- Des traitements pour des maladies cardiovasculaires, le diabète ou l'insuffisance rénale augmenteraient le risque de développer Covid-19
- Les patients concernés sont appelés à un strict respect des règles de précaution
Pourquoi certains patients atteints du Covid-19 souffrent-ils de graves complications pulmonaires ? Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine et les bloqueurs des récepteurs de l'angiotensine, des médicaments souvent prescrits aux personnes souffrant de maladies cardiovasculaires, de diabète ou de maladies rénales chroniques, peuvent augmenter le risque de Covid-19 grave, avance un chercheur américain dans un papier paru le 18 mars dans le Journal of Travel medicine.
Les coronavirus bêta du SRAS, le SRAS-CoV, qui a provoqué l'épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 et le nouveau SRAS-CoV-2, à l’origine du Covid-19, se lient aux récepteurs de l’enzyme de conversion de l'angiotensine 2 (ACE2) dans les voies respiratoires inférieures des patients malades, pour pénétrer dans leurs poumons. C’est pourquoi les patients sensibles, le plus souvent des seniors, développent parfois une pneumonie virale potentiellement mortelle après 10 à 14 jours d’incubation.
“Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IECA) et les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine (ARA-II) sont des médicaments hautement recommandés pour les patients atteints de maladies cardiovasculaires, notamment les crises cardiaques, l'hypertension, le diabète et les maladies rénales chroniques, pour n'en citer que quelques-unes”, explique le docteur James Diaz, professeur et directeur des sciences de la santé environnementale à la LSU Health New Orleans School of Public Health aux Etats-Unis. Or, beaucoup des patients prenant ces traitements sont des personnes âgées.
“Éviter les foules, les évènements de masse…”
La recherche sur des modèles expérimentaux a montré une augmentation du nombre de récepteurs ACE2 dans la circulation cardio-pulmonaire après des perfusions intraveineuses d'inhibiteurs ECA. “Comme les patients traités avec des IECA et des ARA-II auront un nombre accru de récepteurs ACE2 dans leurs poumons pour que les protéines du coronavirus S s'y fixent, ils pourraient être plus exposés à un risque d'évolution grave de la maladie en raison des infections par le SRAS-CoV-2”, explique James Diaz.
Cette hypothèse est soutenue par une récente analyse de près de 2 000 patients atteints du nouveau coronavirus, traités en Chine du 11 décembre 2019 au 29 janvier 2020. Les chercheurs faisaient alors état de conséquences graves chez les personnes souffrant d'hypertension, de coronaropathie, de diabète et de maladie rénale chronique. Tous les malades ayant reçu ces diagnostics mentionnés répondaient aux indications recommandées pour le traitement par des IECA ou des ARA.
Diaz recommande donc de futures études de cas-témoins chez les patients atteints du Covid-19 pour confirmer que le traitement chronique par des IECA ou des ARA peut bien augmenter le risque de résultats graves. “Les patients traités par des IECA et des ARA pour des maladies cardiovasculaires ne devraient pas arrêter de prendre leurs médicaments, mais devraient éviter les foules, les événements de masse, les croisières en mer, les voyages aériens prolongés et toutes les personnes souffrant de maladies respiratoires pendant l'épidémie actuelle de Covid-19 afin de réduire leurs risques d'infection”, écrit-il.
Pourquoi les enfants semblent épargnés
Quant aux enfants, qui semblent pour l’heure immunisés contre le Covid-19, deux mécanismes pourraient les protéger des infections. La première pourrait s’expliquer par des anticorps de protection croisée contre les multiples infections des voies respiratoires supérieures causées par les coronavirus alpha. La seconde pourrait être due au nombre moindre de récepteurs ACE2 dans leurs voies respiratoires inférieures pour attirer les protéines S de liaison des coronavirus bêta.
Le 11 février, une étude menée en Chine sur 44 000 cas infectés avait déterminé que, sur l’ensemble de ces personnes, seules 960 étaient âgés de moins de 19 ans, soit 2% des cas alors que cette classe d’âge représente 20% de la population chinoise.
Plus récemment, des travaux parus dans la revue Pediatrics réalisés à partir de l’analyse de dossiers de 2 143 cas pédiatriques de coronavirus observés en Chine entre le 16 janvier et le 8 février ont révélé que le Covid-19 avait été confirmé chez un tiers des malades de moins de 18 ans par des analyses en laboratoire. Toutefois, si certains jeunes ont souffert d’une forme grave de la maladie, les enfants sont globalement bien moins touchés que les adultes. Pour le docteur Betsalel Toledano, médecin aux urgences pédiatriques de l’hôpital de Creil, “les enfants peuvent être infectés par le virus, mais le plus souvent ne vont pas exprimer autant de symptômes que chez l’adulte.”
“Il faut savoir que les avis des spécialistes sont clairement partagés sur cette question. Certains disent qu’ils ont l’habitude, du fait des vaccinations, des petites infections répétitives en collectivité (crèche, école), les enfants ont un système immunitaire beaucoup plus performant. Le deuxième aspect est que le système pulmonaire chez les plus jeunes n’est pas totalement finalisé et ne permet pas au virus d’y pénétrer. La contagiosité est donc possible, mais les symptômes sont pauvres”, explique-t-il au site E-Santé.