C'est une étude qui peut inquiéter tous ceux qui passent beaucoup de temps dans leur voiture: des travaux menés par une équipe de scientifiques de l'université de Californie (Etats-Unis) montrent que l'air à l'intérieur des automobiles contient des particules de TDCIPP (organophosphate chloré), un produit chimique potentiellement cancérogène couramment utilisé comme matière ignifuge dans le rembourrage des sièges des véhicules.
On savait que l'air inhalé à l'intérieur d'une voiture était déjà fortement pollué par les gaz et particules émis par le trafic automobile. Cette étude publiée dans la revue Environnement International montre que des produits générés par des matériaux à l'intérieur de la voiture peuvent être également toxiques.
Une liste de 800 produits cancérogènes ou toxiques
Ce serait le cas du TDCIPP dont les effets nocifs pour la santé (des risques de cancer et des problèmes de fertilité ont été constatés en laboratoire sur des rongeurs et des poissons-zèbres) lui ont pourtant valu d'être placé en 2011 sur la liste de la “proposition 65” en Californie qui recense plus de 800 substances chimiques “dont les effets cancérogènes ou la toxicité pour la reproduction sont reconnus par l’État de Californie”. Cette liste est mise à jour au moins une fois par an et couvre tous les produits de consommation vendus ou distribués en Californie, notamment les textiles, les chaussures, les biens d'équipements, les articles de bricolage, de puériculture et de papeterie, les jouets et les produits électriques ou électroniques.
De fait ce produit a été retiré de la fabrication des meubles pour la maison ... mais il continue d'être utilisé par l'industrie automobile. Ce qui a attiré la curiosité de David Wolz, professeur agrégé de toxicologie à l'université de Californie. Ce scientifique a étudié durant près de 10 ans l'effet de divers produits chimiques sur la fertilité et le développement précoce en utilisant comme modèle des cellules humaines et des poissons-zèbres. Chez ces derniers, il avait observé que le TDCIPP empêchait un embryon de se développer normalement.
Un bracelet en silicone pour capter les substances en suspension dans l'air
Sachant que le produit continuait d'être utilisé pour ignifuger les mousses des sièges de voiture, David Wolz a cherché à savoir comment l'exposition au TDCIPP pouvait avoir des effets en fonction du temps passé dans une automobile. Pour le savoir, il a utilisé… ses propres étudiants de premier cycle de l'université de Californie dont une majorité effectuent des trajets quotidiens en voiture.
Quatre-vingt-dix étudiants dont les temps de trajet variaient entre 15 minutes et plus de deux heures aller-retour ont été équipés d'un bracelet en silicone porté durant cinq jours. La structure moléculaire du silicone lui permet de capturer les substances en suspension dans l'air. Les observations faites durant cette expérience ont montre que le TDCIPP se retrouvait dans les poussières inhalées à l'intérieur des véhicules et que l'exposition à ce produit était un des seul parmi les autres organophosphates chlorés testés à montrer une forte association positive avec le temps de trajet.
Epousseter fréquemment l'intérieur des véhicules
Aucun échantillon d'urine n'a été prélevé chez les étudiants “cobayes” pour vérifier si le produit avait migré dan leur organisme. “Nous supposons que c'est le cas en raison de la difficulté à éviter l'ingestion et l'inhalation de poussière”, suggère David Wolz.
“Si nous avons fait des constatations en cinq jours de test, qu'est-ce que cela signifie pour une exposition chronique à long terme pour ceux qui passent beaucoup de temps en voiture durant des décennies ?”, s'interroge le chercheur qui souhaite répéter cette étude avec un plus grand groupe de personnes d'âges plus variés. En attendant, il propose une “solution” de bon sens : épousseter fréquemment l'intérieur des véhicules !