Qu’est-ce que le flexitarisme ? “Être flexitarien, c’est avoir une consommation raisonnée. Ce n’est pas consommer moins, mais consommer mieux”, répond Maurice Huet, éleveur en Bourgogne et président du secteur ovin à l'Interprofession de la viande (Interbev) qui gère le stand Le Flexitarien au Salon international de l'agriculture. Une définition un peu éloignée de celle du Larousse pour qui le flexitarisme est un “mode d’alimentation principalement végétarien, mais incluant occasionnellement de la viande ou du poisson.”
“Être flexitarien, c’est ne se passer de rien”
Sur l’impressionnant stand consacré au flexitarisme, la viande est omniprésente. Que ce soit dans les vitrines, sur les écrans ou dans les activités proposées, le message est clair : inutile d’arrêter de manger de la viande. “Quatre-vingts pour cent des Français consomment moins de 500 grammes de viande par semaine (seuil maximum recommandé par le Programme National Nutrition Santé de l'Agence nationale de santé publique, NDLR) donc le but n’est pas d’inciter à manger moins. Ce que l’on veut, c’est manger une viande de meilleure qualité, qui respecte le bien-être animal et l’environnement, et qui soit accompagnée de légumes de saison”, justifie Maurice Huet.
Les passants qui gravitent autour du stand sont tour à tour curieux, convaincus et intéressés par la promesse de manger mieux. Ils auraient tort de s’en priver puisque, comme le promet l’Interbev, “être flexitarien, c’est ne se passer de rien”. “Je ne connaissais pas le terme, concède Carole Lecourt, venue accompagner ses deux enfants dans l’espace dédié à l’intérieur du stand. Sans le savoir, je suis moi-même flexitarienne puisque j’ai réduit ma consommation de viande. L’objectif, c’est de n’en manger pas plus que quatre fois par semaine”. Guillaume Bucherer, jeune trentenaire qui travaille au ministère des Armées, est plus familier avec ce terme. Pour lui, il désigne un choix alimentaire “moins radical que le végétarisme” et qui fait “coïncider, de manière intelligente, valeur et plaisir”.
Le flexitarisme, manger en respectant l’environnement
La consommation de viande, si elle est en baisse, s’est déplacée vers une consommation massive de produits transformés. “Les gens cuisinent de moins en moins et, quand ils le font, de plus en plus de viande hachée, qui représente désormais 50% de la viande consommée”, analyse Maurice Huet. C’est là qu’interviendrait le flexitarisme, en défendant une consommation de meilleure qualité pour tous, loin de la restauration rapide et des produits industriels. “Les personnes âgées ont une meilleure culture du bien manger, mais les jeunes viennent beaucoup nous voir pour demander des conseils”, observe François Mulette, Meilleur ouvrier de France, professeur à l’École nationale supérieure des métiers de la viande (Ensmv) et animateur du stand Le Flexitarien.
Au-delà de sa définition stricte, le flexitarisme renverrait également à une demande plus large de transparence et de respect de l’environnement. “La filière bovine s’est engagée dans un pacte sociétal qui se décline en plusieurs engagements et qui répond à une demande des consommateurs, développe Maurice Huet. Désormais, les exploitants peuvent mesurer leur impact environnemental grâce à un logiciel qui nous propose des solutions pour limiter notre empreinte carbone. La même chose existe pour le bien-être animal.”
Trois questions à Patrick Sérog, médecin nutritionniste
- D'où vient le flexitarisme ?
Après la Seconde Guerre mondiale, notre alimentation s'est transformée. Les aliments, avec en tête la viande et le poisson, sont devenus plus abordables économiquement pour les classes populaires qui se sont mis à les consommer massivement. Résultat, la population a grossi et c'est alors qu'est née une préoccupation pour les régimes. Cela n'a eu de cesse de prendre de l'ampleur, jusqu'au retour d'un comportement alimentaire ancien qui était l'apanage de gens plus pauvres qui mangeaient moins. C'est ainsi que sont apparus le “manger cru” (crudivorisme) et un engouement pour les jeûnes. Le flexitarisme s'inscrit dans cette mouvance, avec un souci pour la planète et le bien-être dans son corps. Le mouvement a trouvé sa voie, recommandant de manger moins de viande et de poisson, et plus de légumineuses riches en protéine pour trouver un équilibre alimentaire et une alimentation saine.
- Le flexitarisme, porté au Salon de l'agriculture par le lobby de la viande, relève-t-il du marketing ou est-ce une nécessité pour être en bonne santé ?
Le milieu bovin a sûrement eu peur de la diabolisation de la viande et a voulu prendre les devants. Le meilleur moyen a été de coller à la vague du “manger moins” en accompagnant les consommateurs, mais sans oublier la viande puisqu'elle a des vertus qui sont difficilement remplaçables par les autres aliments. Il faut trouver un équilibre. La viande apporte du fer et de la vitamine B12 qui sont deux éléments indispensables pour être en bonne santé. Adopter un comportement végétarien pose un problème de carence sur le long terme. Il est possible d'utiliser des suppléments mais ça n'est pas forcément agréable et cela peut donner des nausées.
- Quelle quantité de viande faut-il consommer pour être en bonne santé ?
Il est difficile de le savoir exactement. Ce qui est certain, c'est que pour avoir une quantité de fer suffisante, il faut manger de la viande rouge au moins une fois par semaine. Ensuite, il faut suivre les recommandations de Santé publique France qui conseille de ne pas excéder une consommation de viande hebdomadaire de 500g cuit ou de 750g cru. Sachant qu'un steak fait en moyenne 130g, cela correspond à trois ou quatre steaks par semaine. Cela permet d'avoir un apport en fer suffisant, sauf pour certaines populations, comme les jeunes enfants, les femmes enceintes ou celles qui ont des règles abondantes pour qui le besoin en fer est plus important. À l'inverse, si l'on mange trop de viande, le risque est d'avoir un apport trop important d'acide gras saturé, ce qui n'est pas bon pour le système cardiovasculaire. Enfin, un autre risque est d'avoir un apport énergétique trop important qui incitera notre corps à stocker de la graisse, augmentant le risque de surpoids et d'obésité.