Maladie silencieuse, l’hypertension artérielle (HTA) toucherait, selon une étude de Santé publique France, plus d’un Français sur trois, dont la moitié ignorerait sa condition et ne prendrait donc aucun traitement.
Correspondant à une hyperpression du sang sur la paroi des artères, elle a pour conséquence de rigidifier celles-ci et de les faire vieillir prématurément, ce qui expose à un risque majeur d’accidents cardiovasculaires, en particulier l’infarctus du myocarde, les attaques cérébrales et l’insuffisance rénale.
Si l’hypertension artérielle touche en majorité des personnes de plus de 65 ans, elle peut néanmoins se développer bien plus tôt, et en particulier chez les personnes passant de longues heures au travail.
C’est ce que révèle une nouvelle étude menée par des chercheurs du département de médecine de l’université de Laval, au Québec, et dont les conclusions viennent d’être publiées dans l’Hypertension Journal report, la revue de l’American Heart Association.
Un risque d’hypertension dès 41 heures de travail par semaine
Pour étudier la corrélation entre longues heures de travail et hypertension, les chercheurs ont fait appel à plus de 3 500 employés de bureau de trois établissements publics du Québec, qui se sont pliés à trois vagues de tests sur cinq ans. Les chercheurs ont d’abord fourni aux volontaires un moniteur portable pour vérifier leur tension artérielle, qu’ils devaient porter au repos trois fois en une matinée, puis durant leur journée de travail. Les données étaient alors recueillies toutes les 15 minutes. Les lectures moyennes au repos étaient de 140/90 mmHg ou plus, et les lectures moyennes au travail de 135/85 mmHg ou plus, ce qui est considéré comme élevé.
Les résultats obtenus ont montré que travailler 49 heures ou plus par semaine était lié à une probabilité 70 % plus élevée d'avoir une hypertension masquée et 66 % plus élevée d'avoir une hypertension soutenue. Travailler entre 41 et 48 heures par semaine était lié à une probabilité de 54 % plus élevée d'avoir une hypertension masquée et de 42 % plus élevée d'avoir une hypertension soutenue.
“L'hypertension masquée et l'hypertension soutenue sont toutes deux liées à un risque plus élevé de maladie cardiovasculaire”, explique Xavier Trudel, professeur adjoint au département de médecine sociale et préventive de l'université Laval à Québec et auteur principal de l'étude.
Au total, près de 19% des employés suivis pendant cinq ans ont développé une hypertension, y compris ceux qui prenaient déjà un traitement. Plus de 13 % des travailleurs avaient une hypertension masquée et ne recevaient pas de traitement pour l'hypertension. “Le lien entre les longues heures de travail et l'hypertension dans l'étude était à peu près le même pour les hommes que pour les femmes”, complète le professeur Trudel.
Le stress comme principal facteur
Comment expliquer ce lien entre hypertension et temps de travail hebdomadaire ? Pour les chercheurs, si le stress au travail est bien un facteur d’hypertension artérielle, d’autres “facteurs de stress connexes pourraient avoir un impact”. “Des recherches futures pourraient examiner si les responsabilités familiales — telles que le nombre d'enfants d'un travailleur, les tâches ménagères et le rôle de garde d'enfants — pourraient interagir avec les circonstances de travail pour expliquer l'hypertension artérielle.”
“Les gens devraient être conscients que de longues heures de travail peuvent avoir un effet sur leur santé cardiaque, et s'ils travaillent de longues heures, ils devraient demander à leur médecin de vérifier leur tension artérielle au fil du temps avec un moniteur portable”, recommande Xavier Trudel. “L'hypertension masquée peut affecter une personne pendant une longue période et est associée, à long terme, à un risque accru de développer une maladie cardiovasculaire. Nous avons déjà montré que sur cinq ans, environ une personne sur cinq souffrant d'hypertension masquée n'a jamais présenté de tension artérielle élevée dans un contexte clinique, ce qui peut retarder le diagnostic et le traitement”, rappelle-t-il.