Si cette période de confinement est une épreuve pour beaucoup, certains ont choisi d'évacuer les tensions et le stress en s'initiant quotidiennement à la méditation. Il n'est cependant pas chose aisée de trouver sérénité et quiétude quand l'esprit vagabonde d'une pensée à l'autre. Guèn Kelsang Tonpa, moine bouddhiste depuis 2006 et enseignant au centre de méditation Kadampa Paris, nous explique comment procéder.
Qu'apporte une pratique méditative régulière aux méditants ?
Le calme… C'est ce qui m'a plu quand j'ai commencé. On accède à des niveaux de paix et de légèreté sans engendrer de mauvaise dépendance. On a tendance à comprendre les choses intellectuellement, mais la méditation nous permet de les comprendre et de les intégrer en profondeur. L'avantage de la méditation c'est qu'il n'y a pas de contre-indication, plus on la pratique, plus cela devient facile et plein de vertus. C'est presque un art de vivre. On peut l'utiliser comme un outil pour assouplir l'esprit et lui donner des capacités de plus en plus grandes. Elle permet de prendre du recul, d'apaiser les tensions et le stress.
Alors que nous sommes confinés et dans l'impossibilité de suivre un vrai cours, peut-on s'initier à distance ?
On peut s'initier avec des guides, des cours en ligne, en live, ou grâce à une application. Un guide aidera le débutant à faire face à son agitation intérieure, il pourra le rassurer sur le fait que ce brouhaha est normal au début et l'accompagner. Il existe plusieurs types de méditation, il faut choisir au feeling, au ressenti, en essayant plusieurs cours.
Comment nos lecteurs peuvent-ils s'initier à la méditation depuis leur salon ?
En adoptant une position confortable qui empêche de s'endormir. Il n'est pas nécessaire de se mettre en tailleur, on peut méditer assis sur une chaise ou un fauteuil, le dos droit, les yeux clos ou mi-clos. Nous nous initions généralement à la pratique méditative par une méditation du souffle : on se détend et on se concentre sur les va-et-vient de l'air dans les narines. Il ne faut pas forcer, aller à son rythme et prendre du plaisir. Il est normal d'être assiégé de pensées, il faut les observer et les repousser doucement. Quand l'esprit erre, on le ramène sur le souffle, on s'ancre.
Cinq à 10 minutes suffisent pour commencer, car ce n'est pas la durée qui compte mais la répétition. Plusieurs méditations de 10 minutes valent parfois mieux qu'une méditation d'une heure. Dans la vie de tous les jours, nous regardons peu, voire pas à l'intérieur, alors il faut s'exercer. C'est un peu comme le sport : la méditation est un travail de l'esprit. A force de pratiquer on acquiert une endurance.
Peut-on adapter notre pratique méditative à un thème ou à une situation ?
A force de pratiquer la méditation du souffle, le méditant libère peu à peu de l'espace dans son esprit. A ce moment, nous apprenons à nos élèves à s'identifier à cette expérience de paix et leur disant qu'ils sont cette nature profonde de quiétude. On peut alors aller vers des états d'esprit spécifiques en se concentrant depuis cet espace intérieur sur l'impermanence des choses, la bonté des autres, la bienveillance, différents types de sagesse comme la vacuité ou encore l'accueil. En période de confinement, on découvre un nouveau style de vie : nous n'avons pas l'habitude d'être enfermés tous ensemble 24h/24, de pratiquer l'école à domicile, de télétravailler, on peut être stressé par la charge de travail et la privation de sa liberté de déplacement. C'est pourquoi il est important d'apprendre à accueillir ce qui survient.
On peut également prendre des décisions personnelles depuis ce vaste espace intérieur, orienter notre esprit dans la direction que l'on souhaite prendre. Comme nous avons accès à un niveau plus profond de nous-même, nous pouvons nous rassurer, émettre des intentions ou nous interroger sur notre façon de nous percevoir, ou de voir les autres, la vie.
A partir de quel âge les enfants peuvent-ils s'initier à la méditation ?
Vers l'âge de 7 ans, de la même façon que l'adulte : en commençant par la méditation du souffle. On peut lui apprendre en douceur à se focaliser sur sa respiration, lui expliquer qu'il est normal que son esprit vagabonde d'une pensée à l'autre et lui énoncer des affirmations positives. Les enfants tiennent moins longtemps que les adultes, c'est normal, il faut y aller progressivement.
Vous méditez depuis presque 15 ans, quelles vertus avez-vous observées sur votre santé physique et psychologique ?
Dans de nombreux cas, la diminution du stress évite l'aggravation des symptômes de certaines maladies et permet d'atténuer l'intensité de la douleur. Notre ossature est maintenue par nos muscles et nos tendons, donc lorsque ceux-ci se détendent, les os se replacent. Je l'observe sur moi-même : quand je médite, je sens les os de mon dos se repositionner. Ca réduit aussi les douleurs articulaires.
Méditer redonne de l'énergie car une partie de l'esprit se nourrit. On lâche prise, on se détache de l'anxiété et de l'agitation, ce qui permet de mieux dormir et gérer le quotidien avec plus de calme. On met de l'ordre dans nos pensées, car on a tendance à tourner en boucle, à exagérer les situations, donc méditer permet de nous détacher et de moins prendre les choses à cœur. On a plus d'humour aussi (rire), car les états d'esprit négatifs ont tendance à tout aggraver, ce qui ne contribue pas toujours à trouver les meilleures solutions.
Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs s'ils s'initiaient dans l'un de vos cours ?
Profitez de ce temps pour prendre conscience de vos projets intérieurs. On est obsédés par nos projets extérieurs (travail, maison, voiture, argent), alors que souvent nous avons peu de clarté sur nos projets intérieurs. Après le confinement, vous allez retourner à votre routine et courir partout, donc être bloqué chez vous est l'opportunité de vous demander quelle personne vous avez envie d'être et ce que vous voulez accomplir dans votre vie : “Est-ce que je veux développer plus de sagesse ? Etre plus bienveillant et tolérant avec les autres ? Donner un sens à ma vie ?”