A l’heure où le coronavirus touche tous les continents, la psychose s’installe et de nombreux internautes passent leurs journées à investiguer sur l’épidémie, son évolution et les symptômes de la maladie. S’il est bien sûr important d’être correctement informé, trop se renseigner par soi-même pourrait avoir des effets contre-productifs, surtout quand les experts ignorent encore quasiment tout d’une affliction, comme c’est le cas ici avec le Covid-19. En effet, d’après une nouvelle étude parue fin février dans la revue Risk Analysis, faire beaucoup de recherches sur une menace infectieuse peut-être plus frustrant qu’autre chose.
Pour en arriver à cette conclusion, les chercheurs ont mené une enquête en ligne auprès de 494 personnes en âge de procréer qui vivaient en Floride en décembre 2016, époque où cet Etat comptait le plus grand nombre de cas de Zika transmis localement aux Etats-Unis. Les participants ont été interrogés sur leurs connaissances ou leur façon de chercher des informations sur la maladie. Les femmes enceintes atteintes de Zika ayant plus de probabilité que leur enfant naisse avec une anomalie congénitale spécifique, les participantes concernées ou prévoyant une grossesse se sentaient plus menacées par la maladie. Cependant, elles n’étaient pas les seules à s’inquiéter de cette affliction, pourtant asymptomatique dans la grande majorité des cas.
“Même si les données suggèrent qu'une personne est à faible risque, le manque d'information peut faire que certaines personnes se sentent à haut risque”, explique Shelly Hovick, co-autrice de l'étude et professeure adjointe de communication à l'université d'État de l'Ohio (Etats-Unis). Par ailleurs, les chercheurs ont remarqué que les participants avaient plus tendance à faire des recherches si leur entourage s’intéressait aussi au sujet.
“Une grande attention de la part des médias”
Autre observation intéressante : si les personnes préoccupées par Zika traitent souvent en profondeur les informations sur lesquelles elles tombent, elles n’ont pas forcément le réflexe de faire des recherches d’elles-mêmes. Ainsi, pour éviter cette désagréable sensation de flou, les agences de santé publiques devraient toujours informer en temps réel le public de l’évolution d’une épidémie.
Si cette étude a beau porter sur Zika, ces résultats peuvent s’appliquer au nouveau coronavirus, assurent les chercheurs. “Des risques nouveaux comme Zika ou le coronavirus peuvent faire que certaines personnes réagissent différemment des risques connus comme le cancer ou la grippe, commente Shelly Hovick. Le virus Zika et le coronavirus ont des points communs importants. Dans les deux cas, ils sont entourés d'incertitude et ont fait l'objet d'une grande attention de la part des médias. Notre recherche porte sur la façon dont les gens recherchent et traitent l'information quand il y a tant d'incertitude”, poursuit-elle.
Dans le cas de Zika, les informations disponibles étant limitées, il n’était pas forcément réconfortant d’essayer d’en savoir plus, concluent les chercheurs. “Nous avons constaté que plus les gens pensaient avoir des informations, plus ils se rendaient compte qu'ils n'en savaient pas assez”, explique Austin Hubner, auteur principal de l'étude et doctorant en communication à l'université de l'État de l'Ohio. “Avec le virus Zika, même les experts eux-mêmes ne savaient pas grand-chose à l'époque. C'est la même chose que pour le coronavirus, et cela fait peur aux personnes qui pensent être en danger”, conclut-il.
Des symptômes bénins dans la plupart des cas
Le virus Zika se transmet à l’être humain par la piqûre d’un moustique infecté du genre Aedes. Ce dernier peut aussi entraîner la dengue, le chikungunya et la fièvre jaune. Dans le détail, Aedes aegypti peut transmettre en zone tropicale ou subtropicale et Aedes albopictus (moustique tigre) dans les régions plus tempérées. Le moustique se contamine lui-même en piquant une personne déjà infectée et peut ainsi transmettre le virus en piquant un autre individu.
Dans l’organisme, le virus se multiplie et persiste trois à dix jours. La maladie est le plus souvent asymptomatique. Quand cela n’est pas le cas, les manifestations sont le plus souvent bénignes et de type grippal (maux de tête, courbature, éruptions cutanées, fatigue). Plus rarement, Zika peut se manifester par une conjonctivite, une douleur derrière les yeux ou par un œdème dans les mains et/ou les pieds. Le patient devra se reposer, s’hydrater au maximum et prendre des antalgiques pour soulager les douleurs.
Plusieurs zones d’ombre autour de la maladie
Cependant, dans de très rares cas, Zika peut avoir de lourdes conséquences. Des complications neurologiques de type syndrome de Guillain-Barré (affection où le système immunitaire attaque une partie du système nerveux) ont notamment été décrites au Brésil, en Polynésie française et en Martinique. Une augmentation inhabituelle des cas de microcéphalie (petitesse excessive de la tête) a également été remarquée chez les fœtus et les nouveau-nés au Brésil depuis novembre 2015, où a démarré l’épidémie de Zika.
Généralement, les humains ne sont pas contagieux entre eux, à quelques exceptions près. La contamination du virus par voie sexuelle est en effet possible, Zika pouvant se retrouver dans le sperme d’un homme. Quand une femme enceinte a des rapports avec un partenaire ayant séjourné dans une zone à risque, on lui conseille donc d’utiliser un préservatif. Toutefois, on ignore encore si le virus peut persister dans le sperme des hommes guéris et, si oui, combien de temps. Autre zone d’ombre : la contamination par transfusion sanguine. Si ce mode de transmission n’est pas encore certain, il est possible car le virus a été retrouvé dans le sang. Il pourrait y rester cinq à sept jours. Dans le doute, les autorités sanitaires recommandent aux personnes de retour d’une région endémique de reporter leur don de sang à au moins un an plus tard. Ainsi, comme le Covid-19, Zika reste encore un mystère à bien des égards.