Le bilan du coronavirus chinois, le Covid-19, s’est envolé le jeudi 13 février: 242 décès supplémentaires ont été enregistrés et 14 840 nouveaux cas de contamination détectés. Un bond record qui fait suite à une nouvelle méthode de comptage désormais appliquée. Au total, 1 369 personnes sont décédées du coronavirus dans le monde. La chauve-souris est soupçonnée d’être à l’origine de cette épidémie, qui sévit depuis le mois de décembre. Cet animal était également à l’origine d’épidémies sévères de ces dernières années: le SRAS, le MERS, Ebola ou encore Marburg. Selon des chercheurs de l’université de Californie à Berkeley (Etats-Unis), la chauve-souris possède un système immunitaire très développé, qui s’avère favorable à la réplication des virus. Lorsque la maladie est transmise à un être vivant dont le système est moins fort — comme l’être humain par exemple — le virus fait alors des ravages mortels. Leur étude est publiée dans la revue eLife.
Pas d’inflammation chez la chauve-souris
La chauve-souris est le seul mammifère capable de voler. Dans les airs, elle parvient à rendre son métabolisme deux fois plus performant que celui d’un rongeur en train de courir. En général, une activité physique intense et un métabolisme élevé entraînent des ruptures de tissus, à cause de l’accumulation de molécules réactives, comme les radicaux libres. Toutefois, la chauve-souris, elle, semble être capable de supprimer ces molécules. “Certaines chauves-souris ont non seulement la capacité de déployer cette réponse immunitaire robuste mais aussi d’avoir une réaction anti-inflammatoire, explique Cara Brook, autrice principale de l’étude. Si notre corps tentait la même stratégie, notre système immunitaire enclencherait une inflammation étendue. Les chauves-souris semblent être les seules à pouvoir éviter la menace d’une maladie immunitaire."
L’infection est ralentie…
De plus, chez les chauves-souris, le système immunitaire libère des molécules de signalisation, appelées interférons alpha. Leur rôle est de dire aux autres cellules de se préparer à se battre avant qu’un virus n’arrive. Pour analyser l’influence de cette réponse immunitaire sur l’évolution du virus, les chercheurs ont utilisé des cellules de chauves-souris en culture (Roussette d’Egypte et chauve-souris noire d’Australie) et de singe. Les cellules de ces trois espèces ont été infectées en laboratoire par le virus Ebola et le virus Marburg. Résultat: les cellules du singe ont vite été dépassées par les virus et ont été tuées. Certaines cellules de la Roussette d’Egypte ont réussi à rejeter le virus grâce aux signaux de l’interféron, mais chez la chauve-souris noire d’Australie, l’infection a été ralentie. Les chercheurs ont également observé une persistance plus longue du virus dans l’organisme de l’animal.
… et le virus reste plus longtemps
“Il faut voir les virus sur une cellule comme un feu qui ravage une forêt. Certaines populations (les cellules) ont des couvertures de sécurité et le feu passe sur elles sans les blesser, mais cela laisse quand même des dépôts de suie. Ce sont des cellules virales qui sont toujours là”, détaillent les auteurs de l’étude. Ainsi, les cellules qui survivent vont se reproduire, et les nouvelles cellules deviendront de nouvelles cibles pour les virus. De cette manière, l’infection est plus longue dans le corps. “Cela voudrait dire qu’avoir un système d’interférons très robuste permettrait aux virus de rester plus longtemps dans leur réservoir. Avec une réponse immunitaire élevée, vous obtenez des cellules protégées de l’infection et le virus peut se répliquer sans causer de dégâts dans l’organisme de celui qui l’accueille. Ensuite, lorsqu’il se répand chez quelqu’un d’autre, le mécanisme antiviral n’est plus le même, et la pathologie se déclare.” C’est de cette manière que l’ont peut expliquer la mortalité chez l’Homme.
Étudier l’habitat des animaux
Les auteurs de l’étude souhaitent désormais analyser la trajectoire des virus, d’animaux en animaux, pour tenter de prédire leur émergence. L’habitat de ces derniers est également important. Les chercheurs ont en effet constaté que lorsque celui des chauves-souris est perturbé, elles ont une réaction de stress et répandent encore plus de virus dans leur salive, leurs urines et leurs déjections. C’est là que d’autres animaux peuvent être contaminés et ensuite transmettre la maladie à l’être humain.