Les statines, médicaments de la famille des hypolipémiants, sont prescrites à des millions de patients. Ce traitement est principalement utilisé pour abaisser leur taux de cholestérol sanguin, ainsi que pour prévenir le diabète.
Plusieurs études antérieures réalisées en laboratoire sur des cellules humaines ont montré que ce médicament pouvait également aider à combattre certaines formes de cancer. Une nouvelle recherche conduite par des chercheurs américains de la Johns Hopkins Medicine (Baltimore, États-Unis) décrit la manière dont les statines peuvent réduire le risque d'une forme agressive de cancer de la prostate.
"Il y a eu des indications épidémiologiques selon lesquelles les personnes qui prennent des statines à long terme ont des cancers de moins en moins agressifs et que les statines peuvent tuer les cellules cancéreuses en laboratoire, mais nos recherches n'ont pas été initialement conçues pour étudier les causes biologiques possibles de ces observations", précise Peter Devreotes, professeur de biologie cellulaire et de chimie biologique à la faculté de médecine de l'université Johns Hopkins.
Les statines considérées comme les plus efficaces pour combattre le cancer
Les résultats de ces nouvelles recherches ont été publiés le 12 février dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences. L’étude se base sur l’examen d'environ 2 500 médicaments approuvés par la Food and Drug Administration (FDA) américaine, afin de déterminer lesquels était le plus susceptibles d’interrompre la progression de cellules cancéreuses génétiquement modifiées via l'action de la mutation d’un gène du cancer appelé PTEN.
Parmi les milliers de médicaments, les statines, et en particulier la pitavastatine sont apparues comme les plus efficaces pour tuer le cancer. La plupart des autres médicaments n'ont eu aucun effet ou ont tué les cellules normales et les cellules modifiées au même rythme. Des concentrations égales de pitavastatine ont provoqué la mort de presque toutes les cellules artificielles, mais très peu de cellules normales, indique la synthèse de l’étude.
Les scientifiques ont ensuite examiné les voies moléculaires que les statines étaient susceptibles d'affecter. On sait par exemple que les statines bloquent une enzyme du foie qui fabrique du cholestérol, mais le médicament entraîne également la création d'une petite molécule appelée pyrophosphate de géranylgéranyle (GGPP) qui est responsable de la connexion des protéines cellulaires aux membranes cellulaires.
Les cellules cancéreuses cessent de se nourrir sous l’effet des statines
Lorsque les chercheurs ont ajouté de la pitavastatine et des GGPP à des cellules cancéreuses humaines présentant des mutations PTEN, ils ont découvert que les GGPP empêchaient les effets des statines de tuer et que les cellules cancéreuses survivaient, ce qui suggère que les GGPP pourraient être un ingrédient clé de la survie des cellules cancéreuses.
La troisième phase de l’expérience a consisté à observer au microscope les cellules conçues pour manquer de l'enzyme qui fabrique les GGPP. Les chercheurs ont constaté que les cellules cessaient de bouger et de se nourrir, ce qui a eu pour effet de stopper leur progression.
Peter Devreotes et son équipe prévoient de poursuivre les recherches sur les effets des statines chez les personnes atteintes de cancer ainsi que sur les composés susceptibles de bloquer l'action des GGPP.