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Apnée du sommeil : maigrir de la langue pourrait aider

Par Raphaëlle de Tappie

Une perte de masse graisseuse au niveau de la langue pourrait réduire les symptômes des patients souffrant d'apnée du sommeil. 

AaronAmat/iStock

L’apnée du sommeil, scientifiquement appelée “syndrome d'apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) est une maladie qui consiste en des arrêts involontaires de la respiration pendant la nuit car l’air ne passe plus normalement dans les poumons. Ces pauses durent plus de 10 secondes et se produisent plusieurs fois par nuit à une fréquence variable. Dans les cas graves, il arrive qu’elles surviennent jusqu’à plus de trente fois par heure. Elles peuvent alors se traduire par une fatigue au réveil, des maux de tête et une somnolence dans la journée. A terme, cette affliction peut entraîner des maladies cardiovasculaires, des défauts de vigilance responsables d'accidents, des dépressions ou encore des complications lors d’opérations sous anesthésie générale. Parmi les principaux facteurs de risque : de grosses amygdales ou une mâchoire en retrait mais surtout l’obésité. Aujourd’hui, une étude surprenante est parue sur le sujet. D’après des travaux parus le 10 janvier dans l'American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine, une perte de masse graisseuse au niveau de la langue améliorerait l'apnée du sommeil de patients obèses. 

En 2014, l’équipe du docteur Schwab de l'école de médecine Perelman de l'université de Pennsylvanie (Etats-Unis) avait déjà remarqué que les patients obèses souffrant d’apnée du sommeil avaient des langues présentant un pourcentage plus élevé de graisse que les autres. Ici, ils ont suivi 67 participants atteints d’apnée du sommeil légère à sévères et obèses pendant six mois. Grâce à un régime alimentaire ou à une chirurgie de perte de poids, les patients ont perdu près de 10% de leur poids corporel en moyenne.

Avant et après la perte de poids, ils ont subi des examens IRM du pharynx et de l'abdomen. Ils ont alors constaté que les résultats des participants en matière d’apnée du sommeil s’amélioraient de 31% après la perte de poids et que cela était surtout dû à la réduction du volume de graisse de la langue.

Une cible thérapeutique unique  

Les scientifiques ont également découvert que la perte de poids diminuait le volume des ptérygoïdes (muscles de la mâchoire qui contrôlent la mastication) et de la paroi latérale du pharynx (muscles situés sur les côtés des voies respiratoires). Ces deux changements ont également amélioré l'apnée du sommeil, dans une moindre mesure. 

“La plupart des cliniciens, et même des experts de l'apnée du sommeil, ne se sont généralement pas concentrés sur les graisses dans la langue. Maintenant que nous savons que le gras de la langue est un facteur de risque et que l'apnée du sommeil s'améliore lorsque le gras de la langue est réduit, nous avons établi une cible thérapeutique unique que nous n'avons jamais eue auparavant”, commente le docteur Richard Schwab.

Aussi, le gras de la langue pourrait être une nouvelle cible thérapeutique. De nouvelles études devraient désormais être menées pour voir si certains régimes à faible teneur en gras sont plus efficaces que d’autres pour réduire le gras de la langue et si les thérapies par le froid, comme celle utilisée pour réduire le gras de l’estomac, pourrait être utiles pour réduire le gras de la langue, avancent les chercheurs. 

Les patients asiatiques plus à risque

En attendant, ils examinent plus en détails les causes et les effets derrière ce mécanisme. Ils essayent également de comprendre si certains patients non obèses mais ayant une langue “grasse” pourraient être prédisposés à l’apnée du sommeil mais moins susceptibles d’être diagnostiqués.

Récemment, l’équipe du docteur Schwab a aussi découvert que l’ethnicité pourrait jouer un rôle dans la gravité de la maladie. D’après ses résultats, les patients asiatiques seraient plus susceptibles de présenter des symptômes graves. Aussi, obèses ou pas, tous les patients souffrant de ronflements ou de somnolence devraient être dépistés pour cette maladie, avancent les chercheurs.

“Les médecins de premier recours, et peut-être même les dentistes, devraient poser des questions sur le ronflement et la somnolence chez tous les patients, même ceux qui ont un indice de masse corporelle normal, car, d'après nos données, ils peuvent aussi être à risque d'apnée du sommeil”, conclut Schwab.

Un appareil dentaire pour soulager les symptômes ?

Actuellement, la plupart des patients sont traités avec des appareils CPAP (pression positive continue des voies aériennes) mais 25% d’entre eux ont du mal à tolérer cet attirail pour dormir. On leur propose alors des appareils oraux ou une chirurgie des voies aériennes supérieures, des processus plus compliqués. Récemment, une étude parue dans les Annals of the American Thoracic Society avançait que certains patients pourraient être traités efficacement avec un appareil dentaire, beaucoup moins encombrant.

En France, 5% de la population adulte est concernée par l’apnée du sommeil.