“Les effets du climat sur la santé humaine ne sont pas également ressentis sur tous les territoires et viennent bien souvent renforcer les inégalités de santé (d’origines sociale, environnementale)”. Et il semblerait que dans les décennies à venir, la région du sud-est de la France soit bien plus touchée que les autres. Tel est l’inquiétant résultat d’un rapport publié en novembre et réalisé par des experts du Groupe régional d'experts sur le climat (Grec).
Selon leurs prévisions, la sécheresse et la chaleur estivale dureront plus longtemps et plus fort tandis que les eaux souterraines et de surface diminueront de 20%. Les épisodes de pluies intenses devraient quant à eux se multiplier. Or, ces précipitations extrêmes entraînent le plus souvent des inondations qui provoquent la mort. Cet automne, 13 personnes ont perdu la vie lors de deux épisodes distincts en deux semaines dans le sud-est.
Outre les pertes humaines, les spécialistes redoutent un phénomène de “stress post-traumatique” chez les habitants de la région. “Une incidence élevée (pouvant atteindre 50 % des personnes exposées) de ce trouble a été observée dans de multiples études conduites après des catastrophes naturelles”, note le Grec. Or, le stress post traumatique peut entraîner des troubles anxieux, dépressifs ou des comportements addictifs dangereux.
Une prolifération de bactéries
“Le repérage précoce des conséquences psychosociales individuelles, leur prise en charge et leur suivi en évitant les ruptures de soins, la résilience au niveau individuel, mais aussi au niveau de communautés touchées, sont des enjeux incontournables pour permettre un retour à ‘vie normale’ à la suite de ces événements”, notent donc les experts.
Qui plus est, la chaleur pourrait entraîner la prolifération de bactéries dans les canalisations après traitement avant la distribution au robinet. La qualité des eaux pourrait également être affectée lors des pluies extrêmes : le lessivage des sols qui les accompagne pourrait remobiliser les polluants. Et la mer pourrait quant à elle être envahie par E.Coli, bactérie, à l’origine de gastro-entérites et autres infections.
Le réchauffement climatique est également idéal pour le développement d’agents pathogènes comme le moustique tigre, vecteur des virus du chikungunya, de la dengue et de Zika, déjà très présent dans la région Paca, à l’exception des zones montagneuses. Il y a quelques mois, pour la première fois en France, un foyer du virus tropical Zika a été confirmé par les autorités sanitaires, avec 3 cas autochtones identifiés à Hyères dans le Var.
Une hausse des allergies
Enfin, la hausse des températures devrait également entraîner une augmentation des allergies. Depuis 1989, la durée de la saison pollinique des graminées progresse déjà de 4,5% par an à Nice et ce chiffre n’est pas prêt de diminuer. Le phénomène est similaire avec les urticacées. D’ici quelques années, nous pourrions même arriver à un stade où l’allergie à la pariétaire, une plante vivace accrochée à des rochers ou de vieux murs, pourrait durer toute l’année. Par ailleurs, l’augmentation des températures devrait accélérer la prolifération des moisissures, à l’extérieur comme à l’intérieur des habitations, augmentant au passage les allergies aux acariens.
Ainsi, après 2050, “en l’absence d’actions d’envergure, de politiques et de stratégies environnementales et sociétales encourageant la transition énergétique et écologique, la situation deviendrait critique avec des événements climatiques qui affecteraient durement et de manière irréversible les conditions de vie des citoyens et leur environnement”, alertent les experts.
Ces derniers recommandent donc de mieux adapter les aménagements urbains pour lutter contre les îlots de chaleurs urbains, de développer la nature en ville en considérant le risque allergique et lié aux maladies vectorielles, de mettre en place des récupérateurs d’eaux pluviales ou encore d’améliorer les offres de transports collectifs et de mobilité douces pour limiter la pollution de l’air. La santé des populations devrait également être assurée par une activité physique encouragée par la marche, le vélo, la trottinette non électrique, le roller ou le skateboard, avance le rapport. Et les chercheurs de conclure : “Le changement climatique est en cours et l’inertie du système climatique nous invite à être vigilants à court, moyen et long terme.”