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Expérimentation

Marseille : la réalité virtuelle pour réduire le stress des patients après une greffe de poumons

Par Raphaëlle de Tappie

A Marseille, l'hôpital Nord va bientôt proposer des casques de réalité virtuelle aux patients sur le point de recevoir une greffe de poumons. Le but étant de les préparer aux éventuelles complications post-opératoires et de soulager leur stress. 

LightFieldStudios/iStock

En 2018 en France, 372 personnes ont reçu une greffe de poumons. Cette intervention est réservée aux patients atteints d’une insuffisance respiratoire chronique menaçant leur vie dans les mois à venir. Les pathologies en cause sont la mucoviscidose, l’hypertension artérielle pulmonaire, la fibrose pulmonaire (cicatrices dans le tissu pulmonaire) ou l’emphysème pulmonaire (lésions des alvéoles). Mais une fois l’opération, qui consiste à enlever un seul ou les deux poumons du malade et à les remplacer par ceux d’un autre individu, terminée, les risques de complications sont nombreux et le chemin bien long avant d’être complètement tiré d’affaire.

Les patients se voient donc exposés à une grande anxiété et nombre d'entres eux tombent en dépression. Pour mieux les préparer à cette période difficile, François Maltese, psychologue dans le service de médecine intensive et réanimation à l’hôpital Nord de Marseille, a eu l’idée d’avoir recours à la réalité virtuelle, une première mondiale. S’il attend encore un dernier feu vert de la Commission de protection des personnes pour commencer son expérimentation, cette dernière devrait débuter en janvier au plus tard sur un groupe de 25 patients tirés au sort. 

“L’enjeu, est de faire sortir le patient le plus vite possible de la réanimation, où la durée moyenne de séjour varie de 15 jours à 3 semaines. Car plus vous restez longtemps, plus vous êtes exposés à des risques de complication et susceptibles de développer des infections”, explique le docteur Maltese à 20 Minutes

Se visualiser au moment du réveil  

Pour développer cette technologie, le médecin a contacté une start-up toulonnaise du nom de C2Care. Depuis 2015, cette entreprise met la réalité virtuelle au service de la santé. Ses logiciels sont aujourd’hui utilisés par près de 600 professionnels du secteur pour traiter les phobies ou relaxer les patients au moment d’un acte médical laborieux.

Cette fois-ci, “on a travaillé sur un scanner qui nous permet à la fois d’avoir du réalisme, de pouvoir interagir et se déplacer comme dans un jeu vidéo, et d’avoir une vision 3D, c’est cela la grande nouveauté au niveau de la technologie”, explique Pierre Gadea, cofondateur de C2Care.

Avant la greffe, chaque patient se verra proposer trois séances de 45 minutes minimum chacune. Muni de son casque, il rencontrera le personnel soignant et visitera le bloc de réanimation. Il se visualisera ensuite au moment du réveil, allongé et attaché et assistera aux soins quotidiens et aux visites médicales avant d’être exposé aux possibles imprévus des suites de l’opération. Pour plus de réalisme, C2Care s’est rendu dans les box de réanimation de l’hôpital Nord, qui réalise 80 greffes du poumon chaque année. “Ce sont nos propres matériels qui figurent à l’image”, détaille François Maltese.

La réalité virtuelle, de plus en plus utilisée par les hôpitaux occidentaux

Très bientôt, le médecin pourra donc commencer à tester cette technique sur des patients. D’ici deux ans, les effets de cette méthode devraient pouvoir être mesurés. A terme, François Maltese espère aboutir à une diminution de 30% du stress des patients après la greffe. A l’hôpital Nord, d’autres services ont déjà montré leur intérêt pour cette pratique. Si cette dernière fonctionne, elle pourra “peut être extrapolée dans plein de domaines de la chirurgie programmée, et pourquoi pas aussi pour les grossesses à risque”, espère François Maltese.

En Occident, plusieurs hôpitaux ont déjà commencé à proposer des casques de réalité virtuelle pour aider les futures mamans à se détendre lors de l’accouchement. En Belgique, pour faciliter la séparation entre mère et enfant après une naissance par césarienne, la polyclinique Jean Villar, à Bruges, installe un casque aux femmes en salle de réveil afin qu’elles puissent suivre les premiers instants de leur bébé comme si elles y étaient.

Depuis peu, l’université du Pays de Galle a quant à elle commencé à expérimenter la réalité virtuelle sur un petit groupe de futures mamans. Le but étant de leur proposer des images d’aurores boréales et de dauphins nageant dans des eaux turquoises pour échapper aux murs blancs et angoissants de l’hôpital et oublier les douleurs du travail. Enfin, aux Etats-Unis, l’hôpital Cedars Sinai a mis au point un scénario de réalité virtuelle rattachant davantage les femmes à l’accouchement afin de ne pas les déposséder de cette expérience. Les futures mamans sont emmenées sur une plage jusqu’à ce que un feu de camp s’allume doucement sur le sol. Dans le même temps, un arbre rose ressemblant à un placenta s’épanouit.