Si le Covid-19 fait si peur, ce n’est pas tant à cause de son taux de mortalité, mais surtout à cause de son terrible taux de contagiosité. En 2003, le SRAS avait contaminé 8 098 personnes dans le monde en six mois environ, avant d’être finalement maîtrisé. Aujourd’hui, SARS-CoV-2 a déjà infecté plus de 2,4 millions d’humains en en moins de trois mois. D’après une nouvelle étude parue dans la revue Clinical Infectious Disease, non seulement ce nouveau virus infecte beaucoup plus vite les cellules mais il produit également 3,2 fois plus de particules virales en 48 heures.
Pour en arriver à cette conclusion, des chercheurs de l’université d'Hong Kong ont étudié des échantillons de tissus pulmonaires vivants de six donneurs qu’ils ont infectés avec le SRAS et le SARS-CoV-2. Résultat: “Dans certains cas, le SARS-CoV-2 se réplique jusqu'à 100 fois en 48 heures, contre 10 à 20 fois avec le SARS-CoV”, explique Chu Hin, co-auteur de l'étude, au South China Morning Post. Cependant, malgré l’importante charge virale entraînée par le SARS-CoV2, celui-ci semble réagir avec beaucoup de retard. Le virus agit comme un ninja, sa réplication entraînant une plus faible inflammation et production d'interférons”, explique Jasper Chan Fok-woo, autre co-auteur de l'étude. Il s’agit de molécules de la famille des cytokines, connues pour booster le système immunitaire.
“Alors que le SARS-CoV active 11 marqueurs de gènes pro-inflammatoires sur les 13 types possibles, le SARS-CoV-2 en active seulement cinq”, notent les chercheurs. A cause de cette faible réponse immunitaire, le virus peut se développer très rapidement et n’entraîner que des symptômes mineurs chez de nombreux patients, très contagieux alors qu’ils ne sentent pas malades, d’où la difficulté à juguler l’épidémie.
Moins de 48 heures pour donner des antiviraux efficaces
Toutefois, les chercheurs ignorent encore les mécanismes exacts en jeu. “Si le SARS-CoV-2 de 2019 et celui de 2003 se fixent et pénètrent dans les cellules-hôtes via l'ACE2 [le récepteur auquel s'accroche la protéine virale], le mécanisme par lequel le premier surmonte la réponse immunitaire et supprime la production d'interférons ainsi que des cytokines pro-inflammatoires pour atteindre un degré plus élevé de réplication virale sont encore insaisissables”, admettent-ils. Le SARS-CoV-2 pourrait notamment contenir des protéines antagonistes de l'interféron différentes ou qui s’exprimeraient plus vigoureusement.
Ces résultats expliquent donc en partie pourquoi les patients touchés par le Covid-19 sont si rapidement contagieux et difficiles à détecter. Une fois le virus dans l’organisme, les médecins ont moins de 48 heures pour donner des antiviraux capables de limiter sa réplication chez le malade, contre sept à dix jours avec le SRAS. Qui plus est, les médicaments anti-inflammatoires, assez efficaces dans le cas du SRAS, sont ici inutiles puisque le nouveau virus dispose de son propre mécanisme d'autolimitation inflammatoire. En revanche, les produits type bêta-interféron pourraient être utiles, avance le virologue Yuen Kwok-yung chargé de l’étude.
“Même si l'épidémie s'atténue un peu pendant l'été, avec une immunité aussi faible, le virus continuera à se propager. Nous parlerons alors de la réouverture des écoles d'ici septembre, explique-t-il au sujet d'Hong Kong. Maintenant, nous essayons d'augmenter notre capacité de test, de nous assurer que vous n'êtes vraiment pas porteur du virus, que vous continuez à porter le masque, que vous continuez à avoir une très bonne hygiène des mains, que vous avez un responsable du contrôle des infections dans chaque bureau de la salle de classe pour s'assurer que tout cela est fait correctement, pour permettre à la société de continuer.”
Quid de la réouverture des écoles en France ?
En France, le président Emmanuel Macron a annoncé dimanche 14 mai un déconfinement à partir du 11 mai et une réouverture progressive des écoles à partir de là. Cette nouvelle a énormément inquiété les associations de professeurs et de parents d’élèves qui réclament plus de précisions de la part du gouvernement.
“Sans plan d'urgence pour l'école, la reprise est impossible sans risque de nouvelle vague de contamination. Arrêtons de faire semblant !”, s’est par exemple insurgée la FCPE, association de parents d’élèves. Pour son co-président Rodrigo Arenas, “le gouvernement a un mois pour présenter le plan d'urgence scolaire pour maintenir le respect des gestes barrière à l'école. Autrement, les parents risquent de ne pas rescolariser les enfants s'ils risquent de se contaminer ou de contaminer les personnels”, écrivait-il sur Twitter. “Si on doit rentrer avant l’été, ça suppose tout un plan de sortie de confinement. Tester les gens, désinfecter les locaux, avoir des masques et du gel hydroalcoolique, faire en sorte aussi que les élèves ne soient pas à 35 dans les classes”, a quant à elle prévenu Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes-FSU (syndicat majoritaire du secondaire), citée par Libération.
Le professeur Robert Cohen, spécialiste des infections des enfants, est quant à lui plus nuancé concernant l’annonce du président de la République. Si nous restons tous confinés “le plus probable, c’est qu’en septembre peu d’enfants auront eu une sérologie positive et on se retrouvera exactement dans la même situation”, explique-t-il dans le podcast de Pourquoi docteur. C’est pourquoi, selon lui, “c’est peut-être bien de commencer à rouvrir les écoles le 11 mai car cela va se faire progressivement et on verra ce qui est possible et raisonnable. Cela pourrait être un galop d’essai intéressant pour la rentrée.”
Le 11 avril, une étude également parue dans la revue Clinical Infectious Disease montrait toutefois que les enfants étaient extrêmement peu contagieux. Ici, les chercheurs se sont intéressés à un Français de neuf ans qui avait contracté le coronavirus aux Contamines-Montjoie en Haute-Savoie. Selon eux, il n’aurait contaminé personne dans les trois écoles et le club de ski qu’il a ensuite fréquentés. Une nouvelle assez rassurante, il faut bien en convenir.