Le cholestérol est un lipide de la famille des stérols qui joue un rôle central dans de nombreux processus biochimiques. Il est indispensable au bon fonctionnement de l’organisme, participant par exemple à la synthèse de la vitamine D au niveau de la peau. Il est transporté par les lipoprotéines. Et, alors que les lipoprotéines à haute densité (HDL) le transportent vers le foie où il est dégradé, ce qui permet d’éliminer les excès, les lipoprotéines à faible densité (LDL) le conduit vers les cellules du corps, ce qui empêche son élimination. D’où le surnom de mauvais cholestérol, dangereux pour la santé quand il est trop important. Un taux trop élevé favoriserait notamment les risques cardiovasculaires et d’AVC, rappelle une nouvelle étude. Selon les travaux parus mercredi 4 décembre dans la revue The Lancet, donner un traitement pour abaisser le niveau de mauvais cholestérol chez les moins de 45 ans permettrait de réduire ces risques plus tard dans la vie.
Pour en arriver à cette conclusion, les auteurs ont analysé les données de près de 400 000 habitants de 19 pays occidentaux. L’âge médian des participants était de 51 ans et la période médiane de suivi pour observer les évènements cardiovasculaires 13,5 ans (maximum 43 ans).
Ils ont ainsi pu remarquer les taux d’évènements cardiovasculaires sur 30 ans étaient trois à quatre fois plus fréquents chez les personnes ayant trop de mauvais cholestérol que chez les autres les autres (33,7% contre 7,7% pour les femmes, et 43,6% contre 12,8% pour les hommes). Cette augmentation du risque sur le long terme serait par ailleurs majorée chez les patients relativement jeunes (moins de 45 ans).
La durée d'exposition à un cholestérol élevé met la santé à risque
Ainsi, les femmes de moins de 45 ans avec un niveau de mauvais cholestérol un peu élevé (entre 1,45 et 1,85 gramme par litre) et présentant au moins deux facteurs de risques de maladies cardiovasculaires (obésité, diabète, hypertension ou tabagisme) avaient 16% de plus de risque d’avoir un accident cardiovasculaire avant 75 ans. Chez celles avec le même profil mais âgées de 60 ans ou plus, le risque n’était en revanche que 12%. Chez les hommes avec ces facteurs, les probabilités étaient respectivement de 29 % et de 21 %.
“Ce qui suggère que ce n’est pas seulement le niveau de cholestérol mais la durée d’exposition à un cholestérol élevé qui met la santé à risque”, commente Paul Leeson, professeur de médecine cardiovasculaire à l’université d’Oxford (Royaume-Uni), dans un commentaire indépendant sur l’étude.
D’autant plus qu’en simulant une réduction de 50% du taux de cholestérol au cours d’une vie grâce à des médicaments de la famille des statines, les chercheurs ont constaté une réduction du risque cardiovasculaire à tous les âges. Les bénéfices sont encore plus significatifs chez les jeunes, probablement car ils auraient diminué leur exposition au cholestérol pendant une plus longue période de leur vie. Dans le détail, le risque cardiovasculaire des femmes et des hommes de moins de 45 ans chuterait respectivement à 4 et 6%.
Contrôler son niveau de cholestérol plus tôt
“Ces résultats confortent l’idée que contrôler le niveau de cholestérol plus tôt au cours de la vie pourrait davantage porter ses fruits que si l’on attend d’être plus avancé en âge”, avance le Pr Leeson.
“À l'heure actuelle, la plupart des gens ne pensent pas à passer un test de cholestérol avant d'avoir atteint la cinquantaine ou la soixantaine. À ce moment-là, ils auraient pu vivre avec un taux de cholestérol élevé depuis plus de 40 ans et beaucoup de dommages ont déjà été causés”, explique quant à lui Stefan Blankenberg, qui a participé à l’étude, au site Medscape Medical News.
“Nos données suggèrent que nous ne devrions pas attendre l'âge mûr pour y réfléchir. Plus vous êtes jeune quand vous découvrez que vous avez un taux de cholestérol élevé, plus vous pouvez en faire pour minimiser les dommages (…) Nous ne recommandons pas à tout le monde de prendre une statine toute sa vie, mais nos résultats suggèrent qu'un test de cholestérol à l'âge adulte est une bonne idée. De cette façon, il sera possible pour chaque individu de déterminer son risque et de décider s'il doit ou non prendre une statine”, poursuit-il.
Les effets secondaires des statines restent mal évalués
Avant de pouvoir établir des recommandations médicales précises, plus de recherches sont toutefois nécessaires afin de mesurer les effets d’un traitement pour réduire le cholestérol sur le long terme. En effet, les données actuelles sur les statines “n’ont pas évalué des traitements durant plusieurs décennies, ce qui signifie que le risque d’effets indésirables — qui modifieraient le ratio bénéfice-risque — n’est pas clairement établi”, rappelle Jennifer G. Robinson, professeure au département d’épidémiologie de l’université d’Iowa (Etats-Unis), dans un autre commentaire indépendant à l’étude.
Il y a quelques mois, une étude publiée dans le New England Journal of Medicine faisait état d’une alternative aux statines controversées pour réduire le cholestérol. D’après les chercheurs, l'acide bempédoïque, pas encore approuvé en Europe, permettrait d’empêcher efficacement l’organisme de créer trop de cholestérol. Et, ce sans effets secondaires comme des atteintes musculaires, des hépatites ou le diabète. Forte de ces résultats encourageants, la société pharmaceutique américaine à l'origine du médicament testé cherche aujourd’hui à obtenir une licence pour le commercialiser cette année en Europe et aux États-Unis.