Avec 92 000 personnes infectées dans le monde et 3 200 morts, l'épidémie de coronavirus, née sur le marché de Wuhan en Chine, est en toile de fond de notre quotidien depuis plus de deux mois. Devant la recrudescence de cas en France, une angoisse collective se fait doucement ressentir et un climat de méfiance semble s'être installé.
Dans un contexte aussi anxiogène, une question se pose : comment aborder le sujet avec les enfants afin de les sensibiliser sans les effrayer ? “Il faut parler vrai”, nous répond la psychologue clinicienne Aline Nativel Id Hammou, spécialiste dans le domaine des enfants, des adolescents et de la famille, et auteure de La charge mentale des enfants (Ed. Larousse). “Les enfants voient que les adultes ont de nouveaux gestes et leur font de nouvelles recommandations (évite le contact, ne fais pas de bisou, ne touche pas…).”
Expliquer le coronavirus de façon ludique
L'idéal, conseille-t-elle, est de partir de ce que sait l'enfant : “As-tu déjà entendu parler du coronavirus à l'école, au judo, ou au centre de loisirs ?” Les enfants discutent entre eux, répètent ce qu'ils entendent et s'interrogent face au comportement des adultes. “Il faut vraiment répondre à toutes les questions, même celles qui évoquent la mort, notamment pour diminuer l'imaginaire négatif”. Eviter les questions de l'enfant le contraint à imaginer les réponses, à tout interpréter, à s'attendre au pire. “Il faut oser dire les choses même si les questions sont incongrues”, conseille Aline Nativel Id Hammou.
Pour ce faire, il est préférable d'utiliser “un langage simple et clair” avec des dessins, de la couleur, ou encore une histoire : “Il s'agit du roi Virus qui veut conquérir tous les pays, il est bien dans le corps humain…” Il faut apporter un côté ludique pour capter leur attention, parler des symptômes et le rassurer : "N'hésites pas à me dire si ton nez coule un peu plus fort ou si tu as plus chaud que d'habitude... De toute façon, si tu tombes malade, tu seras accompagné, on prendra soin de toi”.
Eveiller une conscience sociale
L'adulte peut également apprendre les gestes de prévention à l'enfant, comme le fait d'éternuer dans son coude, en jouant. “Parler des symptômes et des gestes de prévention à l'enfant, c'est lui apprendre l'importance de prendre soin de soi et des autres, il éveillera une forme de conscience sociale et de l'empathie à l'égard des autres.”
De même, l'adulte peut lui expliquer pourquoi certaines personnes portent des gants ou des masques, afin qu'il ne soit pas surpris. “On peut aussi lui dire que oui, on peut mourir, mais que jusque-là les personnes âgées, voire très âgées et/ou déjà malades sont les plus vulnérables. Il faut dire la vérité de la façon la plus simple possible, parce qu'ils peuvent l'entendre ailleurs”. La psychologue recommande aussi de customiser les bouteilles de gel hydroalcoolique ou les masques pour apaiser les tensions.
Depuis le début de l'épidémie, une forme de racisme a émergé et la stigmatisation des enfants chinois et italiens se fait ressentir dans les cours de récréation. “Certains enfants associent le virus à un faciès, ce qui vient souvent des parents”, explique Aline Nativel Id Hammou. L'adulte peut donc aborder ce sujet et rassurer l'enfant afin qu'il ne discrimine pas ses camarades, notamment en lui expliquant que si le virus est bien né en Chine, tous les Chinois vivant en France ne sont pas naturellement infectés.