Dans la recherche de solutions contre le coronavirus, le consortium européen REACTing a lancé le 22 mars dernier une étude sur cinq traitements, dont quatre expérimentaux, à travers huit pays. Cela concerne en tout 3 200 patients qui sont atteints de Covid-19 et hospitalisés. Ces derniers sont répartis en cinq groupes. Un premier, de contrôle, reçoit des soins classiques, sans molécule expérimentale. Le deuxième groupe utilise le remdesivir, un antiviral développé sans succès durant l'épidémie d'Ebola en 2014. Le troisième groupe est traité par une combinaison de deux antiviraux : le lopinavir/ritonavir (vendu sous le nom Kaletra), utilisé contre le VIH. Le quatrième groupe reprend cette association en ajoutant l'interféron bêta, des molécules du système immunitaire. Enfin, le cinquième groupe teste l’hydroxychloroquine, avant ou après la mise sous oxygénation, développée en France par le professeur Didier Raoult.
Une étude adaptive
Pour l’instant, il est encore trop tôt pour que ces différents traitements donnent des résultats. Dans le même temps, les connaissances sur le coronavirus gonflent chaque jour. “L’idée, c’est que quand on progresse et qu’on comprend beaucoup mieux la façon dont le virus est structuré, la façon dont il fonctionne et la façon dont il interagit avec l’organisme, ça vous permet à ce moment-là d’avoir des stratégies complètement spécifiques au virus, explique Florence Ader, professeure de maladies infectieuses au CHU de Lyon et codirectrice du projet à Sciences et Avenir. Ça aboutit à deux innovations, qui sont d’une part de trouver des cibles qui nous permettent d’élaborer de nouveaux médicaments mais qui sont complètement spécifiques à ce virus — ce sont des médicaments dits de ‘deuxième génération’ — et on est déjà dans cette dynamique-là. Et bien sûr, le Graal, c’est de trouver un vaccin ou des vaccins qui soient assez spécifiques pour générer une réponse immunitaire qui soit complètement ciblée sur ce virus.”
En France, cette étude est coordonnée par l’Inserm. Au total, ce sont 800 personnes qui sont impliquées à travers cinq hôpitaux : hôpital Bichat à Paris, CHU de Lille, CHU de Nantes, CHU de Strasbourg et CHU de Lyon. "La grande force de cet essai est son caractère “adaptatif”, explique Florence Ader. Cela signifie que très rapidement les traitements expérimentaux inefficaces pourront être abandonnés et remplacés par d'autres molécules qui émergeront de la recherche. “Nous pourrons donc réagir en temps réel, en cohérence avec les données scientifiques les plus récentes, afin de donner le meilleur traitement pour nos malades.”
L’étude Discovery, étant donné l’urgence de la situation, ne comporte pas de double aveugle. Cela signifie que le patient est au courant du traitement qu’il reçoit, pouvant induire un effet placebo et atténuer la valeur des résultats. Un processus qui respecte le protocole choisi par l'Organisation mondiale de la santé pour son propre essai international Solidarity. La quantité de données récoltées à travers les différents pays participant au projet devrait compenser et répondre à la rapidité d’action nécessaire.