Les généralistes s'inquiètent de ne plus voir leurs patients. Alors que les médecins ont l'habitude de suivre des patients touchés par des pathologies lourdes et chroniques, la majorité des personnes se rendant désormais chez le médecin suspectent des symptômes du coronavirus. Où sont passés les autres ?
“Tout le monde est terrorisé”
“Normalement, presque 50% de notre activité est liée aux douleurs thoraciques et abdominales. Là, on ne sait pas où sont passés ces patients…”, explique à Franceinfo Patrick Pelloux, médecin urgentiste à Paris et président de l'Association des médecins-urgentistes de France.
Contactée par Pourquoi docteur, la docteure Isabelle Jouffray, médecin généraliste en Seine-et-Marne, déplore une “communication floue” de la part du gouvernement : “Tout le monde est terrorisé. Les gens ont pris le confinement au pied de la lettre. On leur dit d'appeler le 15 en cas d'urgence, alors ils nous appellent peu, ce qui induit des retards de prise en charge, car le coronavirus n'empêche pas les autres maladies comme les infarctus ou les phlébites…”
Pourtant, le premier ministre Edouard Philippe a bien spécifié le 23 mars que “les soins urgents ou les soins qui répondent à une convocation d'un médecin” devaient être maintenus. “Un patient m'a dit avoir eu mal dans la poitrine pendant 3 jours mais qu'il ne voulait pas me déranger, s'inquiète Isabelle Jouffray. Or, ils ne peuvent pas savoir si leurs symptômes constituent une urgence sans avis médical”. Rappelons donc qu'il est autorisé et fortement recommandé de consulter un médecin traitant en cas de malaise ou de maladie pendant le confinement.
La téléconsultation, une solution adaptée
Le docteur Guedj, médecin traitant à Fontainebleau, nous explique avoir fermé son cabinet et opté pour la téléconsultaion : “Je ne vois pas comment les patients pourraient se rendre en cabinet, ils n'ont pas envie d'être contaminés. C'est évident que les généralistes ayant gardé le leur ouvert voient moins de patients”. Il semblerait que les patients soient donc plus rassurés de consulter leur médecin traitant à distance : “Les deux tiers me consultent pour une suspicion de coronavirus, mais le reste concerne d'autres pathologies.”
Néanmoins, certains patients, notamment âgés, ignorent comment utiliser ce nouveau dispositif qui requiert d'avoir un ordinateur et une connexion wifi. “C'est ma fille qui échange avec le médecin pour nous depuis son ordinateur, nous explique Jean-Jacques Solies, retraité de 66 ans. Ou j'appelle le médecin et elle envoie nos ordonnances par mail à ma fille, qui les transfère à notre pharmacie. Si nous n'avions pas notre fille pour le faire, c'est le médecin qui enverrait directement les ordonnances à la pharmacie et aux infirmières.”
Les consultations téléphoniques
Les autorités sanitaires ont été claires sur le sujet : les personnes âgées et/ou fragiles, c'est-à-dire déjà atteintes d'une ou plusieurs pathologies, sont les plus à risque face à l'épidémie. Il leur ai donc fortement recommandé de sortir le moins possible de leur domicile. A l'hôpital Necker, à Paris, où 2000 patients greffés ou en attente d'une greffe sont suivis, toutes les consultations non essentielles sont assurées à distance, par téléphone.
Dans un mail envoyé lundi 30 mars, que Pourquoi docteur a consulté, le secrétariat rassure les patients inquiets et leur explique qu'ils adaptent “la modalité de [leur] suivi en fonction de [leur] situation particulière (délai depuis la greffe, stabilité de votre fonction rénale…)”. L'hôpital insiste également pour que ces patients sortent le moins possible de chez eux. Un numéro leur a été communiqué en cas d'urgence.
Le déploiement des nouvelles technologies et de la télémédecine en France, spécialement en cette période de crise, “est un enjeu clé pour l’amélioration de l’organisation du système de santé et l’accès aux soins pour tous les assurés sur tout le territoire, indique l'Assurance maladie. Les conditions de réalisation et de prise en charge, ainsi que les tarifs encadrant les téléconsultations et les téléexpertises ont été définis en juin 2018, par un avenant à la convention médicale”. Les patients ne doivent donc pas hésiter à recourir à ce dispositif ou à appeler leur généraliste pour mettre des solutions en place.
Ci-dessous, le témoignage de 4 médecins sur la prise en charge des pathologies hors Covid-19: