Un rapport inquiétant. Si l’air que nos respirons en France est chargé de particules fines et de gaz toxiques, entre 40 et 90 pesticides y sont également présents. Parmi les plus fréquents, quatre herbicides et deux insecticides, dont un déjà interdit, et trois fongicides. Tel est l’alarmant résultat de quinze ans d’études menées par plusieurs associations de surveillance de l’air, rendu public mercredi 18 décembre par Atmo France, la fédération des Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (Aasqa).
Pour leur étude, les chercheurs ont recensé les mesures réalisées par l’ensemble des Aasqa entre 2002 et 2017. Dans le détail, 321 substances actives ont été recherchées et 6 837 prélèvements effectués sur 176 sites permanents ou mobiles répartis en zone rurale ou urbaine.
Les scientifiques ont ainsi pu constater que bien que les agglomérations semblent globalement moins exposés que certains territoires non urbanisés, elles peuvent être touchées. Selon les années, la concentration des pesticides est très variable. Elle dépend “des conditions météorologiques locales, de la nature des sols, des caractéristiques physiques et chimiques de la substance active, des équipements utilisés lors du traitement…”, explique Atmo France. “La période fin printemps-été présente des concentrations plus élevées sur les zones viticoles (fongicides) alors que sur les zones de grandes cultures (herbicides) les concentrations sont plus importantes en période automnale”, est-il détaillé.
Des produits qui peuvent être diffusés dans l’atmosphère par le vent ou érosion éolienne ou des sols
Malheureusement, contrairement aux particules fines ou au dioxyde d’azote émis par les voitures diesel, les pesticides ne sont soumis à aucune surveillance réglementaire. Il existe juste des limites à ne pas dépasser dans l’eau et l’alimentation. Pourtant, pendant les traitements ou quand ils sont utilisés longtemps, les produits phytosanitaires peuvent être diffusés dans l’atmosphère par le vent ou érosion éolienne ou des sols.
“Jusqu’aux années 2000, on pensait qu’il n’y avait pas de pesticides dans l’air, donc on ne s’y intéressait pas”, explique Emmanuelle Drab-Sommesous, référente pesticides à Atmo France, citée par Le Monde. Certaines associations régionales ont commencé à les surveiller en 2002, tandis que d’autres ne s’y sont mises qu’en 2016.
Dans leur rapport, les experts s’inquiètent de la présence dans l’air du lindane, un produit interdit en agriculture depuis 1998 et comme anti-poux depuis 2006. Ces produits “sont toujours dans le sol, puisqu'ils sont persistants. Et par différents phénomènes de météo par exemple par le vent, par la remise en suspension de particules, on peut encore les retrouver dans l'air”, explique Charlotte Lepitre, coordinatrice du réseau santé Atmo France, citée par Franceinfo.
Diverses préconisations
En conclusion de cet inquiétant rapport, les experts ont plusieurs préconisations. Parmi elles, la mise en place d’une plateforme nationale d’enregistrement des produits phytopharmaceutiques pour centraliser les achats de pesticides et leur utilisation recommandée, l’intégration des pesticides dans la surveillance réglementaire de la qualité de l’air ou encore l’incorporation de la mesure des pesticides dans l’air ambiant comme indicateur de suivi dans les dispositifs actuels de réduction de l’usage des suivis.
Ce rapport paraît alors que le gouvernement vient d’annoncer qu’à partir du 1er janvier 2020, l’épandage des pesticides les plus dangereux sera interdit à moins de 10 mètres des habitations et des établissements scolaires. Le gouvernement a donc choisi de mettre en place des “zones de non-traitement des sols” afin de “renforcer les mesures de protection des riverains”.