En pleine « semaine européenne de la vaccination », le Haut Conseil de la santé publique attire l'attention sur les failles de la couverture vaccinale contre le « bordetellas pertussis ». « Alors que la primo-vaccination contre la coqueluche est bien effectuée, il n'en est pas de même des rappels : seuls un peu plus de 50% des adolescents ont reçu cinq doses de vaccins à 11-13 ans, et 40% de ceux-ci ont reçu la dernière dose de rappel à un âge inapproprié, vers 5-6 ans, rappelle le Pr Daniel Floret, président du Comité technique de vaccination (CTV). Ainsi à 18 ans, seulement 34% des adolescents sont protégés ». Ces pratiques ne sont pas ne conformité avec les recommandations du calendrier vaccinal : premières vaccinations à l'âge de 2, 3 et 4 mois, un rappel à l'âge de 16-18 mois, ainsi qu'un rappel entre 11-13 ans. Mais ce sont les jeunes adultes qui inquiètent encore plus le CTV. Le Pr Floret rappelle qu'en 2004, la stratégie du « cocooning » avait été instaurée. Elle permet de protéger les nourrissons trop jeunes pour être vaccinés (moins de trois mois), en immunisant leurs parents et leur entourage proche, qui sont « majoritairement impliqués dans la contamination ». « Il ne faut pas oublier que la coqueluche n'est pas une maladie pédiatrique, souligne Nicole Guiso, responsable du centre de référence de la coqueluche à l'Institut Pasteur. Elle peut atteindre l'homme à n'importe quel âge de sa vie, et à plusieurs reprises. » « Seulement 32% des coqueluches de l'adulte sont diagnostiquées, précise le Dr Serge Gilberg, de l'hôpital Necker - Enfants malades (AP-HP, Paris).
Ainsi, le Haut Conseil de santé publique a recommandé durant la grossesse de vacciner le père, la fratrie, et le cas échéant l'adulte en charge de la garde du nourrisson pendant les 6 premiers mois de sa vie, avec le vaccin quadrivalent dTcaPolio. De même pour la mère, le plus tôt possible après l'accouchement. « Cependant, différentes études montrent que cette stratégie de vaccination ciblée est peu appliquée », explique le Pr Floret. D'après une enquête, suite à la détection de plusieurs cas dans une maternité en juillet 2006, seules 11% des 65 mères interrogées ont répondu avoir reçu antérieurement une proposition de vaccination. Une autre étude menée auprès des médecins appartenant au réseau Sentinelles indique que si 80% des praticiens interrogés déclarent avoir eu connaissance des nouvelles recommandations concernant la vaccination coqueluche des adultes, la vaccination n'est faite que dans 35% des cas aux patients susceptibles de devenir parents, 30% lors du début d'une grossesse et 25% lors de la première consultation dans le post-partum. « Nous avons noté que rien n'avait été fait pour promouvoir la strétégie du cocooning », regrette le Pr Floret. Face à cette couverture vaccinale insuffisante, le Comité technique de vaccination a décidé de mettre en place dans ses dernières recommandations une stratégie complémentaire. Il recommande l'administration d'un vaccin tétravalent dTcaPolio pour les adultes n'ayant pas reçu de vaccin coquelucheux depuis plus de dix ans. En outre, pour pallier le changement d'affectation des personnels et à l'appel fréquent d'intérimaires, la recommandation est étendue à l'ensemble des professionnels de santé, y compris dans les établissements accueillant les personnes âgées (EHPAD). La mesure s'applique aussi aux étudiants en médecine ou en filière paramédicale, ainsi qu'aux personnels de la petite enfance. L'Institut de veille sanitaire rappelle qu'entre 2000 et 2005, parmi les 35 foyers nosocomiaux de coqueluche signalés, 27 concernaient le personnel. Et dans les trois quarts des cas la contamination s'est faite de soignant à soignant. Questions à Nicole Guiso, responsable du Centre de référence de la coqueluche à l'Institut Pasteur « Penser au vaccin pour les jeunes adultes » Pourquoi renforcer la vaccination auprès des adultes ? Nicole Guiso. Il faut rappeler que la coqueluche n'est pas une maladie pédiatrique. Elle peut atteindre l'homme à n'importe quel âge de sa vie. Et on peut l'avoir plusieurs fois au cours de son existence. Nos enfants sont bien vaccinés, et depuis 1998 nos adolescents sont bien vaccinés, grâce à l'arrivée du vaccin acellulaire. Depuis 2004, nous avons recommandé aux jeunes adultes de se faire vacciner, notamment ceux en âge d'avoir des enfants, ainsi que les personnels soignants. Mais nous avons constaté que les recommandations ne sont pas suffisamment suivies, et la couverture est encore trop faible. Nous avons recensé des infections nosocomiales dans plusieurs hôpitaux, ou dans des institutions pour les personnes âgées. Et dans la majorité des cas, la maladie est apportée par les jeunes adultes. C'est pour cela que le Comité technique a mis en place de nouvelles recommandations.
Et la vaccination des adolescents ? N. G. Les rappels n'ont été possibles qu'en 1998 car avant nous ne disposions pas de vaccins pour faire ces rappels. On avait des vaccins pour les très jeunes nourrissons, mais cela induisait des effets secondaires. C'est l'arrivée du vaccin acellulaire qui a permis la mise en place du rappel à 11-13 ans. Cela fait dix ans que nos adolescents sont vaccinés. La couverture atteint environ 50, 60% des adolescents, mais cela n'est pas suffisant. Pour les adolescent qui n'ont pas eu de rappel à 11-13 ans, nous recommandons un rattrapage à 15-16 ans.
Que faut-il retenir de cette nouvelle recommandation ? N.G. Ce qui est important de faire passer auprès des généralistes, c'est de vraiment penser à la vaccination anticoquelucheuse pour les jeunes adultes. Nous savons que les jeunes adultes vont rarement chez leur médecin, donc les praticiens n'ont que peu d'occasions pour faire passer le message. Il ne faut pas qu'ils les manquent. Et d'une façon plus générale, il faut rappeler à la population, et aux professionnels de santé, que pour protéger les nourrissons de moins de trois mois, chez qui la maladie peut être vraiment dangereuse, il est important de se faire vacciner. Entretien avec MG |