En France, 5,4 millions de patients n'avaient pas de médecin traitant en 2019, malgré une recherche active de plus de la moitié d'entre eux pour en trouver un.
Ce constat alarmant a été révélé par le directeur général de l'Assurance maladie, Nicolas Revel, dans un entretien accordée au magazine Le Généraliste. “Il y a toujours eu, au cours des dernières années, environ 10% de patients sans médecin traitant. En 2019, c'était le cas de 5,4 millions de patients”, a-t-il déclaré, se disant “très attentif” à la situation.
Si une partie de ces patients était jeune, en bonne santé et n'a pas essayé d'en trouver un, “plus de la moitié de nos concitoyens sans médecin traitant sont en recherche réelle d'un praticien attitré, faute souvent d'avoir pu en retrouver un au moment du départ à la retraite de leur généraliste”, précise Nicolas Revel. Parmi eux, des personnes âgées de 70 ans et plus, d'autres souffrant d'une maladie de longue durée ou d'une pathologie chronique.
La pénurie de médecins s'intensifie
“Si nous ne faisons rien, cette tendance va s'accroître inéluctablement dans les prochaines années”, alerte-t-il à juste titre. Selon les estimations de l'Agence régionale de santé Ile-de-France par exemple, 10 000 médecins libéraux franciliens seront en âge de partir à la retraite d’ici trois ans et ne seront pas remplacés. Les effectifs actuels diminueront alors de moitié, laissant 12 millions de patients supplémentaires sans praticien.
En décembre 2018, l'Ordre des médecins faisait déjà état de nombreuses disparités dans son Atlas annuel de la démographie médicale. Selon ces données, le nombre de médecins en activité régulière a diminué de 10% sur tout le territoire depuis 2010. Cette tendance concerne en premier lieu les médecins généralistes. S’ils étaient 94 261 en activité régulière en 2010, ils n'étaient plus que 87 801 en 2018, soit une baisse de 7,3% depuis 2010 (0,4% depuis 2017).
Les données du CNOM révélaient également un accroissement des inégalités entre les départements en termes de densité médicale. Les départements les moins bien pourvus comptaient en effet 1,6 fois moins de généralistes que les mieux lotis, contre 1,4 fois en 2010.
Des médecins refusent les nouveaux patients
Parallèlement à cela, près d'un médecin traitant sur deux refuserait de prendre de nouveaux patients, selon une enquête de UFC-Que Choisir menée auprès de 2770 médecins généralistes répartis dans 78 départements et parue en novembre 2019. Contactés par l'association “pour savoir s'ils acceptaient de nouveaux patients en tant que médecin traitant”, 44% d'entre eux ont répondu par la négative. 9% ont répondu qu'“ils souhaitaient d'abord voir le patient avant de se décider”.
“Si moins de 20% des généralistes refusaient de nouveaux patients dans le Bas-Rhin, la Meurthe-et-Moselle et les Pyrénées-Atlantiques, le taux de refus grimpe à 70% dans l'Allier, 78% en Charente et même 86% en Seine-et-Marne”, indiquait UFC-Que Choisir, soulignant contre toute attente que “les difficultés les plus grandes ne se rencontrent pas dans les déserts médicaux les plus importants, mais davantage dans la France périphérique des communes moyennes.”
Plus précisément, les refus seraient moins nombreux sur les territoires où l'offre médicale est insuffisante (39% de refus en moyenne) que dans ceux où la densité est dans la moyenne (46%), sans doute parce que dans le premier cas, les médecins sont conscients que ces nouveaux patients n'ont pas d'autre alternative.