"La 1ère fois ça fait toujours mal!", "l'orgasme de la femme est moins intense que celui de l'homme", "la fellation c'est obligatoire dans un couple", en matière de sexualité, les idées reçues sont nombreuses. La plupart des gens se sont déjà posés ce type de questions, sans forcément oser en parler ouvertement. Certains disent que l'été booste la libido... en tous les cas Pourquoi Docteur a voulu en avoir le coeur net dans une série d'entretiens avec un spécialiste du sujet.
Entretien avec le Dr Sylvain Mimoun, gynécologue et spécialiste de la sexualité. Il vient de publier aux éditions First « La masturbation rend sourd - 300 idées reçues sur le sexe » (1)
Pourquoi Docteur : En couple est-ce que la fellation est un passage obligé ?
Sylvain Mimoun: Obligé, non. D’ailleurs, dans le domaine sexuel, il vaut mieux que rien ne soit obligé. Cependant, c’est quand même beaucoup plus fréquent qu’avant. Il y a 20 ans, par exemple, quand une femme venait en consultation et disait : « Il y a des choses que je n’aime pas faire », on savait que c’était la fellation. Aujourd’hui, elles ne le disent plus. Cela ne veut pas dire qu’elles le font toutes. Mais cela veut dire qu’elles peuvent le faire, ou en tout cas, si elles ne le font pas, elles ne trouvent pas que c’est anormal de ne pas le faire. Et si on va du côté des jeunes filles aujourd’hui, elles considèrent que c’est banal de le faire. Après, qu’elles y trouvent du plaisir ou non, c’est une autre histoire.
Justement en consultation, est-ce qu’il y en a certaines qui avouent quand même, qu’elles se forcent pour faire plaisir à leur mari ?
Sylvain Mimoun: Il y a des femmes en effet qui disent que ce n’est pas leur « tasse de thé », si je puis me permettre, et du coup, elles le font plutôt pour faire plaisir que pour se faire plaisir. L’ennui, c’est que quand elles ne le font pas pour se faire plaisir, la plupart du temps, ce genre de pratique est abandonné, parce que le temps passant, il y a moins de motivation de part et d’autre, et du coup, les choses s’arrêtent. Là où il y a vraiment une motivation, c’est quand les 2 y trouvent du plaisir, et cela devient un jeu sexuel pour l’un comme pour l’autre. Ce qui n’est pas la majorité des cas.
Est-ce que la fellation permet d’éviter les infections ou les MST ?
Sylvain Mimoun: Si on ne reste qu’à la fellation, oui et non. Mais cela permet de transférer, si je puis dire, l’infection ailleurs. C’est-à-dire que si le sperme est infecté, au lieu qu’il touche le vagin et la zone génitale, il va toucher la bouche et la zone orale. Donc, cela n’empêche pas l’infection. Mais elle se manifeste autrement.
Est-ce que tous les hommes aiment véritablement les fellations ?
Sylvain Mimoun: Tout, ou jamais, n’existent pas en médecine. Et il y a des hommes qui ont peur de la fellation, qui n’apprécient pas, par éducation ou pour plein de choses, mais c’est vrai qu’une grande majorité d’hommes sont très friands de fellations.C’est important à dire parce qu’il y a des femmes qui, quand elles trouvent un homme qui n’aime pas ça, disent : « Il n'est pas normal, il doit être homosexuel, ou je ne sais quoi ». Alors d’abord, personne n’a dit que l’homosexualité n’est pas normale, et deuxièmement, ce n’est pas parce que l’on n’aime pas ce que la majorité fait qu’on est atypique ou anormal.
Le sexe oral s’est-il vraiment développé chez les jeunes comme ?
Sylvain Mimoun: Oui, chez les jeunes, c’est devenu banal d’avoir du sexe oral. Il y a des jeunes filles, même de 15 ans, qui font des fellations à leur copain, voire même qui sont filmées, mais ça c’est une autre histoire. Donc, c’est devenu une sorte de pratique banale, tout simplement parce que la pornographie est devenue assez banale chez les jeunes, et que, à force de voir ce type d’images, ils ont pu considérer que c’était normal d’avoir ce type d’attitude.
Le cunnilingus peut-il réellement augmenter le risque de cancer de la gorge comme l'expliquait Michael Douglas récemment ?
Sylvain Mimoun: Si on en croit Michael Douglas, oui. Sur le plan théorique, on peut le comprendre, dans la mesure où ce sont des papillomavirus qui peuvent exister, et que la femme peut avoir des papillomavirus, qui lui donnent, à elle, habituellement, le cancer du col, si jamais il y a un rapport avec pénétration, etc. Mais si ces papillomavirus sont là, il y a de fortes chances qu’ils soient au niveau de la vulve et du vagin. Et donc, s’il y a répétitivement un cunnilingus, le papillomavirus peut se transférer. Mais habituellement, une maladie surtout comme le cancer ne survient pas pour une seule cause, et c’est l’association de causes qui aboutit à quelque chose. Et pour ma part, même si on n’en a pas la preuve comme cela, il n’est pas neutre que Michael Douglas soit connu pour avoir bu et fumé beaucoup. Et donc le fait que le cunnilingus vienne se surajouter à cela, cela peut majorer le risque d’inflammation de la gorge et tout ce qui s’ensuit pour un cancer.
Les révélations de Michael Douglas ont un peu stigmatisé le cunnilingus, mais le risque est le même avec la fellation ?
Sylvain Mimoun: Théoriquement c'est le même risque. Mais il n’y a pas eu encore de femme célèbre qui dise : « J’ai eu un cancer de la gorge à cause de la fellation ». Peut-être même, que c’est encore plus net, parce que, s’il y a fellation, cela peut toucher le fond de la gorge, alors que le cunnilingus, pour que cela touche le fond de la gorge, il faut un certain nombre de cunnilingus.
1) La masturbation rend sourd - 300 idées reçues sur le sexe » Ed. First, 253 p. 17,95 €
Demain : « Les sex toys : jeux dangereux? », avec le Dr Sylvain Mimoun.
