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On en sait un peu plus

Coronavirus : la maladie ne serait pas que virale

Par Raphaëlle de Tappie

Sur Franceinfo, l'infectiologue Xavier Lescure a donné jeudi 16 avril quelques bonnes nouvelles. Selon lui, la vague épidémique a légèrement baissé et les patients sont aujourd'hui mieux pris en charge, notamment car on en sait plus sur la maladie, non seulement virale mais également inflammatoire et vasculaire. 

Spotmatik/iStock

On commence à respirer un petit peu”. Jeudi 16 avril sur Franceinfo, Xavier Lescure, médecin spécialiste en maladies infectieuses à l’hôpital Bichat à Paris, a donné quelques bonnes nouvelles. D’après lui la “vague a baissé un peu en intensité” depuis une semaine et les patients sont mieux pris en charge, que ce soit grâce à une meilleure connaissance de la maladie, non seulement virale, mais également inflammatoire et vasculaire, ou à cause des places supplémentaires à l’hôpital. 

“C'est vrai que les transferts de patients dans d'autres régions ont permis un appel d'air qui fait du bien aux patients, à la prise en charge de ses patients et aux équipes soignantes (…) On a un peu de marge sur les lits de réanimation et d'hospitalisation”, explique-t-il, inquiet des “autres pathologies hors Covid-19 qu'on ne voit plus et qui vont probablement revenir”. Le spécialiste craint enfin une aggravation des autres pathologies du fait que la priorité est donnée au Covid-19 et que beaucoup de gens attendent la fin de la crise pour aller consulter pour d’autres problèmes. 

Sur la maladie en elle-même, la communauté scientifique a désormais “un peu plus recul”. “On a appris des signes cliniques, en termes de surveillance et de vigilance, à surveiller le virage vers la bascule, vers la gravité, puisqu'on a appris que les patients pouvaient s'aggraver assez rapidement. On a appris beaucoup sur les comorbidités et les facteurs qui étaient associés à la gravité”, explique Xavier Lescure, rappelant que le plus souvent, les patients guérissent spontanément de la maladie, sans aucun souci particulier.

Une maladie virale, inflammatoire et vasculaire

Par ailleurs, si on sait depuis le début que la maladie est virale, on est au courant aujourd’hui qu’elle est aussi inflammatoire et vasculaire.

En effet, la fièvre, dont souffrent beaucoup de malades, est un mécanisme de défense et d’alerte de l’organisme montrant une réaction inflammatoire de l’organisme. Dans le détail, le virus déclenche la sécrétion de molécules inflammatoires nommées cykotines. Elles sont responsables de la fièvre. Les muqueuses rouges et gonflées, le mal de tête, la toux, la conjonctivite et la congestion nasale sont également indicateurs d’une réaction inflammatoire.

Quant au lien entre Covid et maladies cardiovasculaires, “une méta-analyse de 2016 avait montré qu’un patient avec une pathologie cardiovasculaire préexistante était plus à risque d’être infecté par le MERS-CoV (Middle East Respiratory Syndrome Coronavirus, un virus très virulent de la même famille que le SARS-CoV-2)”, est-il expliqué sur le site spécialisé Cardio Online.

Parmi les patients infectés avec des symptômes considérés comme sévères, près de 30% avaient une cardiopathie sous-jacente. Les patients cardiovasculaires sont aussi largement concernés par l’infection par le Covid-19 puisque les premières données font état de 58% d’hypertendus, 25% de cardiopathies et 44% d’arythmies dans la population infectée. Les symptômes sont plus intenses chez les patients avec maladie cardiovasculaire préexistante”, est-il précisé. 

Quid de la chloroquine et de l’azithromycine ?  

Aussi, pour traiter la maladie, il s’agit de traiter le virus, certes, mais aussi l’inflammation. Enfin, il faut prévenir “les maladies thromboemboliques, qui sont extrêmement importantes dans cette maladie, avec un tropisme vasculaire de l'infection et de l'inflammation, et avec une prévention qui permet d'éviter des morts subites”, explique Xavier Lescure.

Enfin, interrogé par Franceinfo sur le traitement du professeur Didier Raoult à base d'hydroxychloroquine et d'azithromycine, le médecin déplore que tout le monde soit si pressé.

Avec l'usage de l'hydroxychloroquine à Marseille, on aurait pu faire des essais randomisés si on avait un message un peu éclairé et un peu mesuré pour permettre aux personnes qui seraient incluses dans ces recherches de pouvoir avoir l'ambivalence de prendre ou pas l'hydroxychloroquine”, explique-t-il. “Quand on a un discours extrêmement tranché, on est convaincant sur un médicament. Et l'approche et la vision qu'on a de la maladie ou de son traitement peut être un peu biaisée de façon systématique”, poursuit-il.

Absence de groupe témoin

Depuis le début de la crise du Covid-19 en France, le professeur Didier Raoult, directeur de l’IHU Méditerranée Infection, a beaucoup divisé en encourageant la prescription de chloroquine, un médicament traditionnellement utilisé contre le paludisme, chez les patients atteints du coronavirus. Après avoir déjà publié une première étude encourageante sur le sujet mi-mars, il a dévoilé un deuxième essai plus large il y a quelques jours. L’étude a suivi 80 patients pendant 6 à 10 jours courant mars à l'IHU de Marseille, à qui on a administré une association d'hydroxychloroquine (dérivé de la chloroquine) et un antibiotique pulmonaire appelé azithromycine.

Les résultats mentionnent “une évolution favorable” pour 65 malades (81%), tandis que douze ont été mis sous oxygénothérapie (soit 15%). Trois sont passés en soins intensifs et un autre âgé de 86 ans est décédé. Si la plupart des cas ne représentaient qu’une forme bénigne du Covid-19, Didier Raoult assure depuis le début que la chloroquine est surtout efficace au premier stade infectieux de la maladie. Selon lui, ce médicament permettrait donc de limiter le cas et ainsi les risques de propagation.

Toutefois, tout comme la première, cette étude a fait l’objet de nombreuses controverses, plusieurs spécialistes lui reprochant notamment l’absence de groupe témoin, soit un groupe de patients n’ayant reçu aucun traitement ou un placebo.