humains d'environ 35 ans. L'équipe a constaté que la structure et les fonctions du placenta se réduisent chez les mères plus âgées, ce qui affecte les fœtus. Ces changements sont néanmoins plus importants chez les fœtus mâles, ce qui réduit la capacité de la mère à soutenir la croissance de sa progéniture.

Chez les mères âgées, les changements dans la structure et la fonction du placenta sont bénéfiques s’il s’agit d’un fœtus féminin, allant même jusqu’à optimiser la croissance du futur nourrisson. Dans certains cas, les résultats étaient même meilleurs que ceux d’une mère jeune. A contrario, pour le fœtus masculin, la croissance est moins soutenue par les mères âgées, tout comme leur placenta qui ne fonctionne pas correctement. 

Chez les rates âgées, la concentration en glucose était 11% plus élevée que chez les rates jeunes. En revanche, les taux d’insuline, de leptine, de cholestérol et d’acides gras restent identiques. D’autre part, plus de la moitié des fœtus des rates âgées (55%) ont un poids inférieurs à celui des rates jeunes. Cette réduction de poids s’accompagne d’une diminution significative du poids du cœur, du cerveau et du foie chez les fœtus mâles, mais n’a aucune incidence sur les fœtus femelles. Enfin, l’efficacité du placenta des rates âgées par rapport aux rates jeunes a été réduite de 22% lorsque le fœtus était de sexe féminin, et de 37% lorsque le fœtus était masculin. Ainsi, arrivé à un certain stade, l’âge maternel compromet le développement fœtal et l’efficacité du placenta.

Mieux prendre en charge les grossesses tardives

“Une grossesse à un âge plus avancé est une proposition coûteuse pour la mère, dont le corps doit décider comment les nutriments sont partagés avec le fœtus, explique Tina Napso, boursière post doctorale à l'université de Cambridge et première autrice de cette étude. C'est pourquoi, dans l'ensemble, les fœtus ne grandissent pas autant pendant la grossesse lorsque la mère est plus âgée que lorsqu'elle est jeune. Nous savons maintenant que la croissance, ainsi que l'expression des gènes dans le placenta, sont affectées chez les mères plus âgées d'une manière qui dépend en partie du sexe : les changements dans le placenta des fœtus mâles sont généralement nuisibles.”

L’étude menée sur des rats montre que les changements placentaires chez la femme âgée peuvent être liés à une plus grande probabilité de mauvaise santé chez leur progéniture mâle. Bien que l'on ait constaté que la croissance des fœtus mâles et femelles était réduite chez les mères plus âgées, l'étude a également révélé des différences spécifiques au sexe dans les changements et le développement du fœtus, ce qui augmente le risque que les enfants de la femme plus âgée présentent des problèmes cardiaques et de tension artérielle à un âge avancé, surtout chez les hommes. 

“Cette nouvelle compréhension du développement et de la fonction placentaire pourrait contribuer à une meilleure gestion des grossesses humaines et à l'élaboration d'interventions ciblées pour améliorer la santé à long terme des enfants nés de mères plus âgées”, suggère Tina Napso.

Les résultats de l’étude indiquent également que la grossesse à un âge plus avancé augmente aussi le risque de complications comme la pré-éclampsie, le diabète gestationnel, le risque accru de mort à la naissance et des restrictions de croissance fœtale. Jusqu’à présent, les études menées n’ont pas été en mesure de donner une compréhension complète de la façon dont le placenta se modifie par rapport à l’âge de la mère.   

Une étude de 2015 arrivait déjà à la même conclusion

Cette recherche s'est appuyée sur une étude antérieure datée de 2015 et publiée dans la revue Hypertension, qui établissait un lien entre l'âge maternel et les complications cardiaques et la tension artérielle à un stade ultérieur chez les enfants, surtout chez les garçons. Cette nouvelle étude aide à mieux comprendre son fonctionnement et explique pourquoi le fœtus n’est pas soutenu de la même manière par l’utérus de la mère âgée en fonction de son sexe.

La docteure Amanda Sferruzzi-Perri, autrice principale de l'étude et boursière au département de physiologie, de développement et de neurosciences de l'université de Cambridge, affirme que l'étude gagne également en importance, car l'âge moyen de la première grossesse chez les femmes, surtout dans les pays développés, est de plus en plus élevé. Une meilleure compréhension des changements du placenta pourrait aider à gérer la grossesse et assurer la croissance optimale du fœtus. 

Les chercheurs préconisent la réalisation d'un plus grand nombre d'études chez l'homme et insistent sur la nécessité de prendre en compte le sexe du fœtus chez les femmes enceintes de plus de 35 ans.